1.5.4. Dyslexiques avec trouble phonologique : pas de sensibilité au partage de voisement

Les résultats ne montrent aucun effet de la ressemblance de voisement, ni sur C1 ni sur C2, que ce soit dans le sens d’une gêne ou d’une facilitation. Les enfants dyslexiques avec troubles phonologiques ne semblent donc pas présenter de sensibilité à la ressemblance de voisement entre C1 et C2. Ces effets peuvent être interprétés d’une part en terme d’absence d’organisation des connaissances phonémiques selon des relations d’inhibition latérale : les enfants dyslexiques avec troubles phonologiques, comme les dyslexiques de surface, ne paraissent pas disposer de connaissances sur les phonèmes organisées par de telles relations déterminées par la ressemblance de voisement. Mais dans leur cas, en plus, les relations phonologiques activatrices bi-directionnelles entre phonèmes et traits phonologiques ne semblent pas intervenir. En cela, les résultats des enfants dyslexiques avec troubles phonologiques diffèrent de ceux des enfants dyslexiques sans troubles phonologiques. Si le diagnostic différentiel du type de dyslexie n’avait pas été établi, il n’aurait pas été possible de découvrir cette différence qualitative concernant les mécanismes phonologiques chez ces deux types de patients. Ainsi, non seulement les relations intra-niveau (d’inhibition latérale) mais également les relations inter-niveaux (activatrices) ne seraient pas opérationnelles chez les enfants dyslexiques avec troubles phonologiques. Par conséquent, les troubles phonologiques qui se manifestent en lecture chez ces enfants dyslexiques peuvent s’expliquer par une anomalie d’organisation à un niveau infra-phonémique, comme nous en avions fait l’hypothèse. Les enfants dyslexiques avec troubles phonologiques ont donc une sensibilité au partage de voisement différente de celle des enfants dyslexiques sans trouble phonologique : elle semble chez eux inexistante. L’un des prolongements de cette recherche sera de vérifier si les enfants dyslexiques présentent tout de même une sensibilité au partage d’autres catégories de traits, notamment ceux de mode d’articulation. Les résultats présentés ici apportent en tout cas un argument supplémentaire à la pertinence de la distinction entre les types de dyslexie chez l’enfant.