I-C) La naissance d’une nouvelle forme de construction collective.

L’ensemble des transformations sociétales dont nous avons pu voir les diverses mises en œuvre sur le monde étudiant, au travers des associations de filières comme des associations thématiques, puis par la construction des fédérations locales, trouve sa concrétisation formalisée dans l’émergence du réseau F.A.G.E. Emanation de ces nouveaux acteurs associatifs étudiants, la F.A.G.E. (Fédération des Associations Générales Etudiantes) naît le 12 décembre 1989 ; sa création est publiée au J.O. le 27 Avril 1990. Lors de son premier Congrès national en formation plénière du 1er au 4 Novembre 1990 à Strasbourg, sont présentes plus de vingt fédérations de ville, anciennes A.G.E., représentant près de 300 Bureaux d'Elèves, Amicales et corpos de toutes les villes universitaires du territoire ( 201 ). La F.A.G.E. ambitionne alors de regrouper, à partir des fédérations de villes, un maximum d'associations apolitiques étudiantes ( 202 ).

La volonté des initiateurs de ce projet est très claire : représenter les étudiants en dépassant les lacunes démontrées par les structures précédentes (F.N.E.F., C.L.E.F., C.N.E.F.), mais aussi dans le même temps recréer, du moins dans l’esprit, la grande U.N.E.F. de 1946, ou 1907. A telle enseigne, le pré-projet de création de cette nouvelle fédération proposait de nommer cette dernière l'U.N.A.G.E.F. (Union Nationale des Associations Générale des Etudiants de France) ; de même un débat important anima ses premiers fondateurs quant à la réutilisation possible du nom U.N.E.F. par les associations étudiantes. Toutefois, si l’on peut voir très clairement ici une réapparition du mythe de la grande U.N.E.F., le nom définitif sera celui de F.A.G.E. Le choix se porte sur un nom qui ne prête pas à confusion, ni à récupération ( 203 ), même si le mythe de l’U.N.E.F. reste présent en son sein.

Dés lors, la F.A.G.E. se construit comme un lien entre l'histoire, l'héritage de l'U.N.E.F., et les remontées nouvelles du terrain. Ainsi, les statuts de cette nouvelle fédération se réfèrent dès le préambule à la grande U.N.E.F. « Il est créé - en fidélité aux principes d'indépendance, de solidarité, et de fraternité de l'Union de 1907 - une association dénommé Fédération des Associations générales Etudiantes (F.A.G.E.), dénommée aussi Fédération des Associations Etudiantes ». Dans ce préambule, qui restera identique en dépit des nombreux changements de statuts au cours de ces dernières années, la F.A.G.E. fait se rejoindre l'agir associatif étudiant de la société salariale, et les nouveaux modes de constructions associatifs.

Cette organisation naît en effet dans un contexte institutionnel et politique pacifié, raisonné. La gauche qui, de part son accession au pouvoir en 1981, s’est frottée à l’exercice du pouvoir, se fait moins immédiatement revendicatrice, tandis que la chute du mur de Berlin a achevé nombre d’utopies socialisantes. Le pragmatisme politique est désormais de mise. De fait, les engagements des étudiants se construisent en priorité sur une ligne apolitique, et se concentrent sur l’action de terrain.

Ce phénomène n’est pas spécifiquement estudiantin ; il est décrit par Ion dans « Militer aujourd’hui » comme caractéristique de cette époque. Dans leur ensemble, les syndicats professionnels prennent eux aussi leurs distances avec les partis politiques. La C.F.D.T. entame ainsi un mouvement de « resyndicalisation » à la fin des années soixante-dix après l’échec de l’Union de la gauche. La C.G.T. attendra le début des années quatre-vingt-dix pour adopter une posture identique. L’U.N.S.A., dernière organisation syndicale créée, affiche elle aussi un syndicalisme apolitique. Le positionnement apolitique de la nouvelle organisation nationale associative étudiante s’inscrit donc dans une dynamique plus générique, le monde associatif étudiant se faisant acteur des transformations des modes d’engagements collectifs des individus dans l’ensemble du monde social.

Cette nouvelle fédération nationale du mouvement associatif étudiant prend en outre acte des transformations qu’a connu le monde associatif. Elle s'appuie tout d'abord sur le renouveau de l'engagement associatif, mouvement sociétal de fond. Comme le montre notamment Archambault, il existe en effet une croissance plus marquée du phénomène associatif au cours des années
quatre-vingt. Le mouvement associatif étudiant participe de cette
expansion (cf. graphique n°9). En 1989, lorsque la F.A.G.E. se crée, elle peut ainsi compter sur un potentiel d'environ 6 000 associations étudiantes, réparties sur tout le territoire. Ce qui, compte tenu des données de l'O.V.E. sur le nombre de bénévoles, nous amène à un réseau d'environ 60 000 bénévoles ( 204 ).

Mais ce réseau est très hétéroclite. Il fait se côtoyer des structures fleurtant parfois avec un certain communautarisme de principe comme certaines « corpos » locales de Médecine ou de Droit, avec des associations toutes nouvelles ne dépassant parfois pas l'année d'existence. Il fait se côtoyer des structures devenues, au fil des ans, des quasi-organisations professionnelles (l'A.F.G.E.S. avec sa trentaine de salariés, l'A.G.E.M. de Montpellier avec son bar, sa boite de nuit, et son hôtel en pierre de taille ...) avec de jeunes structures locales, nées des implantations universitaires nouvelles de la fin des années quatre-vingt. Il fait enfin se côtoyer des fédérations de ville et des mono-disciplinaires.

La F.A.G.E. fait cependant apparaître un réel changement de dynamique sur la place des mono-disciplinaires et corporations dans l’agencement interne de l’organisation, qui tranche avec ses prédécesseurs. Un équilibre se construit progressivement autour de l’existence de deux collèges en interne, l’un pour les fédérations de villes, l’autre pour les mono-disciplinaires. Dans un premier temps, les mono-disciplinaires souhaiteront rester extérieures à la F.A.G.E., réclamant un statut de membre observateur. L’absence de poids qui en découle les conduit rapidement à insister pour disposer des mêmes prérogatives que les fédérations locales, revenant en cela sur leur position antérieure.

Début 1991, la F.A.G.E. se transforme donc en F.A.G.E.M. ( 205 ). L’objectif est alors de faire collaborer au mieux fédérations de villes et
mono-disciplinaires. Nouvelles constructions associatives et héritages cohabitent au sein de l’organisation. Cette construction se voit cependant rapidement abandonnée, des conflits de personnes et d'intérêts contribuant fortement à cet échec. La F.A.G.E.M. redevient ainsi après un an d'existence la F.A.G.E. : les anciennes mono-disciplinaires préfèrent rester à l'extérieur de la F.A.G.E. et coopérer avec elle tout en gardant leur indépendance et leur identité.

La F.A.G.E. va donc appuyer son développement sur la diversité du terrain. Ainsi, dans l’article 3 de son règlement intérieur, dans lequel elle précise la taille requise pour une A.G.E. afin d’être jugée représentative par la F.A.G.E., une place importante est faite à tout particularisme local : « les A.G.E. doivent justifier de l’affiliation d’au moins 5 associations étudiantes pour pouvoir valablement délibérer au Congrès National » ( 206 ). Si un nombre minimal de structure est requis, nulle obligation n’est faite sur le type d’associations, de filière ou thématique. La F.A.G.E. se positionne clairement comme une organisation inclusive.

Dès lors, contrairement à la logique des trois précédentes fédérations, les associations thématiques intègrent, lorsqu’elles le souhaitent, les réseaux fédératifs locaux, à l’instar des associations de filière. Même si ces dernières restent les plus nombreuses, on assiste par cette entrée à un renouveau du paysage fédératif local. Ainsi l’A.F.G.E.S., fédération des étudiants de Strasbourg, compte trois associations thématiques parmi ses trente membres : l’A.E.G.E.E. (Association des Etats Généraux des Etudiants d’Europe), Association ANKA (Etudiants Turcs de Strasbourg), l’Orchestre universitaire de Strasbourg. L’A.F.E.P., Association Fédérative des Etudiants de Poitiers a elle aussi intégrée trois associations thématiques locales parmi ses quinze membres : ligne Zen (ligne d’écoute étudiante), Anim’ Campus (organisation de la Nuit Etudiante), Chants contre champs (courts métrages). Les résultats de notre enquête montrent à ce titre que 29,3 % des associations thématiques déclarent adhérer à leur fédération locale (cf. annexe n°5 : « Les associations thématiques »).

Cette implication des associations thématiques au sein des réseaux fédératifs locaux accompagne le fort regain que connaît le fédéralisme local dans le milieu associatif étudiant. Ainsi, comme le montre notamment les deux tableaux ci-dessous, les réseaux fédératifs locaux peuvent s’appuyer sur une forte adhésion des structures (cf. graphique n°14).

Graphique n°14 :
Graphique n°14 : Pourcentage des associations locales regroupées au sein des fédérations.

Source : enquête propre. Les valeurs des tableaux sont des pourcentages en ligne établis sur 45 observations. Ces tableaux sont construits sur la strate de population « Fédération » contenant 45 observations, et définie selon le filtrage suivant : type = {fédération}.

Ainsi, plus de 55 % (31% + 24,1%) des fédérations regroupent en leur sein plus de 60 % des associations locales. Lors de mes mandats successifs à la tête de l’Association Générale des I.U.T. de Lyon, puis de la Fédération des Etudiants et Diplômés d’I.U.T. Région Rhône Alpes, le taux d’adhésion des associations fédérées dépassaient même les 80 % ( 207 ).

Les fédérations disposent donc d’un très important soutien de la part des associations locales. Cette hypothèse est renforcée par le fait que les cases encadrées en bleu par le logiciel Sphinx sont celles dont la dépendance est significative, quand celles encadrées en rose sont celles pour lesquelles il n’existe aucune dépendance. Ces taux de participation sont en outre à repenser en regard du fait qu’il n’est jamais possible d’atteindre les 100 % de satisfaits, donc a fortiori, d’adhérents.

A partir des années 1990 s’observe donc dans l’ensemble du monde associatif étudiant un changement de rythme tout autant qu’un changement en profondeur des pratiques. Ce processus s’accompagne d’une forte adhésion des fédérations locales au réseau F.A.G.E., le nombre de fédérations locales adhérentes à la F.A.G.E. passant ainsi de quinze en 1992 à vingt-cinq en 1994. Au moment de l’enquête, 86 % d’entre elles déclarent appartenir à une fédération nationale (cf. annexe n°4 : « Fédérations locales et taille de villes »).

Cette forte adhésion au réseau national retraduit l’attrait fort que constitue le projet F.A.G.E. pour les fédérations locales. Il est surtout la conséquence d’une réorganisation en profondeur des rapports entre local et fédéral, et de la pertinence de cette transformation.

Ainsi, s’il existe toujours des liens forts unissant fédération locale et fédération nationale, il n'y a cependant plus désormais un centre de décision, mais des centres de décision. La F.A.G.E. se construit comme un lieu de synthèse des réflexions locales, et non un lieu de réflexion globale. Plus qu'un système, c'est donc l'apparition ou la création d'un poly-système. Ce que confirme du reste les propos de Colin, président de l’A.F.E.H.R. ( 208 ) : « La F.A.G.E., c’est un peu ce que nous faisons dans notre fédé à une échelle nationale. Nous nous reconnaissons dans l’indépendance de l’organisation. L’A.F.E.H.R. est membre de la F.A.G.E. et défend ses intérêts, mais nous sommes totalement libre de faire ce que nous voulons » ( 209 ).Nous sommes ici dans un véritable renversement de logiques par rapport à celles qui préexistaient à la création de cette organisation.

La réalité de cette évolution et de la construction sur le terrain d’un
poly-système s’observe particulièrement dans le schéma organisationnel de cette nouvelle organisation. A la différence des structures type C.N.E.F., C.L.E.F. ou F.N.E.F., le pouvoir au sein de la F.A.G.E. ne se trouve pas centralisé dans les mains d'un bureau omnipotent, mais est au contraire délégué, de manière assez ambitieuse, dans les mains des fédérations locales. Ainsi, comme l’explique par exemple Romain Biard, « je dirai que le plus important pour moi, et c’est comme cela que je conçois la F.A.G.E., est de ne pas voir dans cette structure un prestataire de service mais un réseau et un exécutif, avec lesquels nous travaillons en symbiose, qui sont là pour répondre à nos questions, mais qui en retour attendent de nous que nous fassions la même chose, que nous participions de manière active à la vie de la structure » ( 210 ).

Ainsi, les statuts de la F.A.G.E. prévoient l’élection du bureau national directement par l'A.G. annuelle, composée des fédérations locales d’associations étudiantes, par un scrutin de liste. En temps que président de fédération, il m’a été donné de voir à plusieurs reprises les candidats aux postes de direction de la F.A.G.E. défendre leur projet face à des amphis parfois assez pointillistes. Plusieurs A.G. ont été le lieu de devoir de justification de la part du bureau sur des prises de position, des communiqués de presse. Il est arrivé que certains candidats aient à faire face à de véritables argumentations contradictoires de la part de quelques associations membres. De véritables débats animent donc les assemblées générales de cette organisation.

Dans le même sens, si le Conseil d'Administration « est chargé de l'administration générale de la F.A.G.E., et à ce titre, délègue des pouvoirs au Bureau National » (article 12), le Bureau National, lui « est chargé de l'administration courante. Il prépare les travaux du Conseil d'Administration, met en application les décisions du C.A. et du Comité Exécutif ... » (article 17). Cette configuration du pouvoir s’avère très éloignée d’une structuration pyramidale : le pouvoir est dans les mains des fédérations de ville, c’est-à-dire du terrain, qui dirigent et orientent, par le biais du C.A., les travaux et les décisions de la F.A.G.E.

Signe de l’importance donnée au terrain, le siège administratif de la F.A.G.E. sera dès sa création situé à Strasbourg, puis à Reims, à l’encontre des pratiques habituelles des organisations nationales représentatives étudiantes et autres. Comme l’explique à ce titre Orélie, présidente d’Intercampus (fédération des associations étudiantes de Reims), « la fédération permet à la F.A.G.E. d’obtenir une connaissance du terrain quelle que soit la ville ou la filière d’études. Tout ce qui se passe dans une université, dans une région est relaté à la F.A.G.E. pour qu’elle puisse disposer d’une réelle vision de l’ensemble du monde étudiant en France » ( 211 ). C’est donc dans une complémentation des actions que se construit ce nouveau réseau, les fédérations locales étant les principales ressources de la fédération nationale en matière d’information. C’est du reste à ce titre qu’elles disposent au sein de la F.A.G.E. d’un très important pouvoir décisionnel. Président d’une fédération régionale d’associations d’I.U.T., j’étais ainsi consulté par la F.A.G.E., à l’instar d’autres représentants étudiants de ce cursus, sur les moindres propositions législatives touchant à ces derniers. C’est notamment sur mes propositions, et sur la base de mes argumentations, que la F.A.G.E. a demandé et obtenu une réforme des Commissions Pédagogiques Nationales des différentes filières d’I.U.T., en intégrant des étudiants en leur sein.

Le règlement intérieur de la F.A.G.E. donne en outre dès les premières années une illustration pratique de ce renversement. A ce titre, il stipule dans son article premier que « le bureau de la F.A.G.E. ... s'interdit d'intervenir dans les domaines ou les territoires géographiques spécifiques de l'un de ses membres actifs, si ce n'est à sa demande » ( 212 ). Ainsi, si les fédérations locales donnent à présent les orientations de la structure nationale, dans le même temps, cette dernière n’intervient pas sur les territoires physiques comme symboliques des fédérations locales, leur laissant en cela indépendance et liberté d’action.

Au final, nous avons donc apparition d’un système associatif étudiant fortement délocalisé et démultiplié, chaque fédération se faisant alors créatrice et actrice de ce poly-système. Comme il n’y a plus un centre de décision, mais des centres de décision, la coordination qui s’élabore au niveau national se construit alors autour d’une synthèse des diverses identités locales. Un organisme national ne peut plus être un lieu de réflexion globalisée et unifiante, il doit avant tout tenter d'être un lieu de synthèse des réflexions locales. Cette structuration n’est pas sans renvoyer à la description des nébuleuses ou réseaux de mouvements mis en évidence par Melucci à la même époque ( 213 ).

Même si l’actualité des syndicats professionnels démontre leur volonté d’éclaircissement et leur plus grande prise en compte des problématiques locales, ces organisations restent cependant engoncées dans une répartition très centralisée des pouvoirs. Des organisations telles que l’U.N.S.A. laissent plus de marges d’autonomie à chacune des branches et organisations qui la composent, mais cette autonomie s’entend surtout au niveau des fédérations nationales. Seul S.U.D. semble ouvrir à une véritable autonomie des structures locales, avec cependant un marquage politique fort.

Sur le monde politique, si les fédérations locales disposent d’un certain poids dans la prise de quelques décisions d’importance, l’essentiel des orientations reste définit au sein des bureaux nationaux. Le monde associatif étudiant donne donc à voir une modélisation plus originale en regard du fonctionnement des autres organisations de représentation collectives présentes dans le monde social, et bouscule les pratiques à l’œuvre dans ces dernières.

En interne et dans ses relations interstructurelles, l’échange et la logique de mutualisation d’expériences prédominent. Ainsi, pour Lionel, président de l’A.F.G.E.S. (Association Fédérative Générale des Etudiants de Strasbourg), « l’A.F.G.E.S., la plus vieille fédération de France, est aussi là pour conseiller les fédérations plus jeunes qui ont besoin d’expérience. Inversement, nous profitons souvent de leur dynamisme car elles ont une plus grande capacité à se remettre en question » ( 214 ). Lors des sessions de formations que nous avons organisées au cours de mes présidences successives de la F.E.D.I.U.T. – Région Rhône Alpes, un même processus est à l’œuvre : les formateurs sont pour l’essentiel des responsables d’associations étudiantes disposant de quelques années d’expérience. Leur rôle est alors de transmettre celle-ci aux nouveaux membres des structures locales. Les activités quotidiennes de notre fédération incluaient aussi d’importants échanges avec les associations fédérées, pour les conseiller dans le montage de projets, la recherche de financement, le démarchage de partenaires, …

Une telle modélisation de la construction fédérative ainsi que des relations entre les structures locales se retrouve rapidement en phase avec les attentes du terrain. Ainsi, lorsque l’on observe les résultats aux élections C.N.E.S.E.R. et C.N.O.U.S. au cours de la période allant de 1983 à 2002, il apparaît une vraie transformation des votes étudiants ( 215 ). Ces élections retraduisent par écho le poids grandissant que prend le mouvement associatif étudiant dans la représentation politique de cette catégorie de population (cf. graphique n°15).

Si l’on s’intéresse tout d’abord uniquement à l’aire d’influence du mouvement associatif étudiant, on remarque tout d’abord qu’entre 1983 et 1989, le score de ce dernier double, et grimpe de 7,17 % des suffrages exprimés à 15,37 %. Nous sommes entre ces deux périodes passés d’une bannière associative nationale C.N.E.F. à une bannière F.A.G.E. (lignes vertes). L’intérêt des étudiants et des élus étudiants en Conseils pour cette nouvelle organisation est donc évident.

Cependant, l’observation sur vingt ans du poids représentatif de chaque tendance sur le monde étudiant fait apparaître une évolution inédite et plus intéressante encore. De 1983 à 2002, l’aire d’influence des organisations de gauche (en rose sur le graphique) est passée de 62.39 % de la population étudiante à 44.6 %. Au cours de cette même période, l’audience des structures politico-syndicales de droite chute tendanciellement elle aussi, moins fortement cependant (en bleu sur le graphique). Les courants de gauche perdent ainsi entre 1983 et 2002 environ 18 % d’audience, tandis que ceux de droite ne perdent
que 1 %.

Graphique n°15 : Evolution des votes étudiants
Graphique n°15 : Evolution des votes étudiants aux élections CNESER/CNOUS (moyenne).

Sources : Histoire des associations étudiantes françaises, Archives de la F.A.G.E. ( 216 ). Archives du C.N.O.U.S.

Les cases en roses correspondent aux organisations étudiantes se classant plutôt à gauche de l’échiquier politique. Les cases bleues correspondent aux organisations plutôt à droite. Les cases vertes au centre correspondent aux différentes organisations se raccrochant au mouvement associatif étudiant. Les cases grisées correspondent aux organisations inexistantes aux instants observés. Les cases « divers » en bas du tableau regroupent les organisations inclassables dans l’une ou l’autre des catégories précédentes. Les pourcentages donnés correspondent à la moyenne des scores C.N.E.S.E.R. + C.N.O.U.S. de chaque organisation. Il est à noter que certaines organisations ne se présentent pas aux deux élections (cas de P.S.A. notamment qui ne se présente qu’au C.N.E.S.E.R., ou de l’U.N.E.F.-I.D. au C.N.O.U.S. en 1987). On peut cependant admettre que les électeurs de l’U.N.E.F.-I.D. apporteront leur soutien à des organisations de gauche et pas de droite, augmentant de fait le score des premières (report de voix) et rééquilibrant peu ou prou les scores du bloc de la tendance (rose, bleu, vert).

En revanche, l’audience des listes associatives (en vert sur le
graphique n°15) s’est, elle, considérablement accrue, en étant multipliée par plus de cinq au cours de la même période. Le pourcentage des voix obtenues par les listes associatives pour les deux élections conjointes C.N.E.S.E.R. / C.N.O.U.S. passe ainsi de 7.17 % en 1983 à 15.37 % en 1989 (création de la F.A.G.E.) puis à 37.02 % en 2002.

La dynamique qui anime le mouvement associatif à partir de 1989 tranche de fait fortement avec « l’apolitisme de droite » connu lors de la précédente période. L’affirmation de la dimension politique des associations étudiantes à partir de la fin des années quatre-vingt confirme que le monde étudiant ne s’est pas converti aux pratiques gestionnaires et à la pensée socialiste, pas plus qu’à la pensée libérale. Bien au contraire, il est à la recherche d’une nouvelle manière d’appréhender le politique, se retraduisant par l’expansion importante de la représentation politique du mouvement associatif apartisan. Un véritable changement de dynamique dans l’action politique se donne donc à voir dans le milieu étudiant, qui ne semble pas avoir encore trouvé de véritable retranscription à ce jour ni dans le syndicalisme, ni dans la représentation élective républicaine.

Cette progression importante du poids politique du mouvement associatif étudiant est retraducteur de l’adéquation qui s’affirme entre associations de terrain et structure fédérative nationale. Les premières, se sentant plus impliquées dans la dynamique nationale, se mobilisent pour être présentes politiquement localement. Elles mobilisent dans le même temps leurs élus pour faire reconnaître la perspective associative représentée par la nouvelle fédération nationale. Comme l’explique à ce titre Romain, président de la Fédé B (Fédération des Etudiants de Brest), « C’est parce que nous défendons les mêmes valeurs que nous nous reconnaissons dans cette structure. C’est parce que nous nous reconnaissons dans cette structure que nous avons ce désir de travailler avec les fédérations qui nous entoure pour nous faire vivre. Tant que nous continuerons à vouloir défendre les même choses, et à vouloir travailler pour un même projet, il existera toujours une dynamique pour faire avancer la structure » ( 217 ). C’est animé de cette philosophie que nous avons mobilisé plusieurs années durant les étudiants d’I.U.T. des différents campus de la région Rhône-Alpes, lors des différents scrutins étudiants. Les scores obtenus nous ont permis de disposer, pendant plus de six années consécutives, d’une dizaine d’élus dans les C.A. et C.E.V.U. des universités rhônalpines, ainsi que d’un élu au C.R.O.U.S. de Lyon Saint-Etienne. Nos importants scores électoraux aux scrutins de 1995 et 1997 sur Lyon I ont même réussi à faire disparaître du paysage syndical étudiant local l’U.N.I. (peu implanté), l’U.N.E.F.-R.E., et n’a laissé à chaque fois à l’U.N.E.F.-I.D. qu’un seul siège, au C.E.V.U.

Ces réussites importantes amènent la F.A.G.E. à développer et structurer rapidement son activité : en 1994, elle embauche son premier salarié, et installe celui-ci dans son nouveau siège social à Reims.

C’est dans ce contexte qu’est publié, sous la forme d’un décret, le Contrat d’Insertion Professionnelle, en février 1994. Remettant en cause l’identité et le devenir professionnel de nombreuses filières dont les I.U.T., ce décret se heurte très vite à une opposition étudiante nombreuse. Celle-ci est dans une large mesure emmenée par les étudiants d’I.U.T. Si la F.A.G.E. n’appelle pas à manifester de manière officielle, elle recommande en revanche à ses fédérations locales de se faire acteur du mouvement ( 218 ), rejoignant en cela d’anciennes pratiques de l’U.N.E.F. (cf. chapitre I).

Mais cette remise en cause de la professionnalité trouve aussi comme conséquence la révélation au grand jour des dissensions internes de cette nouvelle fédération nationale, par la scission entre les fédérations de villes regroupées en son sein, et quelques mono-disciplinaires de filière à l’identité
pré-professionnelle forte.

Malgré l'essai F.A.G.E.M., trois mono-disciplinaires se regroupent pour penser une structure alternative, P.D.E. (Promotion et Défense des Etudiants). Celle-ci se veut plus axée sur les mono-disciplinaires. P.D.E., naît donc en 1994 ; c’est un regroupement à la fois de structures historiques (Pharmacie, Droit), auxquelles s’adjoignent de toutes nouvelles mono-disciplinaires : la F.N.E.B. (Biologie), puis quelques temps plus tard, l’U.N.A.E.S. (filière A.E.S.).

Cette séparation est d’abord la conséquence de la guerre de tranchée que se livrent depuis sa création les mutuelles étudiantes pour le contrôle de la F.A.G.E. En effet, celle-ci s’est construite et développée dans ses premières années à travers une bataille entre les deux principales mutuelles régionales, la S.M.E.R.R.A. et la S.M.E.R.E.P. ( 219 ). Ces deux structures ont eu pendant un certain nombre d’années d’ardents défenseurs parmi les responsables associatifs étudiants membres de la F.A.G.E., conduisant à l’apparition d’intérêts antagonistes lors des élections aux instances décisionnelles de cette organisation. Ces différentes structures de l’U.S.E.M. s’opposeront vigoureusement pour tenter de prendre le contrôle de la F.A.G.E. via les élections au Bureau National. En 1996, la F.A.G.E. signe son premier partenariat avec la M.N.E.F. et prend alors son indépendance par rapport à ces partenaires particuliers.

Ainsi, en raison de sa perte progressive et inéluctable d’influence sur le devenir de la F.A.G.E., la S.M.E.R.R.A. organise en contre-réaction la naissance puis le développement de P.D.E. La F.A.G.E. recentre ses rapports autour d’une relation conjointe avec la S.M.E.S.O., la M.G.E.L. et la S.M.E.R.E.P., puis la M.N.E.F. jusqu’à la disparition de celle-ci.

Constituée au départ pour l’essentiel d’organisations originaires de l’aire géographique de cette mutuelle régionale (Lyon, Clermont-Ferrand, …) et de ses filières d’influence principales (Médecine, Droit), P.D.E. perdure depuis, sous la forme d’une antenne semi-indépendante de cette mutuelle, constituant en quelque sorte le bras politique étudiant de cette dernière.

Il existe ensuite un lien commun à toutes ces mono-disciplinaires scissionnistes, pourtant au départ fortement différentes : l'identité de filière, c’est-à-dire l’identité pré-professionnelle. L'U.N.E.D.E.S.E.P. (mono-disciplinaire de Droit), comme l'A.N.E.P.F. (mono-disciplinaire de Pharmacie), sont des structures anciennes héritées des « majos » de l'U.N.E.F. et des corpos de la F.N.E.F. Elles se trouvent confrontées à cette époque à la croissance de
mono-disciplinaires étudiantes nouvelles (Géographie, Histoire, Sciences, …), qui n'hésitent pas à revendiquer une place équivalente à la leur, ou à remettre en cause les systèmes d'organisation et les rapports de force auparavant établis. Comme le montre par ailleurs Bert Klanderman dans le cas des processus de désengagement des militants, les changements de contexte qui s’opèrent sur le milieu associatif étudiant « provoquent … une baisse de l’identification au mouvement ». Celle-ci conduit alors les responsables de certaines organisations anciennes à penser la sécession ( 220 ).

La F.N.E.B., puis plus tard l'U.N.A.E.S., se trouvent elles aussi assez étonnamment devoir partager des points de vue identiques, à partir d'une analyse totalement différente. Ces deux filières sont en effet depuis plusieurs années confrontées à des difficultés récurrentes d'insertion professionnelle de leurs diplômés. Leur reconnaissance institutionnelle est limitée, faisant presque figure de « parent pauvre » de l’Enseignement Supérieur. En recherche de légitimité, les représentants nationaux de ces deux dernières filières réclament ainsi l’instauration du numerus clausus au sein de toutes les filières universitaires, à l’instar des représentants étudiants des filières Médecine et Droit, lors des Etats généraux des Universités de 1995. Le besoin d'affirmer son identité par sa professionnalité fait ainsi se rejoindre ces quelques
mono-disciplinaires dans la construction d'un projet alternatif, dans lequel sont fortement effacées les fédérations de ville, structures par essence pluridisciplinaires.

Cette opposition qui naît au coeur du tout jeune mouvement associatif étudiant, s’il n’est pas dénué d’intérêts financiers ( 221 ), retranscrit donc aussi les transformations sociales à l'oeuvre dans la société telles qu'elles ont eu lieu entre 1960 et 1990, et dont le monde associatif se fait l'écho en même temps qu'il y participe. S’opposent alors deux visions véritablement différentes du monde associatif étudiant, ainsi que deux approches du rôle de l’association étudiante dans la construction du social. L'une transversale, développée par la F.A.G.E., s'appuie sur le tissu associatif local et son hétérogénéité. L'autre, sectorielle, développée par P.D.E., s'appuie sur la dimension nationale des filières et leur homogénéité.

A partir de 1994, les deux structures vont cohabiter, créant ça et là des zones d'opposition locales entre les associations dès que celles-ci prennent part aux élections étudiantes ( 222 ). Ainsi, en temps que représentant des associations d’I.U.T. de Lyon travaillant avec la F.A.G.E. à partir de 1995, nous serons rapidement mis au ban des associations étudiantes de Lyon par une large partie des autres structures étudiantes lyonnaises de l’époque : la F.E.L. (Fédération des Etudiants Lyonnais) étant l’un des piliers fondateurs de P.D.E., l’essentiel de ses associations membres entre dans une opposition avec la F.A.G.E. et ses partenaires.

Dans les mois qui suivent cette séparation, eurent lieu les élections nationales C.N.E.S.E.R. et C.N.O.U.S. Celles-ci furent l’occasion pour le secteur associatif dans son ensemble de faire montre de son implantation sur le terrain, ainsi que de sa représentativité. En même temps, le secteur associatif étudiant renouait avec une pratique du pouvoir institutionnel national dont il avait été éloigné pendant longtemps. En effet, son bon score aux élections C.N.E.S.E.R. de 1994 permet à la F.A.G.E. d’être à nouveau présente en section permanente du C.N.E.S.E.R. Les associations étudiantes n’y étaient plus représentées depuis 1983.

En terme de pourcentage de votants, l’U.N.E.F.-I.D. perd pour la première fois la première place aux élections C.N.E.S.E.R., au profit du mouvement associatif emmené par la F.A.G.E. (U.N.E.F.-I.D. : 25.98 % des voix,
F.A.G.E. : 29.12 %). Si ce n’est pas le début d’un retournement dans la représentation étudiante nationale au profit des associations étudiantes, la dynamique qui se met en œuvre dès cette époque se poursuivra cependant invariablement au fur et à mesure des scrutins successifs. Le monde associatif étudiant s’ancre fortement dans la représentation nationale à partir de cette période (cf. graphique n°15).

La F.A.G.E. couple son institutionnalisation avec une intensification des relations avec les associations locales. 1995 est l’année de la première édition du Guide Réflexe, guide d’accueil pour les étudiants à diffusion nationale, ainsi que de la première édition des Assoliades, grande rencontre associative d’information, de formation, d’échanges et de travail pour les membres des associations étudiantes, jumelant ludique et formation.

En parallèle au développement d’une nouvelle approche de l’action politique, le mouvement associatif étudiant essaie de nouvelles pratiques de gestion économique. Ainsi, elle crée en 1996 F.A.G.E.-Assos-Service, centrale d’achat associative nationale au service des associations étudiantes. Comme l’énonce alors à l’époque Fabien Cluzel, membre du bureau de la F.A.G.E., cette structure doit être la « locomotive de l’économie sociale étudiante, au delà d’un militantisme syndical et associatif classique » ( 223 ). L’activité de services est entrevue comme outil pour le secteur associatif étudiant ainsi que comme vecteur fédérateur.

Cette expérience, fortement inscrite dans une dynamique capitaliste-informationnelle – F.A.G.E.-Assos-Service développe ses activités commerciales en s’appuyant sur le réseau associatif qu’elle mobilise via la F.A.G.E. - se soldera cependant par un échec. Celui-ci provient en partie d’une implication insuffisante des associations et fédérations dans les activités de la centrale, ainsi qu’à des tensions entre les axes de développements de la F.A.G.E. et les activités commerciales de F.A.G.E.-Assos-Service. Elle reste cependant une expérience positive car elle permet véritablement d’inscrire le monde associatif étudiant dans le cadre de l’économie sociale et solidaire. Elle fut surtout intéressante par sa tentative d’utilisation de l’économique à des fins de structurations politiques, processus qui réapparaîtra sans doute dans quelques temps dans le monde social.

L’échec de ce projet met cependant en évidence plusieurs dynamiques du secteur associatif étudiant :

  • les associations étudiantes privilégient les relations commerciales de proximité. Cette conclusion rejoint par ailleurs les résultats de nos travaux précédents concernant la place du monde associatif étudiant dans le développement local.
  • l’aspect économique n’est pas l’élément principal de la relation entre associations de terrain et fédération nationale.

Par la multiplication de ses partenaires économiques, la F.A.G.E. devient cependant un réseau économiquement puissant et reconnu. Dans le même temps, elle tisse en effet un réseau de relation en direction des administrations et des partenaires sociaux. Elle devient membre du C.N.A.J.E.P., participe aux travaux de la C.P.U., s’implique dans les questions relatives à l’insertion professionnelle des étudiants. En 1995, François Fillon, Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche assiste à la clôture des Assises Nationales de la F.A.G.E. Le ministre Bayrou viendra pour sa part au Congrès de Lille, en novembre 1996. L’institutionnalisation de la F.A.G.E. et du mouvement associatif étudiant est en marche.

L’enquête lancée l’année suivante par la F.A.G.E. (et qui sert de base à ces travaux) met alors en évidence l'incroyable diversité du secteur associatif étudiant. Indépendance, multiplicité, diversité, variété des projets et des actions constituent les maîtres-mots du nouveau monde associatif étudiant. Celui-ci tend dans le même temps à se faire plus flou, plus impénétrable et invisible que jamais. Il s'avère riche d'une multitude de structures, d'organisations formelles ou informelles qui animent, ici une promotion de D.E.S.S., là un groupe d'aides aux devoirs. Les pratiques changent, qui se rejoignent néanmoins dans quelques constantes : la fuite, plus que le rejet, des normes rationnelles et formalisées de la société moderne, l’affirmation de l’individu face à celles-ci notamment.

Au sein de cette multiplicité, la F.A.G.E. regroupe des associations étudiantes diverses et variées. Aujourd’hui, ses interlocuteurs s'accordent pour reconnaître à cette organisation un réseau d'environ 8 000 associations. Mais elle ne fédère guère à l'évidence qu'une petite partie du secteur associatif étudiant. Surtout, en l'état actuel des connaissances, il n'est pas possible de dire de manière précise quelles sont les associations non fédérées par la F.A.G.E. Au-delà des associations regroupées, fédérées ou reliées par un lien quelconque avec une structure institutionnalisée, il est en effet une myriade d'associations qui ne sont intégrées de manière formelle dans aucun réseau. C'est l'apparition et le développement de cette multitude informelle qui est en fait le réel phénomène associatif étudiant de ces dix dernières années. En quelque sorte, la F.A.G.E. et son réseau constituent simplement la face émergée principale de l’iceberg associatif étudiant.

P.D.E., en regroupant des associations clairement identifiées par leur profil pré-professionnel, s’insère dans une perspective plus restrictive. Bâtie sur un modèle confédéral autour des mono-disciplinaires membres, les associations qu’elle regroupe sont donc uniquement les associations membres des organisations disciplinaires. P.D.E. se constitue essentiellement sur la base d’associations de filières anciennes. En effet, comme le montre le tableau
ci-après, plus les structures sont jeunes, moins elles disposent d’une appétence marquée pour le système mono-disciplinaire (cf. graphique n°16).

Graphique n°16 : l’appartenance des associations de filières
Graphique n°16 : l’appartenance des associations de filières à un réseau mono-disciplinaire selon leur année de création.

Source : enquête propre. Les valeurs sont les pourcentages en ligne établis sur 877 observations. Ce tableau est construit sur la strate de population « filière » et contenant 877 observations.

Plus l’année de création des associations de filières est récente, moins elles souhaitent adhérer à un réseau disciplinaire. Ainsi, tandis que les associations de filières créées avant 1985 y adhèrent pour 37,9 % d’entre elles, celles créées après 1995 ne sont plus que 5,2 % à y adhérer. Les chiffres entre parenthèses, qui donnent les effectifs de population, montrent que ce déclin n’est pas dû à une simple faiblesse de l’échantillon d’étude, et confirment le moindre attrait des associations de bases pour ces organisations.

Des éléments contextuels expliquent en partie ce désamour pour ce type d’organisation. En effet, les difficultés constantes liées à l’emploi des jeunes se font plus clairement visibles dès le milieu des années quatre-vingt. Ces organisations s’avèrent, à l’instar du syndicalisme professionnel, incapables de faire face à la déstructuration sociale née de la plus grande flexibilité du travail. Le déclin de ces organisations coïncide en partie avec celui des syndicats professionnels. A l’évidence, l’activité professionnelle n’est plus entrevue comme facteur d’identité positive.

Ce phénomène rejoint aussi en partie la distanciation croissante des structures face aux réseaux identitaires marqués, telle que l’a mis en évidence notamment Ion dans « La fin des militants ? ». Le Nous de l’identité
pré-professionnelle cède ici la place à une multiplication des Je
multi-identitaires. Ces derniers se désaffectionnent des modalités classiques de l’engagement, de l’affiliation à la carte d’adhésion.

Ces processus s’accompagnent d’une spécialisation accrue des organisations. Ainsi, les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix voient un éclatement des structures représentatives existantes en des organisations plus spécifiques à un cursus, une filière. La F.N.E.B. est à ce titre un exemple révélateur. Alors qu’il existe une mono-disciplinaire de Sciences, l’A.F.N.E.U.S., qui se donne à charge de regrouper et de traiter toutes les problématiques liées aux études de Sciences, les étudiants de Biologie choisissent de se constituer en mono-disciplinaire autonome. Les filières de Santé ne sont pas exemptes de ce processus de parcellisation, malgré une tradition fondée sur l’esprit de corps. Ainsi, en 1997, naît l’I.S.N.A.R., intersyndicale nationale autonome des résidents, internes de médecine, qui ne se raccroche pas à l’A.N.E.M.F., structure pourtant antérieure bien implantée sur le milieu carabin.

La réalité de cette frange du monde associatif étudiant confirme qu’à l’échelle des organisations, spécialisation professionnelle ne rime pas forcément avec accroissement du potentiel de mobilisation. Le syndicalisme ouvrier l’a vécu, ses scissions successives n’ayant jamais ouvert la porte à une croissance des taux de syndicalisation, mais confortant en revanche les déclins en cours.

Le réseau AnimaFac, créé en 1996 apparaît plus flou, rendant tout dimensionnement délicat. Du reste, « dès l’origine, Anima’ fac a davantage mis l’accent sur sa fonction au sein du mouvement associatif que sur son identité propre. Ce flou définitionnel fut une caractéristique du projet » ( 224 ). Cette organisation se donne pour objectifs principaux la création d’outils pratiques au service des associations et une posture politique pour faire avancer la reconnaissance institutionnelle de l’action associative étudiante. Elle se présente statutairement comme une confédération associative, centre de ressources et d’échanges d’expérience pour les associations étudiantes.

Créée par des transfuges de l’U.N.E.F.-I.D. (cette organisation dispose de plusieurs sièges au sein du C.A d’AnimaFac), ce réseau s’appuie fortement sur la Ligue de l’Enseignement (celle-ci souhaite créer une représentation dans le secteur étudiant où elle n’est historiquement pas présente) pour assurer son développement. Les premières A.G. de ce réseau se feront par exemple pendant et avec le Congrès annuel de la Ligue. Les associations que ce réseau revendique regrouper disposent plutôt d’un profil « associations thématiques ».

Campus en Eté, évènementiel de formation organisé par AnimaFac, permet de mesurer partiellement l’aire d’influence de celle-ci dans le monde associatif étudiant. En 1996 et 1997, le nombre de participants fut peu élevé, essentiellement membres du réseau de l’A.F.E.V. (Association de la Fondation Etudiante pour la Ville, initiée par Christophe Borgel ancien responsable de l’U.N.E.F.-I.D.). En 2003, 120 structures étaient représentées.

Les thèmes des formations et ateliers proposés permettent de cerner plus précisément les associations qui évoluent au sein de ce réseau : Environnement, Culture, Solidarités locales, accueil étudiants étrangers, Europe, médias, préventions des risques, solidarité internationale, vie universitaire, vie associative, droit de l’Homme.

Diverses structures se côtoient à l’intérieur de ce réseau très fluide, et se rencontrent notamment lors des rassemblements de formation. Les organisations Génépi (éducation en milieu pénitentiaire), le réseau Moules frites (Gays et Lesbiens), les radios campus, le réseau Etudiants et Développement notamment participent à ces journées, à la fois en tant que formateurs et auditeurs. Les échanges sont privilégiés, dans le but de faire naître une interconnectivité propice à la création. Le réseau étant très flou, le Conseil d’Administration d’AnimaFac est composé de 14 associations élues pour représenter l’ensemble des structures.

Un journal, « Factuel, la Revue », édité à 5 000 exemplaires en 1998, sert de lien entre toutes ces structures. AnimaFac édite en outre chaque année un annuaire des associations étudiantes, rempli par ces dernières sur la base du volontariat mais aussi sur l’exploitation de fichiers généralistes (fichiers d’universités notamment) et faisant apparaître des associations membres de la F.A.G.E. Il comprend en 1998 environ 5 000 associations.

De part sa structuration, ce réseau ne se positionne pas en concurrence avec la F.A.G.E. ou P.D.E. Il existe comme élément libre au sein de la nébuleuse associative étudiante et sert de point de ralliement à un certain nombre de structures envisageant moins leur place dans un des deux réseaux précédents. Le flou volontaire qui entoure cette organisation empêche une analyse plus serrée de celle-ci.

Il est à noter qu’AnimaFac ne marquera jamais de velléités particulières pour être présente sous quelque forme que ce soit au sein des instances de représentation du monde étudiant (C.A., C.E.V.U., …). Cette organisation s’est en revanche employée à se créer une place d’organisation représentative des étudiants au sein du F.N.D.V.A., avec le Ministère de la Jeunesse et des Sports, … Abandonnant le terrain de l’Enseignement Supérieur aux organisations et syndicats étudiants en place, elle s’est pour sa part constituée au fil du temps une vraie place de représentant étudiant dans les sphères extérieures à l’Education Nationale.

A partir de 1997, la F.A.G.E. entre dans une période plus adulte de son développement. Ainsi, elle participe cette année-là aux élections du Bureau National de la M.N.E.F. S’émancipant totalement de la tutelle des M.E.R., l’organisation prend un pied dans la gestion de la sécurité sociale étudiante, en même temps qu’elle tente de sauvegarder un acquis de la grande U.N.E.F. La F.A.G.E. mobilise pour se faire son réseau, et ouvre la problématique en direction des structures membres de P.D.E. Les résultats ne seront cependant pas à la hauteur de ses espoirs, tant sur la mobilisation des associations membres de P.D.E. que sur la direction de la M.N.E.F.

Néanmoins, un an plus tard, la M.N.E.F. étant liquidée, la F.A.G.E. s’investit dans la construction d’un partenariat avec la M.G.E.N. et la F.N.M.F. (Fédération Nationale de la Mutualité Française) pour créer la L.M.D.E. Elle ne s’engage cependant pas en propre et préfère garder une indépendance d’action, ainsi que sauvegarder une certaine latitude de discussion avec les autres mutuelles étudiantes. Elle s’oriente vers un nouveau type de relation avec ces organisations, mêlant participation, partenariat et indépendance.

Sur cette base, elle organise des nouveaux rapports avec les partenaires sociaux. Ainsi, elle participe dès 1997 aux travaux de l’Intersyndicale, structure informelle d’échanges entre les partenaires sociaux sur les problématiques sociales dans le but d’élaborer des propositions conjointes. A la différence de P.D.E. notamment, elle considère que la participation à ce type de réunion peut être utile aux étudiants. Pragmatique et modérée, loin de positionnements idéologiques « la nature de ses relations avec les institutions est à l’évidence déterminée par un souci de résultats, et non par les envolées lyriques de postures idéologiques » ( 225 ). Elle donne ici à voir la forme nouvelle des participations des organisations associatives aux instances politiques, intervenant dans un objectif de résultats tangibles et concrets, sans référence à une utopie, un discours.

Au cours des années qui suivent, les tensions anciennes s’effacent progressivement. Le conflit récurrent entre mono-disciplinaires et la F.A.G.E. s’estompe, notamment face au poids grandissant que prend l’organisation, tant sur le local que sur le terrain institutionnel. Quelques mono-disciplinaires quitteront tantôt la F.A.G.E. pour rejoindre P.D.E., tantôt opéreront le chemin inverse. Il ne reste cependant aujourd’hui que quatre mono-disciplinaires au sein de P.D.E., qui dispose encore d’un certain pouvoir de mobilisation, notamment autour de ses bastions historiques. Afin d’intégrer les mono-disciplinaires dans la gestion de la F.A.G.E., un collège spécial leur est créé, détenteur de 50 % des voix au conseil d’administration. Dans le même temps, le poids important de Paris se voit limitée à 25 % maximum du collège électoral. Un équilibre nouveau émerge, entre mono-disciplinaires et fédérations locales.

Ces réorganisations et ces nouveaux rapports de force entre organisations découlent d’une plus grande permissivité des structures entre elles, de part l’augmentation de l’intercommunication. Journées de formation qui sont autant de moments de rencontres, évènements festifs comme les Assoliades (journées de rencontres et de débats entre associations étudiantes organisées par la F.A.G.E.), mais aussi téléphone, fax, Internet, tous ces vecteurs de communication entre associations démultiplient les échanges et gomment les divergences.

La F.A.G.E. donne aujourd’hui à voir des dynamiques nouvelles, fondées sur une combinaison progressive du process d’individuation des associations thématiques, du modèle gestionnaire des fédérations et défense d’intérêts corporatifs et syndicaux des mono-disciplinaires. Ainsi, la F.A.G.E., en intégrant peu à peu ces dernières par un travail en partenariat, ouvre ces dernières à de nouvelles problématiques plus sociales, celles-ci n’étant plus désormais uniquement intéressées par des intérêts corporatistes. Si chacun garde son indépendance, tous travaillent néanmoins dans une même dynamique. Le secteur associatif étudiant regroupé au sein de la F.A.G.E. se fait ici fortement innovant, participant de l’émergence de nouvelles complémentarités structurelles entre organisations et modes de pensées. Il institutionnalise progressivement ces évolutions, par la continuité dont elles disposent, et transforment à ce titre les formes de l’engagement collectif des individus dans le monde social.

Dans le même temps, la F.A.G.E. affirme explicitement ses valeurs sociales, en prenant position sur un certain nombre de débats de société. Elle s’implique à ce titre lors de l’élection présidentielle de 2002. Mais au-delà de ce positionnement politique de bon sens, elle affirme aussi son opposition à la guerre en Irak ou son implication dans le commerce équitable. Si la F.A.G.E. rejoint dans ce type de pratiques des positionnements pris à une époque antérieure par l’U.N.E.F. notamment lors de la guerre d’Algérie, elle dépasse cependant cette dernière en s’impliquant dans des problématiques de relations internationales moins de cinq ans après son émergence ( 226 ). Le mouvement associatif étudiant met alors en jeu une radicalité novatrice des mises en cause et des modes d’action, créant une concurrence aux syndicats et aux partis sur leurs propres terrains. A ce titre, il participe totalement de l’affirmation d’une conscience humaine internationale, en même temps qu’il défend ici des valeurs humanistes internationales fortes.

L’histoire de P.D.E. entre 1996 et aujourd’hui s’écrit fortement en décalque de celle de la F.A.G.E. Dès les premiers instants de son développement, elle s’affiche comme une organisation apolitique, corporatiste, aconfessionnelle et anti-syndicale. Tandis que la F.A.G.E. s’éloigne volontairement de toute référence au corporatisme, tandis qu’elle accepte d’être un acteur de l’Intersyndicale et prend progressivement l’assurance de s’affirmer structure syndicalo-associative, P.D.E. se recentre de plus en plus durement autour des valeurs contraires. Son développement l’amène cependant ces dernières années à adopter un fonctionnement de plus en plus syndical, plus en cohérence avec son aire d’influence institutionnelle ; ceci ne l’empêche nullement cependant de poursuivre sa rhétorique anti-syndicale.

Depuis l’embauche par la F.A.G.E. de ses premiers salariés (emplois-jeunes sur des postes de cadres et de structuration) en 1997 (salariés liés à son développement, la F.A.G.E. ayant déjà trois salariés pour son secrétariat, de type C.E.S. depuis 1995), P.D.E. s’oppose à l’emploi de salariés au sein des organisations associatives sur la base de la pureté du bénévolat. La F.A.G.E. ayant pris position en faveur de la Constitution Européenne puis sur différents sujets de société, P.D.E. affirme son rejet envers tout positionnement de ce type.

En 1998, tandis que l’A.N.E.M.F. abandonne définitivement P.D.E. pour rejoindre la F.A.G.E., l’élu C.N.E.S.E.R. de la F.A.G.E. issu de l’U.N.A.E.S. prend l’étiquette P.D.E. et ne démissionne pas de son poste. P.D.E. dispose alors de deux sièges au C.N.E.S.E.R. sur onze. Dans le même temps, cette organisation se présente pour la première fois aux élections C.N.O.U.S. et obtient un élu. Une tentative de travail commun sera opérée en 2000 lors des élections C.N.O.U.S., sans grand succès. En 2003, P.D.E. obtient un nouvel élu C.N.E.S.E.R., le B.N.E.I. quittant la F.A.G.E. pour adhérer à P.D.E. L’élu F.A.G.E. du C.N.E.S.E.R. issu du B.N.E.I. change là encore d’étiquette, sans démissionner de son poste. Le phénomène se reproduira une nouvelle fois en 2008 ( 227 ). Pour énorme et inédit que cela soit apparu alors, les ralliements inattendus que les dernières élections présidentielles ont donné à voir (cas de M. Besson notamment) incitent maintenant à penser la dimension préfigurative du monde associatif étudiant dans les nouvelles modalités de désengagement des individus dans le monde social.

Au fil des années, si l’on exclue les transfuges élus sur listes F.A.G.E. basculant ensuite pour P.D.E., la représentativité de P.D.E. varie peu, et reste à un siège au C.N.E.S.E.R. et au C.N.O.U.S.

Niche identitaire des corporations et mono-disciplinaires sur des bases traditionalistes, cette organisation entretient avec les mutuelles étudiantes régionales et notamment la S.M.E.R.R.A. des relations très fortes. Ainsi, le salarié de la F.E.L. (Fédération des Etudiants Lyonnais, structure pilier et fondatrice de P.D.E.) aura été pendant de nombreuses années entièrement financé par la S.M.E.R.R.A. Le déclin de la Fédération des Etudiants Lyonnais après 2005 contribuera cependant à donner un coup d’arrêt au développement de P.D.E.

L’actualité récente qui secoue aujourd’hui P.D.E. confirme cette tendance. Traditionnellement proche des mutuelles régionales, ces dernières ont au fil du temps pris un poids démesuré au sein de l’organisation, empêtrant son avancée. Ainsi, quelques semaines seulement après l’élection d’Alexandre Bocquillon à la tête de cette organisation (février 2005), deux tendances internes émergent pour s’affronter fortement. Une première défend les couleurs de la S.M.E.R.E.P., tandis que la seconde promeut les intérêts de la S.M.E.R.R.A. Si ces deux courants n’ont pas fait à ce jour éclater l’organisation, et si le statu quo se maintient encore aujourd’hui, il est davantage dû à la pression en interne de l’ancien président Jérôme Mourroux qui, encore très présent dans l’organisation, a toujours été très soucieux de faire de P.D.E. pendant ses cinq mandats successifs un outil efficient et vivant pour l’ensemble des mutuelles régionales.

Enfin, le réseau AnimaFac se développe après 1997 dans la continuité de ses premières années, et se concentre sur les associations thématiques. Dans un parallélisme de philosophie avec la Ligue, il accentue son action en matière de formation et de pédagogie. L’objectif de ce réseau est de développer « une véritable pédagogie de réseau, de créer des passerelles … afin d’éviter le cloisonnement » des associations sur leur activité ( 228 ). Des séminaires de formation spécifiques apparaissent à partir de 1998, permettant aux participants d’approfondir leurs connaissances sur la thématique de leur activité. Cherchant à faire reconnaître le rôle de l’expérience associative étudiante dans la société civile, AnimaFac développe une communication institutionnelle importante par le biais de son journal, auquel se sont ajoutés au fil du temps une revue mensuelle, des dossiers thématiques, une lettre d’actualité, des guides pratiques, une newsletter, ...

Afin de mettre en lumière l’investissement associatif étudiant, AnimaFac élabore des projets nouveaux, à forte vocation communicationnelle : Prix étudiant du livre politique, Prix de l’initiative étudiante, Forum étudiant de l’engagement civique, … où sont conviés des institutionnels de haut niveau ainsi que la presse. Elle organise aussi une série d’émissions avec TV5 et met en place à partir de 1999 un appel à projets sur des thématiques inexistantes ou à mettre en oeuvre sur le milieu étudiant. L’objectif affirmé reste la médiatisation de la vitalité associative étudiante, afin de montrer que celle-ci est un moteur pour la société civile. Cet objectif se heurte cependant à l’extrême fluidité revendiquée du réseau, malgré l’embauche de salariés à la fin des années quatre-vingt-dix.

Il ressort au final de l’observation globale du mouvement associatif étudiant un sentiment de fluidité et de furtivité. Ce dernier apparaît difficile à appréhender, à quantifier, à mesurer. Les trois réseaux cités évoluent sur des mondes parallèles qui s’interpénètrent parfois sans que les organes directeurs en soient conscients.

De part la présence de l’enquête sur laquelle nous travaillons, il devient possible d’explorer une facette de cette diversité, tout en étant conscient de ses atouts et de ses limites :

  • elle retrace le fonctionnement des organisations les plus structurées et les plus visibles. En tant que telle, elles donnent à voir les archétypes et les associations les plus à même de donner matière à décryptage des tendances actuelles du fonctionnement associatif étudiant.
  • les organisations les plus fluides n’apparaissent pas dans les résultats de cette enquête. Un des pans au moins du monde associatif étudiant sera donc sous-représenté dans nos résultats. Il est possible que certaines dynamiques en gestation ou à l’œuvre dans ces organisations restent pour nous invisibles.

Les suites du développement du mouvement associatif étudiant se feront conjointement sur les trois réseaux. Cependant, le réseau de la F.A.G.E. reste le plus visible. Aussi, pour la suite de nos travaux, nous utiliserons plus souvent les avancées et dynamiques mises en évidence par celui-ci.

Notes
201.

( ) Source : archives de la F.A.G.E.

202.

( ) « La F.A.G.E. a pour but de représenter : les associations d'étudiants ..., leurs adhérents ... », statuts de la F.A.G.E. de décembre 1989. Archives de la F.A.G.E.

203.

( ) A ce titre, le P.V. de la réunion constitutive de la future fédération des associations étudiantes du 20 Novembre 1989 retranscrit pleinement la teneur passionnée des débats qu’a fait naître le choix du nom. « … la discussion débute d’emblée sur le nom de la future structure : Nantes attache beaucoup d’importance au nom d’U.N.A.G.E.F., estimant que ce nom à lui seul affirme et contribue à asseoir l’idée qui constitue le fondement du projet, à savoir une structure basée sur les associations pluridisciplinaires locales. Eric Bauer demande s’il est préférable de cultiver ou bien au contraire de se méfier de l’assonance avec les noms d’autres syndicats étudiants, l’U.N.E.F.-I.D. et –S.E. pour ne pas les nommer ; on pourrait autant y perdre des élus qu’en gagner, d’autant plus qu’une telle ressemblance facilite quantité de récupérations, détournements d’affiches par exemple, il suffit de masquer quelques lettres … la réciproque n’est pas vraie. D’autres noms sont proposés : F.N.A.G.E. (Fédération Nationales des Assemblées générales d’Etudiants, C.L.A.G.E.F. (Comité de Liaison des Assemblées Générales des Etudiants de France), U.F.E.F. (Union Fédérative des Etudiants de France, et jusqu’à F.A.G.E. ( Fédération des A.G.E), sigle surgi du fond des âges, c’est-à-dire du cerveau fertile de François Scherrer, ancien grand amicaliste strasbourgeois, à l’époque où, déjà, on s’essayait à imaginer des moyens pour pallier les (chroniques) défaillances de la C.N.E.F. ». Au final, les aspects formels et visibles du mythe de la grande U.N.E.F. s’estompent au profit d’une identité nouvelle différente. P.V. de la réunion constitutive de l’U.N.A.G.E.F., dimanche 20 Novembre 1989. Source : archives de la F.A.G.E.

204.

( ) Résultats issus de notre enquête.

205.

( ) Mai 1991, Fédération des Associations Etudiantes et Mono disciplinaires.

206.

( ) Article 3 du règlement intérieur de la F.A.G.E. du 12 Décembre 1989 – Archives de la F.A.G.E.

207.

( ) En moyenne, les fédérations locales regroupent une quinzaine d’associations en tout genre
(cf. annexe n°4 : fédérations locales et taille de villes).

208.

( ) Association Fédérative des Etudiants de Haute Alsace.

209.

( ) Décisions Etudiantes n°88, novembre 2004, p 9.

210.

( ) BIARD Romain, ancien Vice-président de la Fédération des Etudiants de Brest, Décisions Etudiantes n°88, novembre 2004, p 8.

211.

( ) Décisions Etudiantes n°88, novembre 2004, p 8.

212.

( ) Statuts de la F.A.G.E.M., mars 1991 et de la F.A.G.E., décembre 1993 – Archives de la F.A.G.E.

213.

( ) MELUCCI Alberto, Mouvements sociaux, mouvements post-politiques, revue internationale d’action communautaire, in FILLIEULE Olivier et PECHU Cécile, Lutter ensemble, L’Harmattan, 2008, p 142.

214.

( ) Décisions Etudiantes n°88, novembre 2004, p 8.

215.

( ) Pour chacune de ces deux élections, seuls les grands électeurs – c’est-à-dire des étudiants déjà élus soit dans un conseil d’université, soit dans un C.R.O.U.S. – peuvent voter. S’il ne s’agit donc pas d’un suffrage direct de la part des étudiants, le nombre de voix qu’obtient chaque organisation est directement fonction du nombre d’élus dont elle dispose sur le terrain. Ces derniers étant pour chaque site fonction du nombre de voix étudiantes obtenues, une progression ou une diminution du nombre de votants pour une liste impacte directement son nombre de voix pour les élections C.N.E.S.E.R. et C.N.O.U.S.

216.

( ) C.N.E.F. : Collectif National des Etudiants de France ; F.A.G.E. : Fédération des Associations Générales Etudiantes ; P.D.E. : Promotion et Défense des Etudiants.

217.

( ) Décisions Etudiantes n°88, novembre 2004, p 9.

218.

( ) A la suite de ces mouvements, elle se fera moteur pour apporter une réponse plus en adéquation avec les problématiques de l’emploi des jeunes, en impulsant le projet de création de l’A.F.I.J., autour duquel viendront rapidement se fédérer un large panel de structures institutionnelles et autres syndicats. L’A.F.I.J. voit alors le jour, dès la rentrée 94.

219.

( ) Les règles de composition des C.A. des C.R.O.U.S. ainsi que du C.N.O.U.S. font que les élus étudiants désignent une ou plusieurs personnalités qualifiées qui siégent alors dans ces instances. C’est le seule moyen pour les mutuelles de siéger dans ces instances, qui dans le même temps sont habilités à décider au niveau national de l’octroi du titre de mutuelle étudiante.

220.

( ) KLANDERMAN Bert in FILLIEULE Olivier, sous la direction de, Le désengagement militant, Belin, 2005, p 97.

221.

( ) Le fait d’avoir des élus au C.N.E.S.E.R. ou au C.N.O.U.S. permet aux structures de disposer de subventions conséquentes de la part du Ministère, pour la formation des élus. Il est alors plus intéressant de se partager la totalité de l’enveloppe à deux ou trois, plutôt que de le faire à une dizaine. Ce facteur aura joué dans le choix des mono-disciplinaires anciennes de construire une structure alternative, notamment parce qu’elles étaient habituées à toucher auparavant ces subventions en direct, à l’époque de la F.N.E.F. et de la C.N.E.F.

222.

( ) Fluctuant au cours du temps, la répartition des mono-disciplinaires se fait aujourd’hui en deux groupes distincts. La F.A.G.E. travaille actuellement avec l’A.F.N.E.U.S. (Sciences), l’A.N.E.M.F. (Médecine), l'A.N.E.P.F. (Association Nationale des Etudiants en Pharmacie de France), l’A.N.E.S.F. (sage femmes), l’A.N.E.S.T.A.P.S. (Staps), la F.F.A.E.H. (Histoire & Arts), la F.N.E.G. (géographie), la F.N.E.K. (Kinésithérapie), la F.N.E.O. (Orthophonie), la F.N.E.S.I. (Infirmiers), la F.N.S.I.P. (internes Pharmacie), l’I.S.N.A.R. (Interne de Médecine), O.N.E. (langues & lettres), MIAGE Connexion, et l’U.N.E.C.D. (dentaire). P.D.E. regroupe pour sa part les mono-disciplinaires suivantes : le B.N.E.I. (Bureau National des Elèves Ingénieurs), la F.N.E.B. (Fédération Nationale des Etudiants en Biologie), l'U.N.E.D.E.S.E.P. (Union Nationale des Etudiants en Droit, gEstion, Sciences Economiques et Politiques), et l'U.N.E.G. (Union Nationale des Etudiants en Gestion).

223.

( ) CLUZEL Fabien, Fage-Assos-Service, La Revue de l’Université n°13, hiver 1997/1998.

224.

( ) Rapport à l’occasion de l’Assemblée Générale d’AnimaFac du 29 juin 1998. http://www.animafac.net

225.

( ) MOUGEL Jean-Baptiste, Qu’est ce que la F.A.G.E. ?, Editions Archipel, 2003, p 45.

226.

( ) Les premiers articles du « Décisions Etudiantes » liés aux actions humanitaires et au commerce international date de 1994 : Décisions Etudiantes n°2, novembre 1994, ainsi que Décisions Etudiantes n°3, décembre 1994.

227.

( ) L’existence de ces transfuges interroge sur la constitution même des listes de candidats que présente la F.A.G.E. à ces élections. Comment une organisation telle que la F.A.G.E., deuxième organisation étudiante peut-elle se faire prendre trois fois de suite dans les mêmes pièges ? En fait, le choix des étudiants sur les listes ainsi que leur placement en situation éligible ou non se jouent davantage sur l’individualité des candidats, et moins sur des règles de représentativité interne des mono-disciplinaires ou des fédérations membres de la F.A.G.E. Les personnalités, la façon de se présenter, de parler ont à chaque fois été des éléments déterminants. Ces trois transfuges étaient des étudiants cumulant déjà plusieurs mandats d’importance, disposant donc de réseaux et d’une aisance relationnelle forte. Ces qualités personnelles ont été à chaque fois déterminantes dans le choix de leur attribuer une position éligible sur ces listes, les qualités (réelles et/ou supposées) du sujet s’imposant sur le jeu des rapports entre organisations. Ces évènements montrent à quel point l’individualité du sujet constitue un élément déterminant dans la construction du mouvement associatif étudiant aujourd’hui.

228.

( ) www.animafac.fr.