4.5.2.2. La mesure de la récidive.

Quant à la récidive des 54 participants, elle a été mesurée à partir des dossiers informatisés du Parquet de Saint-Etienne. Cette évaluation contient plusieurs défauts ou manques :

Ces précautions étant prises, nous notons un nombre de dix réitérations sur 54 dossiers soit un pourcentage de près de 20 % (Exactement 18,5 %). Ce pourcentage peut paraître un taux relativement faible comparé au seul pourcentage connu de 45 % concernant comme indiqué plus haut l’ensemble des violences aux personnes.

A quoi est dû ce pourcentage de 20% ?

Est-ce un effet de la sanction émanant du passage devant le tribunal, dans quelle proportion ? Cela est difficile à évaluer.

Est-ce en partie dû aux effets induits par les séances de groupe ?

Pour envisager de répondre même partiellement à ces questions, il conviendrait de comparer par exemple le taux de récidive entre deux populations équivalentes de mis en cause, l’une de non-participants, l’autre de participants. Malgré nos demandes répétées, nous n’avons pas pu obtenir de la part du Parquet de Saint-Etienne, de données sur la récidive d’une population de mis en cause pour faits de violences conjugales n’ayant pas participé à un groupe.

Est-ce que ces dix récidivistes présentent des caractéristiques différentes par rapport à la population des 54 participants ?

Non, nous retrouvons les mêmes caractéristiques d’âge, de catégorie socioprofessionnelle.

Tableau 34 – Caractéristiques de la récidive des dix personnes parmi les 54 ayant participé aux séances de groupes.
1 Prénoms des 10 participants ayant réitéré Date des faits déclarés de violences Dates de Réitération au 30 juin 2008 Délai entre fait de violences initial et réitération au 30 juin 2008
2 Ahmed Janv. 06 Mai 2006 4 mois
3 Alain Nov. 02 Oct. 03 13 mois
4 Albuquerque Nov. 02 Nov. 03 12 mois
5 Assak Fév. 02 Avril 04 26 mois
6 Bekri SME Juin 03 Mars 05 21 mois
7 Cengiz Sept. 02 Déc. 03 15 mois
8 Claude (classement sous conditions) Juin 02 Mars 04 21 mois
9 David Aout 02 Mars 06 43 mois
10 Farid Oct. 01 Nov. 04 37 mois
11 Gérard Mai 06 Aout 06 3 mois

Source : construit par l’auteur.

Sur les dix récidivistes recensés, deux participants font l’objet d’une obligation judiciaire à participer au dispositif. Cela correspond à un pourcentage similaire à celui constaté plus haut (soit 74%).

Le délai entre le fait initial et la réitération va de 3 mois à 43 mois soit un délai moyen de 19,5 mois. Cela nous renseigne sur la temporalité du suivi post-sentenciel à mettre en place : le suivi pour éviter la réitération doit être envisagé sur une période d’au moins deux à trois ans. Nous développerons ce point important dans les jalons pour la prévention.

Nous pouvons comparer notre recherche à celle menée par Barré et Pottier (2003) qui ont calculé le taux de réoccurrence76 à 18 mois pour une population générale77 de mis en cause interpellés en 1996. Ce taux de réoccurrence est de 34 %. Ils constatent que la courbe de réoccurrence connaît une accélération la plus forte dans les six premiers mois. L’âge est un facteur discriminant. Une personne de 18 ans a deux fois plus de probabilité d’être à nouveau mise en cause qu’une personne de trente ans. Le nombre d’antécédents augmente aussi le taux de réoccurrence. Cette étude n’a pas pris en compte de façon spécifique les situations de violences conjugales.

Notes
76.

Le terme de réoccurence signifie « le fait de se produire à nouveau » (op. cit. p . 146).

77.

Cette population est de 528 personnes dont les délits concernent tous les secteurs de la délinquance : vols, agressions, atteintes aux personnes comme les atteintes aux bien, consommation de substances etc.