392 Le droit pour le salarié de rompre unilatéralement le contrat de travail permet d’exercer la liberté de disposer de soi-même et de se détacher du lien de subordination quand il le souhaite. Mais cette liberté, si elle n’a pas de prix, constitue pourtant un risque et un coût pour le salarié : retrouver ou non du travail, ne pas être indemnisé au titre du chômage, sauf motif légitime1000.
Dès lors, une telle liberté est traditionnellement appréciée avec défiance par les tribunaux. Les juges cherchent à avoir l’absolue certitude que la démission du salarié a été donnée en toute connaissance de cause, sans pression de l’employeur destinée à une éviction calculée du droit du licenciement. La construction jurisprudentielle autour de la notion de volonté du salarié dans l’acte de rupture unilatérale1001 s’avère minutieuse, nuancée et très soucieuse des intérêts du salarié qu’elle entend protéger1002.
Ainsi, la volonté du salarié doit-elle être claire, sérieuse et non équivoque (§1). En outre, elle doit être libre et réelle, c’est à dire classiquement exempte de vices du consentement, mais aussi autonome, soustraite à tout pouvoir ou autorité supérieure qui pourrait guider la décision, le choix du salarié de rompre le contrat (§2).
Le dossier du salarié est alors examiné en commission par le Pôle Emploi ( ex-Assedic). Parmi les motifs dits légitimes de démission, on citera la démission donnée pour suivre son conjoint muté….
Ces mêmes exigences se retrouvent, avec quelques nuances, dans la mise en œuvre d’un autre mode de rupture unilatérale du contrat de travail prévu par la loi, à l’initiative du salarié : le départ à la retraite. Celui-ci est une décision de rupture unilatérale laissée au libre choix du salarié, selon les dipositions légales en vigueur (art. L.1237-4 et suiv. du code du travail) . La volonté du salarié de partir en retraite doit être réelle. On peut supposer, contrairement à la démission, que le départ à la retraite doit être « causé » , justifié par l’âge selon les dispositions légales applicables. A défaut, il s’agirait d’une démission obéissant au régime juridique de ce mode de rupture. Toutefois, l’employeur n’a pas le pouvoir d’apprécier a priori les motifs qui poussent le salarié à partir en retraite, ni de soumettre son départ à son accord, dès lors qu’il répond aux conditions légales et que le salarié a demandé la liquidation de sa pension retraite. En tout état de cause, le départ volontaire du salarié pour bénéficier du droit à une pension de vieillesse constitue, comme la démission, une rupture unilatérale de son contrat de travail, qui ne peut résulter que d’une manifestation de volonté claire et non équivoque ( CA Versailles 18/11/94 , RJS 1/95 n°17 ).
Il faut avoir à l’esprit que le salarié démissionnaire est non seulement privé de toute indemnité de rupture, mais aussi du droit aux allocations chômage sauf motifs légitimes.