2.4.1. Dégradation des traits et détection d’erreurs de prononciation

La perceptibilité de différents traits phonologiques a été testée dans des tâches où il s’agit de détecter des erreurs de prononciation dans des mots entendus. L’avantage de cette technique est de tester la sensibilité aux traits dans un contexte écologique, les participants écoutant par exemple un enregistrement de la lecture d’un texte de Lewis Carroll dans lequel certains phonèmes ont été remplacés par d’autres (Cole, 1973). Dans cette étude, l’auteur faisait varier le nombre de traits modifiés pour chaque phonème incorrect. Les auditeurs se sont montrés sensibles à ces unités, puisqu’ils ont détecté 80% des erreurs reposant sur le changement de quatre traits, 70% des erreurs portant sur deux traits et seulement 30% des erreurs impliquant un seul trait. Ce résultat a été répliqué par Marslen-Wilson et Welsh (1978), qui relèvent également un moins bon taux de détection des erreurs (33%) lorsqu’elles n’impliquent qu’un trait, plutôt que trois traits (93%). Bien que la quantité de changement phonémique soit identique, les erreurs de prononciation impliquant peu de traits seraient donc mal perçues. Lorsqu’ils devaient répéter ce qu’ils entendaient (tâche de shadowing), les participants de l’expérience de Marslen-Wilson et Welsh produisaient la version correcte des mots comportant pourtant une erreur, dans 74% des cas si un seul trait était modifié et dans 24% des cas si l’erreur portait sur trois traits. Ces phénomènes de restauration spontanée de l’information dégradée suggèrent que l’accès lexical est possible à partir d’un stimulus imparfait, mais la difficulté de cet accès dépend non seulement des phonèmes corrects mais aussi du nombre de traits respectés.