733 L’essor des prérogatives individuelles du salarié, l’exercice de droits propres dans l’exécution individuelle du travail apparaissent indéniablement de nature à favoriser la capacité objective de décision et d’action du salarié face au pouvoir de l’employeur.L’exercice de ces droits n’est toutefois pas sans limites. Fréquemment, il s’agit de facultés encadrées par la loi, soumises à conditions et accord de l’employeur, plus rarement de véritables prérogatives dépendant de la seule initiative du salarié. En outre, certaines d’entre elles sont intimement liées aux politiques du travail et donc soumises à modifications incessantes, voire abrogations1868.
734 L’affermissement progressif des droits fondamentaux et libertés de la personne du salarié au temps et au lieu de travail, même si on peut estimer raisonnablement que toutes les potentialités de ce mouvement n’ont pas été encore exploitées au sein des relations du travail, constitue un autre facteur d’émancipation de la volonté du salarié face au pouvoir. La reconnaissance de la personne humaine du salarié pose des bornes incontestables à la soumission et au pouvoir. Plus largement, celle-ci contribue à donner au salarié, au temps et lieu de travail, une autonomie plus grande, pourvu que ses manifestations soient raisonnables et ne remettent pas en cause le bon fonctionnement de l’entreprise.
Dans un même temps, l’apparition sur la scène du droit du travail du concept de dignité de la personne humaine, tend en quelque sorte à transcender la relation de travail. Reconnaissant l’humanité de chaque personne comme valeur universelle et intangible, ce concept dépasse à l’évidence la condition de travailleur assujetti au pouvoir. Encore faut-il que l’ordre juridique ancre objectivement ce concept à l’intérieur de règles ou de droits disponibles aux salariés.
735 Reste que ces prérogatives et droits peuvent être désormais utilement invoqués par le salarié à l’encontre du pouvoir. Dès lors, l’espace d’émancipation de la volonté du salarié apparaît grandissant, même s’il est encore modeste. L’acte volontaire du salarié sur le terrain du pouvoir n’est plus aujourd’hui une exception remarquable mais une tendance en devenir.
Il convient maintenant de vérifier si la volonté individuelle du salarié trouve d’autres espaces d’expression ou des facultés de choix et d’action plus larges dans l’exercice même des droits collectifs.
On songe, par exemple, au dispositif des heures choisies qui a été abrogé par la loi du 20 août 2008 portant réforme du temps de travail.