Notre intérêt pour le Pays Roannais et le Pays Beaujolais tient à trois raisons. D’abord, leurs interdépendances historiques, économiques et culturelles très anciennes sont un exemple type de bassins de vie imbriqués, qui pourrait, dans l’esprit de la LOADDT et des dispositifs rhônalpins, justifier une recomposition territoriale se libérant des frontières institutionnelles. Ensuite, ils donnent à voir comment s’articulent le rural et l’urbain dans deux espaces infra régionaux comprenant chacun une communauté d’agglomération et plusieurs communautés de communes rurales dans l’orbite d’une métropole nationale. Enfin, la présence de leaders politiques d’envergure nationale illustre le poids des notables dans la division du travail politique dans ces deux territoires saturés d’enjeux de pouvoir.
Le Pays Beaujolais concerne 185 294 habitants, soit 12% de la population totale du département du Rhône qui en compte 1 578 869 (recensement de 1999), répartis dans 12 communautés de communes et une communauté d’agglomération qui regroupent 137 communes.
Le Pays Roannais compte 154 000 habitants dans 11 communautés de communes, une communauté d’agglomération et une commune isolée, Saint Alban les eaux, soit 118 communes sur les 327 du département de la Loire qui compte 728 524 habitants.
Ces deux Contrats de Développement de Pays en Rhône-Alpes limitrophes sont issus de la fusion de trois anciens CGD. Le CGD Monts du Beaujolais et du Lyonnais à cheval sur les Départements du Rhône et de la Loire a été divisé en deux parties. Ses communautés de communes rhodaniennes ont rejoint le CGD Beaujolais/Plaine de Saône pour devenir le Pays Beaujolais (ou Contrat de Développement de Pays en Rhône-Alpes du Beaujolais) quand ses composantes ligériennes ont gagné le CGD du Roannais pour constituer le Pays Roannais (ou Contrat de Développement de Pays en Rhône-Alpes du Roannais).
Si dans ce dernier, la structure intercommunale n’a pas changé dans le cours du Contrat de Pays, dans le Beaujolais, la communauté de communes de l’agglomération de Villefranche sur Saône ayant franchi le seuil des 50 000 habitants25, est devenue la Communauté d’agglomération de Villefranche sur Saône. Elle prépare son prochain contrat d’agglomération qui devra s’articuler avec le CDPRA du Beaujolais signé avec la Région et l’État le 5 mars 2004 pour un montant de 14 millions d’euros. C’est par convention entre les 13 EPCI que le portage de l’animation du Pays a été confié en 2003 à ce qui était encore la communauté de communes de l’agglomération de Villefranche sur Saône. Dans la perspective de la refonte de l’architecture institutionnelle locale, cette modalité de portage évolue vers la création d’un syndicat mixte.
Le contrat d’agglomération du Grand Roanne a été intégré dans le CDPRA du Roannais, signé le 21 avril 2006 avec le syndicat mixte « Roannais Pays de Rhône-Alpes », pour un montant total de 14,5 millions d’euros.
En ce qui concerne la stratégie de développement territorial, le Pays Beaujolais se structure pour anticiper l’extension de l’agglomération lyonnaise vers Mâcon (Saône et Loire). Il crée les instruments institutionnels (Schéma de Cohérence Territoriale, communauté d’agglomération, partenariat avec les communes de l’Ain, Contrat Territorial Emploi Formation du Beaujolais élargi) qui lui permettront de peser dans cette dynamique politico économique, sans se faire avaler par le Grand Lyon. Le territoire du Pays Beaujolais dispose de réserves foncières le long des axes autoroutiers A6 et A 89 en construction, qui sont des ressources essentielles dans le jeu en cours.
Pour le Pays Roannais, la donne est différente. Ce groupement territorial cherche au contraire à enrayer son déclin lié aux restructurations dont est l’objet le bassin industriel roannais. Les manufactures du textile et l’industrie militaire sont en crise. S’il mobilise les mêmes instruments que le Pays Beaujolais, l’État et les collectivités territoriales multiplient les dispositifs sectoriels et transversaux pour redynamiser le bassin industriel. Tous cherchent à réorienter le tissu économique vers des activités de service, comme les télécommunications ou la logistique.
Après cette rapide présentation des Pays Roannais et Beaujolais sur laquelle nous reviendrons plus en détail au fil de notre développement, vient le temps de situer l’ingénierie territoriale dans la science politique française.
Le seuil des 50 000 habitants pour créer une communauté d’agglomération est fixé par la Loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale.