3-3/Compétences attentionnelles

Une des premières compétences à acquérir en matière de conduite automobile est la maitrise du véhicule. Cela suppose que le conducteur ait développé des stratégies pour répartir ses ressources attentionnelles entre les sources d’informations de l’environnement routier et la gestion des sous-tâches sensori-motrices. Durant les premiers mois de pratique, les conducteurs novices manquent de compétences et le contrôle du véhicule est encore approximatif. Aucune action (actions sur les pédales, changement de vitesse, maintien de la trajectoire, etc.) ne peut être effectuée sans un contrôle conscient. L’exécution des sous-tâches sensori-motrices n’est pas automatisée et une importante quantité de ressources attentionnelles lui est accordée. A ce titre, nous reviendrons sur l’exemple précédemment cité : si un changement de vitesse est effectué de manière automatique par un conducteur expérimenté, un conducteur novice, en revanche accompagnera ce geste d’un mouvement de regard en direction du levier de vitesse. Ceci traduit ainsi l’attention nécessaire qu’il doit accordée à la réalisation de cette action. Par ailleurs, les conducteurs novices ont des difficultés à juger et à apprécier automatiquement la vitesse à laquelle ils roulent. A cet égard, Lansdown (2002) a étudié sur simulateur de conduite le comportement visuel de 2 groupes de conducteurs (des novices et des expérimentés) et a montré que les conducteurs novices passaient plus de temps à surveiller le compteur de vitesse que les conducteurs expérimentés.

Ce manque de compétences se traduit en termes de non développement d’automatismes, les conducteurs novices n’ont pas encore appris à optimiser la répartition de leurs ressources attentionnelles. Chez un conducteur novice, les ressources attentionnelles sont fortement monopolisées par les sous-tâches sensori-motrices au détriment des sous-tâches cognitives. Les traitements cognitifs qui découlent de ces dernières tels que traiter des informations ou prendre une décision sont amoindris et par conséquent de moindres performances de conduite sont relevées. L’acquisition des automatismes est essentielle puisque c’est par son intermédiaire que les ressources pour les sous-tâches cognitives sont libérées.

Par ailleurs, les conducteurs doivent apprendre à diriger leur attention vers les informations pertinentes. Cela s’acquiert également avec la pratique dans la mesure où l’expérience du conducteur permet une meilleure répartition de l’attention entre les sources d’informations (Drummond, 1989). La distribution de l’attention sera effectuée selon les priorités établies par les modèles mentaux du conducteur. L’avantage de ces modèles mentaux est particulièrement visible en situations complexes de conduite. Lorsque le conducteur doit gérer une quantité trop importante d’informations et qu’il lui est impossible de les intégrer entièrement. Dans ce cas, il tentera de compenser les informations non traitées en se basant sur son modèle mental afin de procéder à des anticipations. Ce n’est qu’après une expérience estimée entre 5000 et 10000 kilomètres (Summala, 2000) que s’opère un changement significatif dans les compétences et que l’on peut considérer un conducteur comme expérimenté. Dès cet instant, la conduite requiert moins de ressources, moins d’effort, est davantage sécuritaire et est ressentie comme une activité facile à réaliser. Cela correspond à la définition de l’automatisation du comportement humain (Schneider & Schiffrin, 1977).