1 Les membres de la société civile dans les Conseils Locaux de Développement.

Les CLD, que la Région en parallèle à la Loi d’Orientation sur l’Aménagement et le Développement Durable du Territoire a décidé d’instituer dans les CDRA/CDPRA et les CTEF, (cf encadré ci-dessous) regroupent les acteurs économiques, les représentants d’associations et les partenaires sociaux d’un territoire parallèlement au collège des élus communaux et représentants intercommunaux. Mises en place dès le début des dispositifs, ces enceintes sont en quelque sorte une assemblée consultative dans chaque territoire. Associés à l’élaboration des projets, ainsi qu’au choix et à la définition du programme d’actions, les CLD peuvent formuler des propositions. Dans les premières années des Pays Beaujolais et Roannais pas moins de 400 réunions ont eu lieu, organisées dans les communes, conduites par les élus, les présidents des CLD, les agents de développement sans véritable influence sur le découpage des périmètres et la programmation des opérations prévues dans les dispositifs territoriaux.

‘« R Les CLD délivrent un avis consultatif. Tant que ça n’est que consultatif, l’élu conserve son pouvoir de décision. Il est élu pour cela aussi. Donc il faut trouver l’équilibre et ça ce n’est pas évident. Et c’est vrai que tout ceux que j’ai entendus en parler disent : nos CLD c’est un avis. On les fait travailler sur des thématiques pour avis. Bon, c’est vrai que quand on a bossé un an sur une thématique et qu’on voit que l’avis n’est pas pris en compte, ça peut être frustrant. Ils disent que tout ça, en gros, c’est du pipeau. Oui, cela fait bien, la société civile participe. Mais ce qu’elle pense, ce qu’elle dit, on s’en fout. Les élus ne sont pas contraints. Alors je n’ai pas d’exemple en Rhône-Alpes, où les propositions de la société civile auraient été suivies par les élus ».
Entretien n° 24 du 6 juin 2006’

Pris entre les enjeux de contrôle territorial et la complexité des dispositifs, les membres de la société civile sont soit dépassés par le caractère technique des échanges, soit leur capital culturel leur permet de comprendre sans que leur rôle ne soit bien clair.

‘« R Les citoyens. On les a introduits comme cinquième collège. Il y en a en principe partout. Après une première phase l’intérêt mutuel, je ne sais pas, en tout cas de leur part à eux. Il y a quand même à mon avis une interrogation sur leur place, leur rôle réel maintenant. Soit les contrats territoriaux emploi-formation vont virer vers le technicisme, cela dépend comment c’est piloté, quelle maîtrise il y a du pilotage politique et stratégique. Dans pas mal de CTEF, finalement, les opérationnels ou les fonctionnels ont pris le dessus. Du coup, on s’échange des sigles que personne ne comprend. Le citoyen regarde tout cela passer. D’autres, à peu près un tiers, en particulier dans le Beaujolais où je fais tout pour minimiser ce type d’échanges, qu’on puisse plus avoir des confrontations sur les idées que des échanges de jargon. Là, les citoyens peuvent intervenir. Ils ont quand même du mal. Pour le moment, j’ai une réflexion avec ceux du Beaujolais, que j’ai du mal à mobiliser, il y en a un ou deux qui sont plus actifs. J’essaie de réfléchir à la manière dont je pourrais les articuler dans le suivi évaluatif. Parce que parallèlement à la délégation sur l’évaluation j’ai, en relation avec François AUGUSTE, initié de manière un peu conflictuelle, l’intervention des citoyens dans l’évaluation des politiques de la Région. Bon ces citoyens, ce ne sont pas n’importe quels acteurs ».
Entretien n° 38 du 28 juin 2007’

Autrement dit, les membres de la société civile pour participer à la gestion de ces dispositifs ont intérêt à professionnaliser leurs méthodes de travail et leurs productions d’avis. Faire preuve de savoir technique est un enjeu de légitimité auprès des élus. Cette obligation est particulièrement forte pour les associations qui interviennent comme relais des politiques et comme prestataires de services. Elles participent aux séances de formations initiées par les collectivités locales, nourrissant le processus de standardisation des compétences animé par les agents de développement.

‘« R Il y a le travail et du conseil de développement et il y a le travail des techniciens. J’ai déjà dit à plusieurs reprises et je le répète l’importance des techniciens. C’est un des piliers des Pays. Cela repose sur les élus, en n°1, les techniciens mais aussi sur la société civile. Voilà les trois piliers indissociables. »
Entretien n°27 du 19 juin 2006’

Pour ceux-ci il s’agit d’une véritable opportunité. Ils peuvent diffuser la démarche de projet territorial au sein du milieu associatif et chez les acteurs institutionnels présents au CLD. Ils contribuent à la création d’un cadre d’action qui renforce leur rôle d’interface. En d’autres termes, l’ingénierie territoriale se constitue aussi dans le recours à la société civile favorisé par la Région. Dans ces interdépendances, la société civile est instrumentalisée mais elle se donne aussi les moyens d’entrer dans le jeu d’influence de l’action publique territoriale.

Les CLD dans la Loi
L’article 25 de la LOADDT dispose qu’un conseil de développement « composé de représentants des milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs est créé par les communes et leurs groupements. »(…) « Le conseil de développement s'organise librement. » (…) « Il est associé à l'élaboration de la charte de pays. », « Il peut être consulté sur toute question relative à l'aménagement et au développement du pays. »,(…) « Le conseil de développement est informé au moins une fois par an de l'avancement des actions engagées par les maîtres d'ouvrage pour la mise en œuvre du projet de développement du pays et est associé à l'évaluation de la portée de ces actions ».
Le Décret n°2000-909 du 19 septembre 2000 relatif aux pays dispose en son article 3 que « Les communes et les groupements de communes qui ont engagé la procédure soumettent aux autres communes et groupements figurant dans l’arrêté préfectoral mentionné au dernier alinéa de l’article 2 une liste de personnes appelées à composer le conseil de développement, en tenant compte, de manière équilibrée, de la diversité des activités économiques, sociales, culturelles ou associatives présentes sur le territoire. À défaut d’opposition des conseils municipaux ou des organes délibérant des groupements dans un délai de deux mois suivant leur saisine, les communes et groupements de communes qui ont engagés la procédure créent, par délibérations concordantes, le conseil de développement. Celui-ci élit son président parmi ses membres. Les moyens de son fonctionnement sont déterminés, le cas échéant, par convention entre les communes et les groupements de communes intéressés».
L’existence et la libre organisation de cette enceinte ont été l’objet d’âpres discussions lors des débats parlementaire. Certains députés, au premier rang desquels M. Patrick OLLIER ont cherché soit à supprimer, soit à formaliser le fonctionnement et la composition de cette enceinte. La logique étant de la neutraliser par le contrôle des notables.
La loi « urbanisme et « habitat »de 2003, dont les amendements relatifs au Pays sont présentés par M. Patrick OLLIER, a modifié les missions du conseil de développement :
« Les EPCI à fiscalité propre ou les communes organisent librement un conseil de développement, comprenant notamment des représentants des milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs du Pays».  Le conseil de développement est associé à l'élaboration de la charte de développement du pays et à son suivi ».  
Les conseils de développement sont désormais organisés par les communautés de communes et la notion d’évaluation a été remplacée par le suivi. Cette évolution législative ne facilite pas leur positionnement. Si leur mission d’évaluation des actions prévues à la charte de Pays disparaît, il ne leur reste que la prospective dont l’utilité est revue à la baisse une fois le contrat signé. Ils restent une structure de concertation en quête de légitimité.
Les CLD en Rhône-Alpes
En novembre 2000 408 , à la suite de la LOADDT, la Région Rhône-Alpes a institué des CLD dans ses dispositifs territoriaux. En novembre 2005 409 , elle a formalisé leurs missions. La délibération relative au soutien aux CLD rend compte du projet politique sous-jacent.
Ainsi, le Conseil régional décide de :
- de retenir les modalités de fonctionnement et l’exigence de la rédaction d’un règlement intérieur, propre à chaque CLD, telles que décrites en annexe 2,
- de retenir les modalités du soutien régional aux CLD suivantes :
- subvention annuelle de fonctionnement des CLD plafonnée dans une fourchette de 21 000 € à 42 000 €, calculée en fonction du nombre d’habitants du territoire, de sa densité de population, et de la participation des collectivités locales au fonctionnement du CLD, permettant la prise en compte de diverses actions : personnel d’animation dans la limite d’une aide plafonnée à 1 500€ par mois, recours ponctuel à des prestations d’études ou de conseil, mise en œuvre d’outils de communication, dépenses de fonctionnement courant y compris remboursement de frais de déplacement de leurs membres. La subvention est fixée sur la base du projet présenté par le CLD pour l’année à venir, intégrant les missions telles que prévues à l'annexe 1, et respectant les règles de composition et de fonctionnements prévus en annexe 2. Cette subvention est versée au vu de l’ensemble de ces éléments qui attestent de la réalisation effective du projet initialement présenté.
- soutien à certaines actions spécifiques dans le cadre de fiches-action du CDRA,
- prise en compte d’actions de formation des membres des CLD dans le cadre des politiques régionales et notamment du programme de formation en direction des acteurs locaux en cours de formalisation,
- apports en informations territorialisées produites par la Région,
- mise en oeuvre d’une fonction « Réseau des CLD » pour permettre échanges et capitalisation d’expériences.
- mise à disposition de locaux dans les antennes pour la tenue de réunions des CLD.
Dans la continuité de cette décision, la Région a organisé le 25 novembre 2006 la première journée des CLD, intitulée « Ensemble pour construire le territoire » autour de tables rondes portant sur leur apport dans le débat démocratique, la prospective et la démarche de développement.

Notes
408.

P.V. de l’assemblée plénière du Conseil régional de Rhône-Alpes Du Vendredi 24 novembre 2000 intitulé Les contrats de développement en Rhône-Alpes.

409.

Délibération n° 05.07.805 du 9 et 10 novembre 2005 sur la Politique Régionale des Contrats de Développement de Rhône- Alpes : Soutien aux CLD.