a) Le mode d’articulation 

Le mode est représenté dans l’expérience par les traits occlusif et fricatif. D’une manière générale, que ce soit dans la version visuelle ou dans la version audio-visuelle, le partage du trait occlusif est choisi plus fréquemment comme critère d’appariement que tout autre trait proposé en concurrence (Binomial < .0001, p = .50), et il en est de même pour le partage du trait fricatif (Binomial < .0001, p = .50), comme le montre la Figure 22. Le test de Wilcoxon ne montre pas de différence entre les pourcentages de choix de mode dans les cas où il est représenté par le trait occlusif ou fricatif, T = -0.03, p = .97.

Des tests binomiaux réalisés indépendamment par bloc, et pour chacune des versions, révèlent que l’attraction pour la ressemblance de mode est plus marquée que celle qu’exerce le partage du lieu (bloc Mode-Lieu, Binomial < .0001, p = .50) ou du voisement (bloc Mode-Voisement, Binomial < .0001, p = .50), et cette préférence pour le mode est plus marquée en concurrence avec le voisement qu’en concurrence avec le lieu, T = -2.30, p = .02 (Figure 23). Pour affiner l’analyse, les pourcentages de choix orientés par le partage du trait occlusif, d’une part, et fricatif, d’autre part, sont comparés séparément au pourcentage de choix orientés par le partage du lieu et au pourcentage de choix orientés par le partage du voisement. La Figure 23 montre que le pourcentage de réponses guidées par le partage du trait occlusif est significativement plus élevé que le pourcentage de réponses guidées par le partage du lieu, ou le partage du voisement, (Binomial < .0001, p =.50, dans les deux cas). Il en est de même pour le trait fricatif (Binomial < .0001, p =.50, dans les deux cas). De plus, les tests de Wilcoxon ne font ressortir aucune différence significative entre les pourcentages de réponses orientées par le partage des traits occlusif et fricatif, que ce soit en opposition à une ressemblance de lieu ou de voisement. Ces indices plaident en faveur d’une homogénéité des réponses guidées par la ressemblance de mode, que ce type de trait soit représenté par des couples de consonnes occlusives ou fricatives.

Figure 22 : Pourcentages de choix de ressemblance de mode pour apparier, quand le mode est représenté par le trait occlusif ou fricatif. Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages qui se différencient du hasard. (Version visuelle)
Figure 22 : Pourcentages de choix de ressemblance de mode pour apparier, quand le mode est représenté par le trait occlusif ou fricatif. Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages qui se différencient du hasard. (Version visuelle)
Figure 23 : Pourcentages de choix de ressemblance de mode comme critère d’appariement quand le mode est représenté par le trait occlusif ou fricatif, quand la concurrence vient d’une ressemblance de lieu (à gauche) ou de voisement (à droite). Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages qui se différencient du hasard. (Version visuelle)
Figure 23 : Pourcentages de choix de ressemblance de mode comme critère d’appariement quand le mode est représenté par le trait occlusif ou fricatif, quand la concurrence vient d’une ressemblance de lieu (à gauche) ou de voisement (à droite). Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages qui se différencient du hasard. (Version visuelle)

La Figure 24 montre que la préférence pour la ressemblance de mode plutôt que de voisement est significative quand la ressemblance concurrente est le partage du trait sourd (Binomial < .0001, p = .50) ou du trait sonore (Binomial < .0001, p = .50), cette préférence pour le mode étant toutefois moins marquée quand elle s’oppose à une ressemblance sur le trait sonore plutôt que sourd, T = -2.50, p = .0123 dans la version visuelle, et T = -2.33, p = .0230 dans la version audio-visuelle. Ce point, qui suggère une attraction plus forte par le partage du trait sonore plutôt que sourd, sera repris dans la discussion sur la faible homogénéité des traits sourd et sonore pour représenter la catégorie voisement.

Lorsqu’elle est en concurrence avec une ressemblance de lieu, la ressemblance de mode est par contre préférée, que la ressemblance en concurrence permette de rapprocher deux consonnes labiales (Binomial < .0001, p = .50), deux dentales (Binomial < .0001, p = .50) ou deux vélo-palatales, (Binomial < .0001, p = .50), et aucune différence n’apparaît entre ces trois conditions (Figure 25), aussi bien dans la version visuelle que dans la version audio-visuelle.

Figure 24 : Pourcentages de choix de ressemblance de mode pour apparier quand ce trait est en concurrence avec la ressemblance de voisement représentée par les traits sourd et sonore. Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages différents du hasard. (Version visuelle)
Figure 24 : Pourcentages de choix de ressemblance de mode pour apparier quand ce trait est en concurrence avec la ressemblance de voisement représentée par les traits sourd et sonore. Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages différents du hasard. (Version visuelle)
Figure 25: Pourcentages de choix de ressemblance de mode pour apparier quand ce trait est en concurrence avec la ressemblance de lieu représentée par le trait labial, dental ou vélo-palatal. Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages différents du hasard. (Version visuelle)
Figure 25: Pourcentages de choix de ressemblance de mode pour apparier quand ce trait est en concurrence avec la ressemblance de lieu représentée par le trait labial, dental ou vélo-palatal. Les barres d’erreurs représentent les intervalles de confiance à 95%. Les étoiles représentent les pourcentages différents du hasard. (Version visuelle)