Les périmètres des CDPRA évoluent au gré des enjeux de contrôle territorial.

L’élaboration de la seconde génération de contrats, les CDPRA, au début 2000, confirme la justesse de ce propos. Si le Département a éprouvé des difficultés à se positionner dans les politiques territoriales contractualisées sous l’égide de la Région, il prend plus que jamais toute sa place dans la délimitation des périmètres de coopération intercommunale. Ainsi l’élargissement de la maille des CDPRA du Beaujolais et du Roannais est directement issu de la dilution du CGD interdépartemental des Monts du Lyonnais et du Beaujolais. Messieurs CLEMENT-FROMENTEL et MERCIER lâchent un territoire de circonstance qui n’a rien produit de tangible pour mieux contrôler la nouvelle procédure Pays depuis leur donjon départemental malmené par la LOADDT et les coups de boutoir de la Région. Ils repoussent toute tentative de débordement de leurs fiefs, tout en laissant une marge d’action aux présidents de communautés de communes, les députés-présidents des communautés d’agglomération jouant leur propre partition. Les agents de développement pour signifier le rôle de Michel MERCIER disent du découpage territorial du Beaujolais et du Roannais qu’il s’agit d’«  une Merciérade »!

‘«R  C’est purement politique quand vous avez un Pascal CLEMENT, ancien ministre, député rapporteur des lois et qu’à ce moment là vous avez le débat sur la loi sur les Pays et qu’au niveau du Conseil général parce que Pascal CLEMENT est président du Conseil général, on suit les Pays mais qu’on met pas le paquet sur les Pays, et bien, sans jugement de valeur, après, c’est du jeu politique. »
Entretien n°2 du 3 décembre 2003
« R Il y a quelques années, j’étais beaucoup plus critique vis à vis du Département que je ne le suis maintenant. Le Département a petit à petit pris sa place dans tout ce dispositif. C’est vrai que, bon, là je viens d’une réunion sur le Pays. On prépare le futur contrat de Pays avec la Région avec un collègue président de l’EPCI voisin et avec un technicien. C’est vrai qu’avec ces contrats de Pays, on a des relations privilégiées, on a fait un CGD, on prépare un contrat de Pays, tout ça c’est avec la Région. Ça fonctionne et le Département a mal pris sa place dans le précédent CGD, il y a eu de la peine et ils n’ont pas pris leur place. »
Entretien n° 4 du 12 mars 2004
« R1 Le Conseil général essaie de court-circuiter les intercommunalités parce que le Conseil général signe de plus en plus de contrats pluri annuels avec les intercommunalités que ce soit avec les SIVOM ou EPCI. Ça a peut être été long à se mettre en place. Là il y a coopération et compétences partagées. La preuve, c’est qu’un certain nombre de conseillers généraux sont présidents d’EPCI. Depuis trois ou quatre ans, le Conseil général est en plein dans la logique. Le Pays n’est que le fruit de l’intercommunalité, on retrouve à l’échelon du Pays la coopération entre le Conseil général et le Pays. Le Pays n’a pas vocation à exercer des compétences propres, c’est toute la différence entre l’intercommunalité et le Pays. Les compétences qui sont transférées des communes aux EPCI sont des vraies compétences avec prélèvements d’impôts. Le Conseil général ne voit plus de risques, c’était pas vrai y a deux ans encore parce qu’on ne savait pas encore comment allait évoluer le Pays parce qu’on ne savait pas s’il y allait avoir des syndicats mixtes, avec des vrais transferts de compétences avec la capacité de lever l’impôt. On n’est pas dans cette logique. »
Entretien n° 10 du 22 mars 2004’

Le président de la communauté de communes du Pays Beaujolais Val de Saône et conseiller général du Rhône explique cette mécanique : 

‘« R. Le problème des Pays, alors on s’est posé la question, c’est l’intermédiaire entre les communautés de communes et la Région, parce qu’on ne peut pas passer directement de la communauté de communes à la Région et encore moins de la Commune à la Région. C’est vrai que d’avoir des Pays qui regroupent des communautés de communes qui sont un peu comme des circonscriptions de Régions, comme les cantons le sont pour le Département, on aurait des circonscriptions de Région parce qu’on n’a pas su faire des communautés de communes, ou d’agglomération assez vastes. Pour moi la pertinence c’est ça. Mais un bon Pays, c’est un Pays qui ne reste pas figé dans les frontières départementales. Et là on a de gros échecs pour notre Pays, et pour le Pays roannais à la marge. Le départ d’Amplepuis Thizy qui est dans son bassin de vie, et du coup ça perturbe le nôtre, de Pays puisque on a un Pays très tiré à l’ouest. On nous donne l’argument, l’analyse est bonne, c’est la réponse qui n’est pas bonne. On n’a sûrement pas à favoriser que l’axe Val de Saône qui est en train de prendre de l’ampleur et de désertifier l’ouest. Mais je ne crois pas que ce soit en rendant bancal le Val de Saône qu’on va réussir, parce qu’on fait une concertation avec l’aménagement du Val de Saône de l’autre côté qui d’ailleurs n’a pas réussi à se faire reprendre par l’autre Pays Bresse Revermont..(.) »’

Le député Bernard PERRUT qui a lancé l’initiative du Pays Beaujolais en réponse à l’appel à expérimentation de la DATAR, va dans le même sens :

‘« R. Le Beaujolais a une histoire tout à fait intéressante. Si cela vous intéresse, c’est qu’il y a dix ans est né le Pays beaujolais au sens de l’association touristique Pays beaujolais dont je suis le président depuis dix ans et qui est née en disant, il faut réunir tous nos efforts dans le cadre du développement touristique. En 1995, avec la Loi Pasqua, j’ai demandé que notre territoire soit reconnu comme Pays expérimental. Ce qui n’a pas été possible, parce que notre territoire n’a pas été retenu, c’est la raison pour laquelle, avant le vote de la loi VOYNET, la DATAR avait lancé un appel d’offre, et à ce moment j’ai répondu à l’appel d’offre de la DATAR et 3 mois après la DATAR répond est très intéressée, nous voilà Pays émergent, la loi VOYNET était arrivée entre temps, donc de nombreuses réunions ont eu lieu depuis 1998 pour réunir tous les gens, les présidents de communautés de communes, l’ensemble des élus autour du préfet pour faire émerger, première chose, le besoin de travailler ensemble, les élus ne s’étaient jamais rencontrés sur un territoire comme celui du Pays Beaujolais, quand on habite Thizy, on n’a jamais rencontré un élu de Villefranche, ou Lozanne. A partir de là, l’intérêt c’est d’avoir obligé les gens à travailler ensemble et ensuite d’avoir en suivant la procédure créé la charte, le conseil de développement. Il y a eu des débats, est ce que le Pays devait être uniquement sur le Rhône ou sur l’Ain. On voit que les Pays sont encore fidèles à certaines traditions historiques, il est difficile de franchir les limites départementales. Et nous notre Pays correspond à l’arrondissement de Villefranche. C’est un Pays un peu original et c’est le premier Pays reconnu en Rhône-Alpes. C’est son originalité.(.)  Est-ce que le territoire est spécialement pertinent, il n’est peut être pas pertinent du côté de l’Ain, il aurait pu s’étendre en Saône et Loire, il n’y a pas de pertinence, il y a des limites à tout. Il y a au Nord, la Saône qui est une limite. Après ce territoire, il y en a encore un autre. Si vous voulez, il y a toujours une cohérence et une cohésion. Aujourd’hui, on constate bien qu’on est sur un schéma départemental, la France ne l’a pas oublié, un schéma cantonal qui fait que quand vous travaillez sur deux Départements, vous travaillez avec des structures différentes, des préfets différents et tout est différent. Ceux qui disent, il faut faire les choses des deux côtés du fleuve, de la rivière, je dis oui, mais si vous allez demander aux élus de l’autre côté, et bien ils vous disent non. Ils sont dans le Département de l’Ain et ils ne veulent pas se faire bouffer par le Département du Rhône. C’est aussi simple. Effectivement, on peut toujours croire qu’on peut faire une vallée de la Saône de part et d’autre, oui j’y crois volontiers, j’ai tout fait pour, mais en étant bien conscient que ça ne se ferait pas comme ça. »’

Président de la désormais communauté d’agglomération de Villefranche206, la seule dans le Département du Rhône, c’est vers un contrat d’agglomération que l’élu réoriente son action207. Cette stratégie qui vise à créer les conditions d’une autonomie financière accrue grâce à l’augmentation de sa dotation globale de fonctionnement ne doit pas être trop vite assimilée à un rejet du Pays. Elle peut, au contraire, donner les moyens à Villefranche sur Saône qui s’adosserait à une périphérie déjà institutionnalisée en Pays, de devenir le pôle politique et économique organisateur du développement du nord de l’aire urbaine lyonnaise, tout en traversant le fleuve Saône pour déborder sur le Département de l’Ain, notamment vers Jassans Riottier seulement éloignée de 4 km. La communauté de communes « Porte Ouest de la Dombes» dont elle est membre basculerait dans l’agglomération et le Pays Beaujolais. En ce cas, messieurs Bernard FIALAIRE, Bruno CHARVET et Michel MERCIER compteraient moins dans la balance du pouvoir local, notamment, pour le dernier avec sa majorité de composition au Conseil général du Rhône issu du renouvellement cantonal de 2008208.

Après le succès difficile de M Bernard PERRUT aux élections municipales de 2008, Jean PIGNARD, adjoint à l’urbanisme de la mairie de Villefranche sur Saône est désigné à la présidence de la CAVIL le 10 avril 2008209. Dans le discours inaugural de sa nouvelle fonction, celui-ci indique clairement sa volonté d’élargir le périmètre de l’agglomération : « Il m’apparaît nécessaire de dessiner le contour d’une nouvelle agglomération suivant un bassin de vie plus cohérent » 210.

La même analyse se prête au Pays Roannais. La signature tardive, le 22 avril 2006 du CDPRA avec la Région et l’État résume à elle seule les incidents qui ont émaillé la procédure depuis la fin du CGD en 2002.

En effet, le Pays Roannais flotte un certain temps après l’élection d’Yves NICOLIN (UMP) à la mairie de Roanne et à la présidence de la communauté d’agglomération en 2001. Avec le contrôle du Département que dirige l’influent président Pascal CLEMENT-FROMENTEL (UMP), le Pays Roannais change de direction politique. M. André CELLIER, « l’homme lige du président » comme certains commentaires peu amènes le qualifient, par ailleurs conseiller général et président de la communauté de communes du Val d’Aix et d’Isable (UMP) remplace M Bernard JAYOL, chef de projet Pays, politiquement marqué à gauche.

‘« R M. CELLIER est conseiller général, je dirais que le Pays fonctionne dans le cadre d’un espace que lui laisse le Département et grâce aux moyens de la Région. En tant que technicien nous collaborons bien avec les techniciens du Conseil général, mais ce n’est quand même pas un mariage d’amour. ».
Entretien n° 26 du 14 juin 2006
« R C’est que du jour où Yves NICOLLIN a été élu à la mairie de Roanne et président de l’agglo, Pascal CLEMENT a dit : « il faut mettre la main sur le Pays, et ça peut être une pompe à fric, donc mettons quelqu’un de droite pour diriger le Pays, essayons d’en tirer le maximum et tant pis pour le projet de territoire ».
Entretien n° 15 du 30 mars 2003’

Ce virage doit être lu à l’aune de la stratégie de Jean AUROUX responsable de la déchirure de la majorité entraînant sa défaite lors de l’élection municipale de Roanne en 2001.

Ne voulant passer la main à son 3ème adjoint Alain GUILLEMAND désigné par les militants socialistes du cru, l’ancien ministre ignore « la logique militante »211 et présente une liste dissidente qui signe la défaite de la « majorité plurielle » sortante. Cette nouvelle donne politique rompt l’équilibre obtenu lors du CGD. Cumulée à la volonté du Grand Roanne de signer un contrat d’agglomération avec la Région, elle jette le trouble au sein du Pays. Il s’ensuit en 2002 un départ remarqué de deux agents de développement clés dans la réussite de l’animation du CGD. Bref, à une nouvelle direction politique succède une nouvelle animation technique qui brise l’élan initial.

Cependant la réputation acquise par le CGD du Roannais212 ne laisse pas indifférents certains élus hors périmètre. Dès 2001, un certain nombre d’entre eux, présidents de communautés de communes ligériennes voisines rejoignent le CDPRA du Roannais. Son périmètre s’agrandit.

‘« R A mon avis, c’est parce que le CGD du roannais était exemplaire, tout le monde a vu que ça marchait bien. Quand on commencé à parler des CDPRA, nos voisins sont venus frapper à la porte, ceux qui faisaient partie du contrat Monts du Lyonnais, Monts du Beaujolais. Les trois cantons, Belmont, Balbigny et la Copler sont venus taper à la porte en disant notre participation serait justifiée, on est dans les limites de l’arrondissement et bon, à l’époque, ça a été une décision politique, nous, les techniques, on n’est pas intervenu. »
Entretien n° 31 du 7 décembre 2006’

Il reste toutefois enserré dans les limites départementales. Malgré la multiplication des diagnostics, les prises de position claires des membres du Conseil Local de Développement, il n’intègre toujours pas les communautés de communes rhodaniennes d’Amplepuis et Thizy fief de Michel MERCIER.

‘«  R Et puis, en parallèle, il y a eu une réflexion sur les limites du territoire, qui à mon avis n’a été que le fruit du travail des élus. C’est comme cela qu’ils ont compris la loi Voynet, les limites du territoire relèvent d’abord d’un choix politique. Alors moi, je pense qu’il aurait été utile de saisir cette opportunité pour élargir le périmètre du Pays roannais. Parce que sur le plan économique, il ne semble que pour avoir un territoire pertinent, on doit regrouper l’arrondissement de Roanne et les cantons d’Amplepuis Thizy dans le Rhône, parce qu’il y a des migrations, il y a des échanges, et puis le textile dans tout ça me semblait cohérent. ».
Entretien n° 23 du 29 mai 2006
«R  C’est vrai que le périmètre du Roannais n’est pas idéal. Il aurait dû intégrer l’arrondissement de Roanne plus les communautés de communes d’Amplepuis Thizy, Cours la Ville dans le Rhône et une communauté de communes de Saône-et-Loire au-dessus de Charlieu.µ
On n’y a retravaillé sur le Pays. Cours la Ville n’a pas voulu venir pour des raisons politiques.
Q Vous pouvez préciser ?
R Ils voulaient rester sous la couverture de MERCIER. Ils ont intégré le Pays Beaujolais. Quant aux trois autres cantons qui nous ont rejoints, ils n’avaient plus le choix. Ils voyaient bien que dans le temps ils étaient poussés à revenir dans la logique territoriale. Par exemple, la Copler disait qu’elle ne voulait plus d’un catalogue dans lequel chacun puisait ce qu’il voulait. Elle voulait travailler avec une vraie stratégie de territoire dans un vrai projet territoire. Et les deux autres ont suivi le mouvement. On a intégré Feurs et Panissière, qui étaient à cheval sur le Forez. Quelle problématique ils échangeaient avec Montbrison par exemple ? Difficile à définir. On leur a dit, à un moment, vous êtes à la marge mais vous pouvez venir. Il y a quand même une logique économique en matière industrielle, et une certaine logique dans les Monts. Donc venez. Mais les élections sont arrivées et ça a cassé la dynamique. Compte tenu du changement de la nouvelle équipe de direction du Pays Roannais. Ils ont dit non. » 
Entretien n° 31 du 7 décembre 2006’

La logique de fief sur fond de concurrence institutionnelle avec la Région présente dans les CGD demeure dans les CDPRA. Elle atteint un pic avec les contrats triennaux que proposent les Départements de la Loire et du Rhône aux Communes et EPCI qui couvrent leur territoire. Le président de l’exécutif départemental négocie avec les maires et les présidents de communautés de communes. Il s’agit ni plus ni moins d’une stratégie de cannibalisation des Pays qui casse leur fonction intégratrice. Cette stratégie cherche non seulement à sortir les communautés de communes de l’orbite régionale mai à renforcer le couple Département –Commune.

Les contrats triennaux dans le Rhône

Sur le plan institutionnel, le Conseil Général du Rhône, lors de sa session du 26 novembre 1999, modifie son système d'aide aux communes et à leurs groupements en adoptant le principe de la négociation de contrats pluriannuels en substitution aux aides directes.

En octobre 2003213, il avait conclu 283 contrats pour une période triennale dans la majorité des cas, voire pour quatre ou cinq ans.

Cinq priorités sont ciblées :

Ces 283 contrats concernent en 2003 :

La totalité des engagements en 2003 s'élève à 183 millions d'euros de subventions (soit environ 50 millions par an en moyenne)214.

On voit ici la dispersion des collectivités signataires par rapport aux 46 CDRA qui visent les communautés de communes. C’est d’abord un lien privilégié avec les Communes qui est recherché par le Département se présentant comme leur soutien financier et technique.

Comme le précise Michel MERCIER, président du Conseil Général du Rhône : « Dans cette logique, le Département pourrait accompagner les collectivités désireuses d'apporter à leurs habitants de nouveaux services de nature à faciliter la vie quotidienne. Ce soutien pourrait bien sûr porter sur les investissements nécessaires à leur mise en œuvre, mais également intéresser le fonctionnement de ces nouveaux services de manière à les rendre accessibles au plus grand nombre.

Par ailleurs, le Département intervient, de par ses compétences propres, au profit de chacune des communes. Aussi, je vous propose d’intégrer dans les contrats que nous serons amenés à signer toute l’action que nous déployons sur le territoire concerné, affectée aux communes ou à leurs groupements et relevant de leur compétence.(.)

Telles sont les principales évolutions et adaptations de notre dispositif d'aide aux communes et intercommunalités que je tenais à vous présenter ; elles s'intègrent dans une vision globale du couple Département/communes et sont de nature à mettre ce dispositif toujours plus en adéquation avec les attentes des Rhodaniens. »

Dans la continuité de cette déclaration, le Département du Rhône élargit le champ d’intervention des contrats. Le 23 juillet 2004215 il y intègre la politique de l’eau.216

Le 20 mai 2005217, il décide que les subventions relatives l’assainissement des eaux sont attribuées dans le cadre des contrats pluriannuels.218

Le 21 juillet 2006219 il vote une modification des modalités d’aide au fonctionnement des communes au sein des contrats pluriannuels. Désormais le Département intègre ses compétences propres comme la petite enfance l’accompagnement des personnes âgées et handicapées dans les contrats triennaux220.

Les contrats triennaux dans la Loire

En janvier 2002, le Conseil général de la Loire initie une démarche de contractualisation avec les intercommunalités. Dénommée « Contrat Triennal de Développement », elle structure les actions qui s’inscrivent dans les priorités du Schéma de développement départemental. En février 2003, l’Assemblée départementale décide la mise en place de Contrats de développement tests221. En janvier 2008, quatre intercommunalités avaient signé un tel contrat avec le Département de la Loire.

L’objectif des contrats triennaux mis en place par le Département de la Loire est explicite : il s’agit de rester un « acteur majeur du territoire dans un contexte de croissance du nombre et de l’importance des structures intercommunales. Ceci entraîne un repositionnement de l’institution et de ses modalités d’intervention » 222. En conséquence, le Département s’inscrit dans la logique de projet. Il adopte les méthodes et discours génériques liés à l’action publique territoriale. Diagnostic territorial, territoire de projet, prospective, partenariat et transversalité apparaissent dans le registre d’action de la Direction de l’Aménagement des territoires, des Politiques et de la gestion de l’Eau du Département de la Loire.

Par rapport au Département du Rhône, les cibles favorisées ne sont pas les communes, mais les communautés de communes et communautés d’agglomération. Les critères d’éligibilité aux Contrats Triennaux Départementaux dépendent d’abord de l’existence « d’un projet générateur » », c'est-à-dire d’un projet qui concerne au moins une communauté de communes qui « interpelle directement ou indirectement le Conseil Général sur ses compétences ».

Par exemple, la mise en service en 2012 du tronçon de l’A 89 entre La tour de Salvagny et Balbigny sur une partie du Département est un évènement constitutif d’un « projet générateur ». Fin 2006, quatre communautés de communes membres du Pays Roannais concernées par cet axe routier, Balbigny, COPLER, Feurs en Forez, et Collines du Matin s’engagent par délibération dans l’élaboration du « CTD A 89 intercommunautaire ». Une cinquième, Vals d’Aix et d’Isable, également membre du Pays Roannais intègre le Contrat Triennal Territorial courant 2008. Le programme prévoit près de 111 actions dont 60% sous maîtrise d’ouvrage intercommunale ou départementale. Le Département présidé par Pascal CLEMENT FROMENTEL s’engage à hauteur de 12 millions d’euros sur la période 2008-2010223. Le Pays Roannais, en tant qu’entité territoriale, est ignoré alors qu’il fait du désenclavement de son territoire un des axes principaux de sa charte de développement.

La présentation de ce « projet générateur » qui mobilise cinq intercommunalités membres du Pays roannais sur un enjeu de développement majeur de l’ensemble du Roannais est un exemple parmi d’autres de la lutte institutionnelle entre Pays, Région et Départements. Il s’inscrit dans la continuité de la stratégie du Président du Conseil général de la Loire qui conçoit le Pays comme une simple machine à obtenir des subventions régionales. Toutefois, celui-ci prend la mesure de la force intégratrice de l’intercommunalité et du Pays.

‘«R CLÉMENT voit un truc arriver, qui prend de l’ampleur, et qu’il ne va pas pouvoir contrôler, il voit un mastodonte sortir avec un vrai projet de territoire, une société civile qui s’organise, avec un partenariat qui peut se mettre en place entre les deux sur des projets qui ne sont pas à la petite semaine, mais sur de la formation, du développement économique, de l’insertion, qui sont à l’échelle du Roannais. Parce qu’on ne voulait plus de petits projets à trois francs six sous sur la place du village. On veut des vrais projets, travaillés en collaboration, non pas à l’échelle d’une communauté de communes, mais à l’échelle des 11. Et c’est ça qui était en train de monter en puissance. CLEMENT s’en aperçoit à ce moment-là. Il comprend qu’on est plus dans la logique clientéliste, je vous donne le paquet et c’est vous qui le gérez. On est dans une logique totalement différente entre des élus et la société civile pour faire un projet commun.
Entretien n° 31 du 7 décembre 2006’

Devant la logique de projet territorial intégré qui s’affranchit relativement des politiques clientélistes, le président du Conseil Général mesure le risque de la perte de contrôle des communautés de communes aux périmètres et personnel politique communs aux cantons au sein de l’assemblée départementale.

Même s’il maîtrise bien sa majorité départementale, M Pascal CLEMENT FROMENTEL considère le Pays Roannais comme une menace grandissante compte tenu du jeu institutionnel dans lequel la Région cherche à peser. Sa stratégie consiste donc à aider l’intercommunalité en ignorant le Pays, relais d’influence régionale.

‘« R  Déjà le CGD était un contrat avec la Région. Le Pays et c’est aussi un contrat avec la Région, alors le Département continue à avoir ses lignes classiques, ses compétences. L’interlocuteur du Pays, c’est la Région le signataire du contrat. A mon avis, je ne suis pas élu, les élus du Conseil Général voyant augmenter l’influence de la Région, ont tenu à garder leur place et ils ont placé dès qu’ils ont pu les conseillers généraux au sein du Pays roannais ».
Entretien n° 26 du 14 juin 2006
« R Il le contrôle bien à l’époque, mais je crois quand même qu’il n’appréhende pas cela. Parce que, quand on regarde, en même temps le syndicat mixte du Forez saute. Ça je l’ai compris après. Toutes les grandes structures sautent en même temps. Parce que si le Pays Roannais saute, le syndicat mixte du Forez explose aussi et il ne reste plus que des intercommunalités. Et gérées par qui ? Des conseillers généraux en partie. Donc on a la mainmise dessus. Donc on négocie avec eux et ont fait des contrats territoriaux de trois ans. Par contre je n’ai pas la mainmise sur une fédération d’intercommunalités. Alors c’est peut-être un parti pris de ma part, mais c’est l’analyse politique que j’en fais. »
Entretien n° 31 du 7 décembre 2006’
Notes
206.

Arrêté préfectoral n° 2005-5798 du 12 décembre 2005, entraînant la transformation de la communauté de communes de l’agglomération de Villefranche en communauté d’agglomération (CAVIL). Ce nouvel EPCI regroupe les communes de Villefranche sur Saône, Arnas, Gleizé et Limas.

207.

GUTTIN-LOMBARD F. « Vers un contrat d’agglomération » dans le Progrès du 16 décembre 2004. L’article précise que les opposants de gauche à la majorité actuelle dénoncent une intercommunalité au rabais dont le territoire est trop restreint. Ils condamnent le passage en force du maire de Villefranche, J. PIGNARD, qui rendra difficile le rapprochement des communes de l’Ain.

208.

Da FONSECA M. « L’UDF peut-elle perdre le pouvoir au Conseil général ? » www.leprogres.fr , édition du 2 avril 2006.

209.

PV du conseil communautaire du jeudi 10 avril 2008 sur www.ccavil.fr . Consulté le 12 juillet 2008.

210.

« Communauté d’agglomération de Villefranche : la présidence de la ville revient à Jean PICARD ». www.lepatriote.fr , Consulté le 10 décembre 2008.

211.

Selon les termes de François HOLLANDE premier secrétaire du PS, repris dans la rubrique Échos de campagne de l’Humanité, le 2 février 2001.

212.

L’élu pilote et les agents de développement ont présenté ce contrat à la DATAR qui l’a reconnu comme un exemple réussi de ce que pourraient être les territoires de projet.

213.

Direction générale des services départementaux, Solidarité Territoriale et Aménagement. Rapport du 13 octobre 2003, p 2.

214.

Ibidem p 2

215.

Délibération du 23 juillet 2004 – politique de l’eau.

216.

Rapport au Conseil général. Politique de l'eau du Département 23 juillet 2004.

217.

Délibération du 20 mai 2005 – politique de l’assainissement.

218.

Rapport au Conseil GénéralPolitique de l'assainissement du Département du 20 mai 2005.

219.

Délibération du 21 juillet 2006 – aide au fonctionnement.

220.

Rapport au Conseil général. Aides aux collectivités - Modification du règlement départemental d'aide aux communes du 21 juillet 2006, 5 p.

221.

Délibération de l’Assemblée départementale du 17 février 2003 relative à la mise en place de Contrats territoriaux de développement tests.

222.

La description de ces politiques est tirée d’un document intitulé : Les Contrats Territoriaux de Développement qui nous a été remis par la responsable du Service politique territoriale et aménagement Communal.

223.

Budget primitif 25 janvier 2008. Commission Politiques territoriales et économiques rapport n° 08-2-BP-4