4.2.7. Questions diverses.

Dans ce chapitre des perspectives, nous voudrions aborder deux questions d’avenir : un substitut du Procureur de Saint-Etienne a posé la question d’un bilan individuel des participants aux groupes fourni par les animateurs du dispositif. La question posée par ce magistrat est la suivante : « Pouvez-vous dire quelque chose des effets du groupe sur ce participant, première question ? ». La deuxième question porterait sur la dangerosité et le risque de réitération.

Vues de notre côté, ces questions pourraient être reformulées ainsi : tout en maintenant une confidentialité sur le contenu des groupes, pourrait-on avec l’accord et la signature de chaque participant proposer les éléments d’un bilan individuel transmis au Procureur ? Ce bilan porterait sur le bénéfice de chacun par rapport au groupe, sur ses perspectives. Ce bilan serait réalisé à partir d’une grille rempli par chaque participant. Dans la mesure où un tel bilan serait cosigné par le participant et les animateurs, cette demande nous paraîtrait acceptable.

A ce jour, aucune demande plus précise n’a été faite en ce sens. Nous pensons cependant qu’elle devrait surgir un jour prochain.

Quant à la question de la prévisibilité de la dangerosité, si elle est une question importante notamment pour l’entourage des auteurs de violences, elle n’a de sens que pour les sujets relevant de la deuxième population indiquée plus haut. Mais là, encore, nous pensons que des signalements ou des bilans réalisés sans l’accord des sujets seraient, selon notre position déontologique, impossibles. Ce serait se mettre dans une position d’auxiliaire de Justice. Par ailleurs les notions même de dangerosité ou de prédiction du risque nous semblent à bien des égards trop suspectes et trop peu scientifiques. Nous voyons dans cette demande l’effet du contexte de la société du risque dont nous avons analysé plus haut les présupposés.

La notion de violence psychologique contenue dans la loi de février 2010 nous interroge. Elle pose question non pas dans sa réalité – combien de victimes décrivent cette emprise, cette manipulation quotidienne – mais plutôt comment sera-t-elle mise en évidence : la Police va-t-elle recruter des psychologues pour montrer les preuves de cette forme de violence ? Comment parfois distinguer la forme de conflits inhérents à la vie de couple de ce nouveau délit ? L’Etat entre-t-il plus intimement dans la vie privée, aidé des psychologues, même s’ils font preuve de réserve déontologique ?

Cette notion de violence psychologique est à la fois simple et complexe, simple car pour nous psychologues le curseur de la limite est lié au ressenti de la victime et aussi à des éléments de psychopathologie, complexe car l’appréciation de cette violence peut dépendre fortement de l’identité de celui ou celle qui l’évaluera.

Enfin, nous pourrions faire l’hypothèse que cette notion, en définitive relativement floue actuellement, pourra être plaidée autant par l’agresseur que par la victime. N’allons-nous pas assister à une augmentation des plaintes des agresseurs au nom de la violence psychologique ?

De nouvelles expériences apparaissent, telle celle relatée récemment102 portant sur le séjour de quinze jours dans ce centre, d’hommes ayant agi brutalement sur leurs conjointes. Ce mode de prise en compte semble prometteur car selon le directeur de l’association : « l’an dernier, 80 % des femmes interrogées ont déclaré que leur conjoint avait profondément changé – en bien – suite aux quinze jours d’éloignement. ».

Notes
102.

Un article paru dans le journal La Croix en date du 22 février 2010 : reportage dans un centre pour conjoints violents à Douai (Nord).