4.4.1.1. Un modèle modulaire et modulable.

Le contenu des séances constitue autant de modules dont les thématiques sont proches de celles retenues par le programme du SPIP du Val d’Oise choisi à titre d’exemple et de celles préconisées par le rapport Coutanceau.

Voici un tableau comparatif des thématiques des trois structures :

Tableau 29 – Contenus thématiques des dix séances de groupe.
VIRAGE Val d’Oise 69 Rapport Coutanceau 70
Exposé des objectifs et du cadre
Présentation de chacun
Historique des faits et attentes des participants Présentation
Historique des faits
Attentes, motivations
La violence et l’agressivité Définition de la violence, représentations sociales et culturelles Définition commune de la violence,
La spécificité des violences conjugales
Représentations sociales et culturelles de la différence des genres
La violence Le couple : leur relation amoureuse passée et actuelle. La rencontre avec leur compagne et histoire de leur relation amoureuse
Projection(s) sur leur partenaire.
Signes précurseurs de la violence - La paternité, la place de l’enfant. Place du père et de la mère, autorité parentale
Le premier enfant
Quelles valeurs souhaitent-ils transmettre à leur(s) enfant(s) ?
La femme Comment éviter la violence ? Violence verbale, élément déclencheur du passage à l’acte, les stratégies d’évitement, verbalisation des émotions, contrôle de soi.
Argumentation, compromis, réactions qui peuvent se substituer à la violence.
La paternité L’action de la Loi Comment l’action de justice a-t-elle été perçue ? Le sens et la place de la loi, le vécu de la victime, le regard des autres, la culpabilité.
La loi L’estime de soi, la reconstruction L’estime de soi, la reconstruction, l’avenir, le ressenti par rapport au groupe.
La communication dans le couple    
Le couple    
Bilan et perspectives d’aveni    

Source : construit par l’auteur.

Ces modules comportent un rythme de séances. La première séance est une séance essentielle par son accroche et la présentation des autres séances. La troisième séance met en évidence la cohérence du groupe et le début de son travail élaboratif. La cinquième séance élargit le travail de réflexion à d’autres champs que la violence conjugale. Les septième, huitième et neuvième séances font place à un travail des participants sur eux-mêmes. La dernière séance reprend l’ensemble du travail élaboratif.

Toutes ces séances répondent à des sous-objectifs propres au dispositif VIRAGE :

Tableau 30 – Les objectifs et sous-objectifs des groupes VIRAGE.
Objectifs Sous-objectifs
- Permettre la reconnaissance des faits de violence et le développement de la responsabilisation. - Exposer le déroulement des faits de violences conjugales
- Repérer la différence entre violence, conflit et agressivité
- Reconnaître les signes précurseurs de sa violence
- Aborder le sens de l’interdit de violence et le sens de la loi.
- Mieux connaître les rouages judiciaires et ses obligations
- Prendre conscience de ses propres représentations. - Réfléchir à sa propre représentation de la violence.
- Changer ses représentations de la femme
- Réfléchir à sa représentation du couple, à son rôle de père et d’époux.
- Favoriser l’expression et la gestion d’une problématique interne liée au passé et aux relations parentales. - Permettre à chaque participant de parler de ses relations avec ses parents, de son éducation, des évènements marquants.
Développer de nouveaux modes de communication avec le (la) conjoint(e). - Développer avec sa conjointe un mode de communication non violent, basé sur le respect et le dialogue.
- Formuler des désirs ou des projets sur l’avenir.
Objectif transversal à toutes les séances : Faciliter une reprise de l’expression de soi et de l’estime de soi. Par la technique du tour de table, permettre à chacun d’exprimer ses difficultés et ses solutions.

Source : Document interne VIRAGE 2004

  • Un modèle cohérent : En effet, la cohérence est donnée par l’objectif du processus qui est le passage d’un état A à un état B, passage intentionnel.

Comment définir l’état A ?

  • Etat A : C’est l’état constaté à la première séance de groupe pour la plupart des participants : c’est-à-dire un individu en état émotionnel fort (colère, tristesse…), se trouvant dans une situation de polyruptures, mettant en œuvre des mécanismes de défense liée à la minimisation de la réalité, à la dénégation voire au déni, et ayant un vécu d’humiliation et de non-maîtrise.

L’état B à atteindre à la fin de la dixième séance serait celui-ci :

  • Etat B : Individu ayant davantage la maîtrise de ses émotions, conscient des signes précurseurs de la violence, ayant réfléchi sur les évènements et les ruptures qu’il a provoquées, sans vision déformante ou déniante de la réalité, développant de nouvelles possibilités d’expression, et ayant l’intention de reprendre des projets.

Le passage de l’état A à l’état B71 est envisagé grâce à une pédagogie basée sur l’interaction des animateurs avec le groupe et au sein du groupe lui-même. Comment qualifier cette interaction ? Elle doit être complémentaire afin de faciliter l’élaboration des participants. Basée sur l’interaction, ce sera aussi une pédagogie active, du faire et non pas seulement du dire. De même, l’écoute des animateurs sera une écoute active reposant sur la reformulation, l’approfondissement de questions.

  • Un modèle souple et évolutif : il est évident que le programme indiqué ci-dessus n’est pas un programme fermé. Il est susceptible de laisser place à une souplesse, voire une improvisation demandée par l’expression des participants.
  • Un modèle qui permet une évaluation des effets : la technique qui nous semble la plus appropriée mais qui n’a pas été appliquée à ce jour, faute de réflexion collective et de temps, est la mesure Avant/Après que nous développerons dans le programme de prévention au chapitre de l’évaluation..

Il conviendrait de compléter le dispositif d’évaluation par un suivi sur une période d’au moins deux ans. Ainsi, ce suivi pourrait consister en une série d’entretiens de plus en plus espacés, puis de simples contacts téléphoniques. Faute de moyens, nous n’avons pu réaliser un tel suivi.

Par contre, nous72 avons tenté à la fin de deux groupes de joindre par téléphone les conjointes des participants afin d’avoir leur opinion sur les changements de leur conjoint. Ayant eu peu de réponses par difficulté de joindre ces conjointes, ce mode d’évaluation nous a paru ardu à mettre en place, même s’il s’avérait intéressant a priori. Cependant, ce mode d’évaluation sera tenté lors de prochains groupes.

Notes
69.

Les groupes ne comportent que sept séances.

70.

Extrait de la page 15 du rapport. Le schéma choisi par le rapport ne comporte aussi que sept séances.

71.

Il s’agit ici d’objectifs. Nous verrons plus loin dans notre propos sur l’évaluation des effets sur sept participants que la réalité améne à beaucoup de modestie.

72.

Le nous représente des permanentes de SOS VIOLENCES conjugales et non pas les intervenants(es) du dispositif.