274 L’exercice de la faculté de choix du salarié dépend étroitement de ce qu’on entend par contrat de travail691.En effet, l’accord ou le refus du salarié n’est sollicité, selon la distinction jurisprudentielle désormais courante692, que si la modification en cause touche un élément du contrat de travail. Ce qui implique, en cas de différend, que le juge se prononce sur l’objet de la modification proposée par l’employeur.
L’enjeu n’est pas négligeable puisqu’il vise à déterminer ce qui relève du contrat et donc de la volonté, tout en traçant les limites du champ d’exercice du pouvoir de l’employeur, quand bien même le pouvoir se trouve être à la source de la modification en cause (proposition sur initiative de l’employeur).Or, l’analyse des diverses décisions de la Chambre sociale de la Cour de Cassation démontre combien il est délicat de parvenir à un tracé précis de la sphère contractuelle et partant de l’espace d’exercice de la faculté de choix du salarié.
Sans reprendre nos précédents développements693, rappelons ici que la Cour de Cassation s’emploie à définir objectivement les éléments déterminants du contrat de travail, écrit ou non (A). Peu importent à cet égard les considérations d’ordresubjectif. Cette analyse abstraite et objective remplit son office s’agissant de définir la figure a minima du contrat de travail.
Par ailleurs, face à une volonté commune claire et non équivoque de contractualiser tel ou tel élément, l’intention des parties prime. A contrario, à défaut d’une volonté clairement exprimée par les parties, l’interprétation objective du juge cherche d’abord à déterminer le sens de la stipulation contractuelle, quitte à normaliser le contenu du contrat et à dépasser la recherche de la commune intention réglée par les articles 1156 à 1164 du code civil. En l’absence de clause explicite ou en cas de silence du contrat, l’approche du juge social consiste alors soit à prendre en considération, sur le fondement de l’article 1135 du code civil, un certain nombre d’éléments objectifs, soit à supposer ce que les parties ont voulu, compte -tenu de tous les éléments, objectifs mais aussi subjectifs dont il dispose. La détermination de la sphère contractuelle et de l’espace d’expression corrélatif de la faculté de choix du salarié en situation de modifications du contrat amène donc à constater la part déterminante de l’interprétation du juge en tant que facteur de production de normes juridiques mais avec le risque de signifier une volonté autre que celle des auteurs de l’acte. Le juge donne le sens de la stipulation contractuelle en cause (B). A cet égard, il joue un rôle prédominant que d’aucuns assimilent à celui d’un cocontractant694.
C.Radé, art.préc. « La figure du contrat dans le rapport de travail », p 802 et suiv.
Modifications du contrat de travail et changement des conditions de travail.
V.supra Titre I, Chapitre I, Section 2, §1.
V. F.Favennec-Hery, art.préc. « Le contrôle judiciaire du contrat de travail ».