4.2.1.2. Hiérarchie des traits et perception de parole chez des patients

Dans l’étude conduite par Gow et Caplan (1996) et relatée précédemment, la discrimination de phonèmes s’est avérée plus facilement réalisée sur la base du lieu d’articulation que sur celle du voisement chez les contrôles. Cette différence disparaissait, et s’inversait parfois chez certains patients atteints de lésions cérébrales gauches. Dans cette tâche perceptive, le lieu présente donc un avantage par rapport au voisement, mais cet avantage semble fragile, vulnérable à la pathologie. Lorsque les auteurs comparent les performances pour le lieu et le voisement d’une part, et pour le mode et la sonorité d’autre part, un avantage apparaît seulement chez les patients, au profit des traits dits articulator-free (mode et sonorité). Ils soulignent la cohérence de ce résultat avec les modèles établissant une distinction forte entre les traits articulator-free et articulator-bound : la discrimination des traits de la première catégorie implique la localisation d’indices spectraux importants pour le mode, et qui serviront ensuite de base à la discrimination des traits de la deuxième catégorie, plus vulnérables aux imperfections du signal. Aussi, dans l’ensemble, cette étude montre que le traitement des traits de mode d’articulation est privilégié, résiste bien à la pathologie, alors que l’avantage du lieu sur le voisement est vulnérable. Cela suggère que les traits de mode occupent une place élevée dans la hiérarchie des traits phonologiques et, d’après Gow et Caplan, leur discrimination repose moins que les autres traits sur l’intégration d’une grande quantité d’informations.