Chapitre 2 : Problèmatique et hypothèses générales

Questions centrales de la thèse.

Dans le cadre général des travaux sur le rôle des connaissances phonologiques dans le processus de reconnaissance de mot écrit, l’objectif de notre thèse est de contribuer à mieux décrire la nature du code impliqué et de comprendre les mécanismes par lesquels les connaissances phonologiques interviennent en lecture. La recherche que nous présentons s’articule pour cela autour de quelques idées majeures, que nous testons dans une série de 12 expériences.

Nous voudrions avant tout défendre l’idée selon laquelle les premières étapes du processus de reconnaissance de mot écrit impliquent un code phonologique suffisamment fin pour être décrit en termes de traits phonologiques. Dans la partie théorique, nous avons présenté une proposition de modèle de lecture articulant deux mécanismes basés sur les traits phonologiques et l’orientation de nos hypothèses sera guidée par les contraintes de ce modèle. Concrètement, il s’agira de montrer que le partage de traits phonologiques par les différentes consonnes d’un mot écrit détermine la vitesse d’identification des lettres de ce mot. Avant la réalisation de notre travail de thèse, nous avions conduit des expériences étudiant ces effets chez les adultes et les enfants normo-lecteurs. Nous avons résumé ces données dans la partie théorique : le partage de traits phonologiques par les consonnes d’un stimulus écrit CVCV exerce des effets différents sur l’identification de la première et de la deuxième consonne ; ces effets sont toutefois différents chez les jeunes lecteurs avant le CE2 et les lecteurs plus âgés. Nous en avons conclu que les mécanismes phonologiques impliqués en lecture évoluent au cours de la scolarité en école primaire. Notamment, les effets explicables par l’établissement de relations d’inhibition latérale, parmi les connaissances phonologiques, ne s’observent qu’à partir du CE2. Les perturbations de ces mécanismes seront étudiées dans notre thèse auprès d’enfants dyslexiques, présentant ou non d’importants troubles phonologiques.

Le prolongement de cette réflexion sur le rôle des traits phonologiques en lecture consistera à mieux connaître le décours temporel des deux mécanismes phonologiques proposés dans le modèle, et à évaluer le rôle de la présence simultanée de plusieurs syllabes écrites sur l’engagement de ces mécanismes. La notion de catégorie de traits sera ensuite intégrée. Nous avons rapproché et présenté des éléments de la littérature scientifique au sujet de la pertinence cognitive de cette typologie des traits dans diverses activités langagières. Nous aimerions compléter en apportant des indices de cette organisation catégorielle des traits dans des situations de lecture. Ici encore, la question sera traitée chez de jeunes adultes bons lecteurs, des enfants normo-lecteurs et des enfants dyslexiques.

La dernière idée centrale dans cette thèse concerne l’organisation hiérarchique de ces catégories de traits. Pour cela, nous interrogeons cette hiérarchie tant dans des expériences de lecture que dans des épreuves métalinguistiques, toujours auprès d’adultes, d’enfants normo-lecteurs et d’enfants dyslexiques.