II/ L’erreur dans le cadre de la conduite automobile

Nous avons pu observer lors du précédent chapitre que l’activité de conduite est une activité complexe qui nécessite en permanence des ressources attentionnelles de la part du conducteur pour mener correctement son activité. Dans ce contexte, la production d’une erreur, minime ou non, récupérable ou non, est loin d’être un cas isolé. A chaque instant un conducteur est susceptible d’en commettre une. Avec un objectif de prédiction et de prévention, la prise en compte de l’erreur a pour objectif d’enrichir nos connaissances sur les interactions entre l’homme et son environnement en mettant l’accent sur les interactions entre le conducteur et son activité de conduite. Lors d’un accident par exemple, l’analyse de l’erreur permettra de déterminer la part de responsabilité qui incombe à l’homme et celle qui incombe à un facteur extérieur (Van Elslande et al. 1997). Il s’agit ainsi d’identifier les stratégies adoptées par le conducteur ou au contraire l’absence de stratégies. En effet, l’erreur fournit des informations sur les mécanismes inconscients (les biais cognitifs, les défauts de raisonnement, etc.) et apporte des éléments sur les modalités d’apprentissage.

Nous chercherons ainsi à déterminer les sous-tâches problématiques pour le jeune conducteur novice étant donné que chacune des sous-tâches qui composent l’activité de conduite est une source potentielle d’erreur. Notons, toutefois que certaines erreurs sont sans conséquences et/ou dans la plupart des cas récupérables : la coordination des sous-tâches de l’activité de conduite permettant de les minimiser ou de les récupérer par l’action d’une autre sous-tâche. Ces erreurs n’empêchent alors pas le conducteur d’effectuer son déplacement et sont considérées comme invisibles car elles sont repérées et corrigées en cours d’action (Van Elslande et al. 1997). Malgré cela, l’erreur peut dans certain cas, avoir des conséquences beaucoup plus importantes en termes de sécurité routière.

Dans ce contexte, deux théories nous paraissent incontournables. Dans un premier temps, nous reviendrons sur le modèle Skill-Rules-Knowledge (SRK) de Rasmussen (1983, 1986) que nous avons déjà introduit lors du paragraphe consacré à la prise de décision (cf.1-2-4). Nous le présenterons cette fois-ci pour expliquer l’évolution du degré de familiarité avec la tâche à accomplir. L’intérêt de ce modèle est qu’il explicite l’action des mécanismes inconscients en fonction de l’expérience. Ainsi, selon ce modèle, l’erreur proviendrait d’une défaillance de l’un des niveaux de familiarité. Notre attention portera également sur le modèle Generic Error Modelling System (GEMS) de Reason (1993) car il fournit une structure hiérarchique du fonctionnement cognitif basé sur le modèle SRK de Rasmussen (1983, 1986) et explique l’origine des erreurs.