Conclusions – enseignements - transition.

Les premiers regroupements des étudiants apparaissent vers la fin du XIXème. Ils prennent la forme de fédérations locales, des A.G.E., construites sous une forme associative. Leur nombre se multipliant peu à peu, ces A.G.E. décident de se regrouper en 1907 au sein d’une fédération nationale, l’U.N.E.F. Celle-ci n’exerce cependant jusqu’au début des années 1920 que peu d’influence sur les A.G.E.

Lors de cette première période de vie, les A.G.E. de l’U.N.E.F. se concentrent sur des activités folkloriques et récréatives. Cette posture est alimentée par l’individualisme mondain qui caractérise les rares étudiants de l’époque et le paternalisme bienveillant du corps professoral. Les structures ne participent à aucune forme d’agir politique, ce qui n’exclut en rien certaines participations étudiantes intuitu personae, notamment lors de l’affaire Dreyfus. Les étudiants participent alors à la construction du modèle de l’intellectuel engagé qui prévaudra tout au long du XXème siècle. Ils participent aussi à l’institutionnalisation de la manifestation publique comme processus d’expression de la parole sociale.

La première guerre mondiale et ses conséquences sur les individus viennent remodeler de fond en comble les postures antérieures. Les difficultés sociales et financières vécues par les étudiants, l’émergence d’un sentiment de risque face à l’avenir en matière de futur sociétal (difficulté à établir la paix) comme personnel (encombrement de certaines carrières) transforment le rapport entre étudiants et collectifs. Avec la naissance de « l’étudiant pauvre », l’U.N.E.F. et les A.G.E. entrent dans leur seconde phase de vie, la phase corporatiste.

Sur le plan politique et dans la construction de ses rapports aux institutions, le réseau associatif étudiant reste dans une position neutre et respectueuse, s’appuyant sur deux axes forts, patriotisme et paternalisme. Il participe à l’affirmation de l’Etat-Nation à l’instar des autres groupements intermédiaires de cette époque.

D’un point de vue pratique, les organisations étudiantes prennent la forme de sociétés de secours mutuelles, telles que le monde ouvrier peut en donner à voir à cette époque. A la différence du mouvement ouvrier cependant, le mouvement associatif étudiant fonde son action sur la base de quatre piliers que sont la logique solidaire, le paternalisme social, la philosophie chrétienne et les valeurs républicaines et laïques.

Le réseau associatif étudiant s’affirme comme une construction très atypique pour l’époque, qui se concentre sur l’actualité et le devenir de l’étudiant. Cette posture, en excluant la place de l’étudiant dans la société, et donc toute perspective politique, lui permet de conserver une unité entre toutes ces tendances internes. Dans le même temps, le mouvement associatif étudiant formalise les risques encourus par les étudiants, créant une unité de ces derniers pour la défense de leur sauvegarde.

Le rapport individu/organisation est en revanche similaire à ce qui se donne à voir dans les autres organisations du monde social. A leur instar, les A.G.E. développent une forte politique d’adhésion et des cartes d’engagements. L’individu est effacé par le groupe, qui prend à cette époque toute sa dimension. Les A.G.E. locales sont elles-mêmes dans un processus fort d’adhésion : le nombre de cartes vendues détermine le poids électoral de chaque A.G.E. lors des Congrès de l’U.N. Sur ce rapport, le mouvement associatif étudiant est un reflet de son temps, à la différence près que l’étudiant n’est pas enfermé dans un schème conceptuel, une utopie particulière. Toutes les utopies ayant droit de cité au sein de ce mouvement, sur la base d’un consensus non dit où aucune ne dispose d’une préséance sur les autres, une place plus grande est donc laissée aux projets.

Ce consensus interne, allié à une ambition de prévention des risques pour les étudiants, permet rapidement au mouvement associatif étudiant de développer des initiatives innovantes. Celles-ci, en s’institutionnalisant progressivement, vont conduire quelques années plus tard à des transformations dans les modes d’engagement collectif des individus dans le monde social, ainsi que dans les modalités d’action de l’Etat. Participant à l’expansion des modèles d’organisation en vigueur à son époque, le mouvement associatif étudiant se fait en revanche davantage dynamique et précurseur sur les réalisations concrètes. Se donnent ici dès cet instant à voir les prémisses de la transitivité du « message » associatif étudiant, à tout le moins de ses modalités d’agir.

Poussées par les étudiants, les A.G.E. entrent dans une reconnaissance progressive des individus, au travers d’une posture promotionnelle sur la mise en avant du corps et de l’individu. Plus que les autres organisations collectives, le mouvement associatif étudiant s’implique par une politisation de la vie privée dans le sport pour l’individu, faisant évoluer le droit puis les modalités des engagements collectifs des individus dans le monde social. Bousculant le consensus social dans de nombreux domaines, l’U.N.E.F. et les A.G.E. précèdent les évolutions sociales et les organisations collectives du monde social sur des thématiques telles que le droit de votes des femmes, les technologies de l’information.

Le développement de l’organisation fait progressivement apparaître la nécessité d’une transformation de la structuration interne de l’U.N.E.F. Face aux difficultés d‘accès au monde du travail qui s’étendent au cours des années trente, l’idée de passer d’une organisation corporative à une structure syndicale se répand en interne. Cette dernière permettrait en effet d’inscrire véritablement l’étudiant et le mouvement associatif étudiant dans le rapport salarial, à l’instar des autres organisations de représentation de groupes d’individus ayant un lien avec le monde du travail. Le modèle syndical d’organisation collective étant dominant à cette époque, la perspective étudiante reflète les modalités de l’action collective à l’œuvre dans l’ensemble du monde social.

Ce phasage s’observe notamment au travers de la similitude des rapports individu/collectif. Face au groupe, l’individualité n’existe pas ; le lien entre ces deux acteurs s’opère dans les deux cas par le biais du militant, figure emblématique de l’engagement, dans ses aspects irréprochables et abandon de soi au profit du collectif.

Cependant, le modèle syndical pensé par les instances de l’U.N.E.F. reste atypique : un peu à l’image de la F.G.E. (Fédération Générale de l’Enseignement, ancêtre de la F.E.N.) qui se constitue à cette époque, il n’est fait nul choix d’une utopie particulière pour guider le mouvement. Ceci n’empêche pas de se positionner sur des problématiques de sociétés comme la montée du fascisme, à l’instar des autres organisations du monde social de tendance humaniste.

Ces ambitions de refonte du mouvement associatif étudiant, mises en berne par la seconde guerre mondiale, renaissent après 1945. Le positionnement ambigu de l’U.N.E.F. et de certaines A.G.E. rend nécessaire une reconstruction fondamentale de l’organisation. Cette dernière se rebâtit sous la forme d’un syndicat non politisé. Le mouvement associatif étudiant entre dans sa troisième phase, la période syndicale. Il s’appuie pour se faire sur une charte, la Charte de Grenoble, fortement inspirée de la Charte d’Amiens du syndicalisme ouvrier. Le mouvement associatif étudiant emprunte donc la forme d’organisation collective la plus courante à son époque, en calquant un certain nombre de ses modalités de fonctionnement sur celle-ci, tout en lui adjoignant des spécificités particulières et en oblitérant un certain nombre de contraintes conceptuelles. Il s’ensuivra, à l’instar de ce qui se produisit pour elle au sortir de la première guerre mondiale, une capacité d’innovation pratique forte, non entravée par des préceptes ou des dogmes. Ces innovations rayonneront alors et diffuseront peu à peu sur l’ensemble du monde social, transformant progressivement par leur institutionnalisation tant l’action de l’Etat que les modalités de l’engagement collectif des individus dans le monde social. Là encore, la transitivité de l’agir associatif étudiant au travers du temps se concentre sur des modalités pratiques et organisationnelles.

L’action de l’U.N.E.F. fera évoluer l’Etat, de la même manière que les syndicats ouvriers feront évoluer ce dernier dans la conquête de droits nouveaux pour leurs membres. Mais la place du membre dans l’organisation n’est pas tout à fait la même. Si le mouvement étudiant déclare l’étudiant comme avant-garde des transformations sociales à l’instar de ce que déclame le mouvement ouvrier, s’il est entrevu lui aussi dans une vision unitaire, il y a loin de la pratique d’indépendance de l’action syndicale par rapport à l’action politique sur ce dernier milieu, réalité beaucoup plus effective sur le monde étudiant. De part la multiplicité de ses influences théoriques, le mouvement associatif étudiant adopte une position plus éloignée des utopies, créant un modèle d’organisation plus consensuel et surtout plus orienté sur des réalisations pratiques. Ebranlant le consensus social de l’époque en matière d’agir collectif, les A.G.E. se voient fortement incitées à coupler activité gestionnaire de services (souvent nombreux) avec leur activité de représentation.

Si la forme générale de la structure et ses pratiques de rapport entre individus et organisations empruntent une large part des cadres de l‘action collective mis en œuvre par les syndicats ouvriers de son époque, les modalités pratiques et les réalisations de l’agir associatif étudiant s’éloignent donc fortement de celles de ses homologues ouvriers. La forte adhésion au mouvement associatif étudiant contraste ainsi avec la faible participation que connaissent les syndicats de salariés. Celle-ci n’a évidemment pas la même forme. Tandis que l’adhésion à un syndicat ouvrier affirme l’adhésion à une philosophie politique et à une utopie particulière, l’adhésion des étudiants à l’U.N.E.F. ou ses A.G.E. prend surtout la forme d’une adhésion à une structure de service. Le lien adhérant/structure se fonde davantage sur une perspective utilitaire et pas du tout idéologique, attendu que l’organisation n’a pas d’idéologie affichée, d’utopie ayant prérogative ( 230 ).

L’U.N.E.F. prend au cours des années suivantes la forme d’une équipe de techniciens, posture organisationnelle relativement en avance sur son temps.

Deux groupes animent les débats en interne : les visionnaires autour de la J.E.C., et les gestionnaires. Ces deux groupes tendent à affirmer deux perspectives politiques différentes, qui se rejoignent cependant dans la nécessité d’une unité de l’organisation. Avant l’heure, les étudiants se frottent ainsi aux pratiques de cohabitation.

Au milieu des années cinquante, et avec l’expansion progressive du conflit algérien, la J.E.C. prend un pied plus important au sein de l’U.N.E.F. Ses idées se diffusent, qui prônent un élargissement de la conscience étudiante à ce qui se passe ailleurs, sur le principe que l’ailleurs maintenant peut affecter notre ici demain. Ses prises de position précèdent fortement l’ensemble des autres organisations collectives de son temps et bousculent cette fois encore le consensus social. La transitivité du message associatif étudiant se déporte alors sur la problématique du sujet, sa place dans la société, sa capacité et son droit à être reconnu dans et par son identité.

La J.E.C., l’U.N.E.F. et le mouvement associatif étudiant vont alors œuvrer pour une conscientisation progressive de la population. Ces trois acteurs, chacun à leur échelle, organisent leur action pour une reconnaissance de l’altérité et le droit de chaque individu à disposer de lui même et de son devenir. L’individu prend de facto une place grandissante dans le discours de l’U.N.E.F.

Revers de ce positionnement avant-gardiste, diverses A.G.E. parmi les plus conservatrices scissionnent. S’opposent alors deux paradigmes, l’un fondé sur l’unité de la Nation et le rejet du communisme, et l’autre autour des droits de l’individu et des Nations à disposer d’eux-mêmes. Deux fondements de la société modernes viennent ainsi s’opposer, la totalité et la liberté. Le second paradigme va peu à peu s’imposer, conduisant à l’éclatement des identités et des références. Cette opposition se donnera à voir ultérieurement sur l’ensemble des organisations du monde social, que ce soit au travers du lent mouvement d’autonomisation des structures par rapport aux groupements constellaires ou par les scissions syndicales et/ou politiques de cette époque (scission S.F.I.O./P.S.A., scission C.F.T.C./C.F.D.T. notamment).

Cette époque est aussi celle de l’installation progressive du second individualisme dans la société et dans le milieu associatif étudiant. Par une politisation de la vie privée avec notamment le refus du service militaire, le milieu associatif étudiant devance de quelques années les autres organisations du monde social sur ce point. Il invente une nouvelle praxis, transformant par incidence les formes de l’engagement des individus dans le collectif.

Des procédés nouveaux servent d’appuis à un réagencement entre discours à visée utopique (le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes) et réalisations pragmatiques locales immédiates : refus du départ des étudiants, fin de la guerre d’Algérie, …. Le discours se pragmatise, et fait le lien entre global et local. Ce sont de telles modalités de l’action collective qui sont actuellement à l’œuvre dans le monde social, permettant d’en déduire un caractère préfiguratif du mouvement associatif étudiant.

Dans le même temps, l’Etat se transforme et se personnalise. Les changements que cette reconfiguration impose à l’U.N.E.F. sont importants, notamment en matière de multiplication des élites en son sein. La J.E.C. répondra en partie à ces besoins, en fournissant au mouvement associatif étudiant des cadres déjà formés. Revers de la médaille, l’U.N.E.F. accentue sa dépendance envers cette organisation.

Par l’instruction de 1959, qui bloque les sursis des étudiants, l’Etat crée les conditions du basculement définitif de l’ensemble des étudiants et A.G.E. contre la guerre. Afin de ne pas défendre une position trop corporatiste, les membres de la J.E.C. amènent l’ensemble de ces dernières à se positionner contre le colonialisme. Si la façade de l’apolitisme tombe alors pour les A.G.E., elles emportent le soutien d’une large partie de la population et réussissent de fait à faire annuler ce décret.

Autour de la notion de risques potentiels, l’U.N.E.F. renforce son unité et l’adhésion des étudiants, en même temps qu’elle se positionne comme une force à l’égale des grandes centrales syndicales pour l’opinion. C’est une perspective avant-gardiste qu’elle développe alors, les syndicats ouvriers se ralliant à son panache, la transitivité du discours associatif étudiant en direction des autres organisations du monde social se faisant à cet instant beaucoup plus rapide et visible. Cette fois encore, le mouvement associatif étudiant bouscule le consensus social ambiant, et transforme les autres formes de l’engagement collectif des individus. Ce positionnement lui vaudra sa mise au ban de la part du gouvernement, tandis que dans le même temps, l’épiscopat français somme la J.E.C. de recentrer son action.

Cette levée de boucliers institutionnels sonne le départ définitif des A.G.E. parmi les plus marquées à droite. Ces dernières créent en 1961 la F.N.E.F. S’en est alors fini de l’unité du syndicalisme étudiant. En même temps, cette scission définit aussi sur l’ensemble de la société l’instant où les identités particulières prennent le pas sur les identités collectives. A maints égards, la création de la F.N.E.F. donne à voir la réémergence sur le social d’organisations traditionalistes voire communautaires. Elle marque dans le même temps l’opposition entre l’ancien et le nouveau, à l’instar de ce que connaîtra la C.F.T.C. quelques années plus tard.

L’U.N.E.F. poursuit cependant sa route, ses élites impulsant des dynamiques qui se rendront visibles plusieurs années plus tard sur l’ensemble du monde social, de part leur accession progressive à des postes décisionnels importants (lors des élections locales de 1977 ou lors de l’alternance de 1981) ou par effet de diffusion (élites du Tiers-Monde passés entre-temps par le moule de l’U.N.E.F.).

Les années 62-64 apportent à l’U.N.E.F. la réussite de ses objectifs, en même temps que le début de son déclin. L’organisation se voit emportée par la réalisation de ce qui l’a mobilisé tout au long de ses dernières années, la fin de la guerre d’Algérie. Victoire pour l’U.N.E.F. et son investissement, ses élites se trouvent cependant démunis pour rebondir après un tel succès.

Confronté à ce vide d’objectifs, à la coupure des subventions venant de l’Etat, au tarissement du flux de cadres J.E.C., à l’hémorragie née de la scission de la F.N.E.F., un certain nombre d’A.G.E. puis l’U.N.E.F. passent progressivement aux mains des étudiants de l’U.E.C. et du P.S.U. L’U.N.E.F. entre alors dans sa quatrième période, la période syndicale, politisée et partisane. L’impact du mouvement associatif étudiant sur les transformations des modes d’engagement collectif des individus dans le monde social disparaît alors pour un temps, ainsi que définitivement pour cette organisation.

Au final, il apparaît que le caractère préfiguratif du mouvement associatif étudiant se concentre, lors de cette période, essentiellement sur les réalisations pratiques des modalités de l’engagement des individus dans le collectif et sur la reconnaissance du sujet. Les données, informations transitant d’une époque à une autre pour connaître une résurgence ultérieure sur le monde social sont principalement d’ordre pragmatique et concret. Les formes globales de l’engagement des individus (rapport individu/organisation notamment) sur le monde associatif étudiant restent pour leurs parts relativement similaires à celles mises en œuvre par les organisations syndicales de son époque, dimension constellaire exceptée. Il n’y a pas de grande variation entre le modèle proposé à cette époque par les organisations associatives étudiantes en matière modes de construction du collectif, sur le rapport entre individu et organisation, et ce qui se donne à voir à la même période sur l’ensemble du monde social.

Outre la dimension préfigurative sur le plan de l’action et sur la place du sujet, il convient aussi de relever le caractère fortement performatif des organisations associatives étudiantes en regard des autres organisations similaires dans le monde social. Ce caractère performatif s’observe tant sur la teneur des projets inventés, réalisés, que sur les taux d’adhésion obtenus. Tout au long de cette période, nous sommes dans un croisement d’une activité associative de création de gestion de projets de développement social, et d’une activité de représentation qui s’apparente à un positionnement syndical classique.

La divergence entre agir associatif étudiant et formes d’engagements sur le social se produit principalement sur l’offre de service proposée par l’organisation. Plus complète au sein du monde associatif étudiant, elle induit de la part de l’individu une adhésion duelle, l’une utilitaire pour les services, et l’autre, plus ténue, pour la perspective idéologique proposée. Sachant que lors de ses grandes périodes, l’U.N.E.F. et le mouvement étudiant ont réussi à fonder cette perspective sur une notion de risque vécu et/ou potentiellement à vivre, sachant la force du lien qu’il est possible de créer autour de cette notion de risques désormais fortement utilisée par une large part des organisations sans but lucratif (la force de ce lien pouvant parfois approcher celle de la propagande par la manipulation des peurs), il est raisonnable de penser que le modèle mis en œuvre par le mouvement associatif étudiant au cours de la période associative de l’U.N.E.F. était précurseur dans ses réalisations, parce qu’il était tout simplement éminemment performatif.

En étant plus performatif que toutes les autres organisations de son temps, l’agir associatif étudiant a pu explorer plus rapidement de nombreuses hypothèses, les tester au niveau local et les mettre le cas échéant en lumière au niveau national si le besoin était. Le caractère précurseur tient donc, pour cette période, de la capacité qu’a eu le mouvement associatif étudiant à tester rapidement des solutions au niveau local, les meilleures idées traversant alors le temps et se retrouvant ensuite dans le monde social.

La période suivante, allant du milieu des années soixante à la fin des années quatre-vingt, sera plus confuse. Le mouvement associatif étudiant se voit rejeté de l’U.N.E.F., sa création, par les faire-valoir étudiants des partis de gauche de l’époque, l’U.E.C. et le P.S.U. Ces deux organisations conduiront l’U.N.E.F. à son explosion finale et sa mort.

Une partie des organisations associatives, essentiellement issues des filières Santé et Droit, a créé au début des années soixante une nouvelle organisation, la F.N.E.F. Malgré ou sans doute à cause d’un soutien très marqué du gouvernement de De Gaulle en sa faveur, cette organisation végète. Elle est pour nombre d’étudiants la retranscription dans le monde universitaire de l’U.N.R., parti du pouvoir. Elle est en outre empêtrée dans une impossibilité chronique à créer un discours efficient et pertinent, oscillant entre participation et rejet, syndicalisme de combat et suivisme du gouvernement. Malgré son ambition première d’être une organisation inclusive, elle se développe avant tout sur le modèle d’une organisation exclusive.

Des regroupements de circonstance entre organisations associatives locales vont rapidement dépasser la F.N.E.F. lors des scrutins électoraux étudiants. Celle-ci se voit peu à peu désertée par les mono-disciplinaires, tentées par la création d’une organisation plus verticale, et par ses courants internes de droite qui lui préfèrent d’autres organisations syndicales plus facilement contrôlables. La F.N.E.F. disparaît ainsi presque totalement du paysage étudiant dès le début des années soixante-dix. Elle constitue une mise en acte parfaite du modèle des organisations exclusives en période de crise identitaire.

Quelques mono-disciplinaires tentent alors de créer une nouvelle fédération nationale, le C.L.E.F. Composée limitativement de cinq mono-disciplinaires, cette organisation verticale s’appuie sur les identités de filière. Dès sa conception, le C.L.E.F. s’enferme autour de deux valeurs : le corporatisme et l’identité
pré-professionnelle. Cependant, un tel modèle ne peut fonctionner que sur la base de filières fortement intégratrices, ce qui n’est pas le cas des nouvelles filières universitaires qui se développent. L’exclusion de la différence constitue la pierre de base de cette construction, rendant son but de représentativité nationale incohérent. Structuration calquée sur les autres organisations représentatives de son temps (organisation pyramidale, centralisme, délégation de la parole, …) le C.L.E.F. est une sorte de reflet étudiant des autres syndicats professionnels de son époque.

Cependant, cette organisation développe dans le même temps une approche presque communautariste, par son rejet de toute identité étudiante non élément des filières Droit, Santé et Grandes Ecoles. A sa manière, ce secteur du monde associatif étudiant participe au renouveau des pratiques communautaires, en même temps que continue de s’affirmer une pensée exclusive au sein de cette organisation nationale. La communauté des étudiants membres du C.L.E.F. devient le lieu de réassurance des individus face aux dangers extérieurs. Signe des transformations à l’œuvre, la société, même pour les étudiants, apparaît désormais plus dangereuse. La croyance dans le Progrès s’effrite, commandant un recours à la tradition. C’est donc un couplage original que propose cette structure, entre passé et présent.

Mais l’efficience ne sera pas au rendez-vous. Dès le milieu des années soixante-dix, le modèle C.L.E.F. s’avère obsolète. L’organisation n’est plus en phase ni avec le milieu universitaire qui s’est transformé par la création de nombreuses nouvelles filières, ni avec la population étudiante, en attente de plus d’ouverture. Cette dernière s’est en outre fortement accrue, par l’arrivée progressive de jeunes d’origines plus populaires.

Des associations étudiantes nouvelles émergent, notamment au sein des récentes filières professionnalisantes. Le visage de l’agir associatif étudiant se transforme peu à peu. Les étudiants recherchent des engagements plus pragmatiques, plus concrets, moins idéologiques, et rejettent tout marquage politique.

Les évolutions des formes d’engagement collectif chez les étudiants (passage d’une perspective syndicale à des engagements associatifs) donnent à voir avec plusieurs années d’avance la tenue d’un phénomène similaire sur l’ensemble du monde social. Le pragmatisme, l’action concrète et les résultats visibles rapidement s’imposent au détriment des utopies et des « grands soirs ». Le mouvement associatif étudiant institutionnalise progressivement ces transformations, impactant alors les autres formes de l’engagement collectif des individus dans le monde social.

Sur le local, l’indépendance et l’autonomie s’affirment comme valeurs nouvelles au sein de ces nouvelles associations. Ces structures retranscrivent par ce biais l’affirmation croissante de l’individu dans la société. La transitivité du modèle de l’agir associatif étudiant sur l’ensemble de la société se confond alors avec les évolutions sociétales, en les précédant cependant.

Le second individualisme se concrétise aussi au travers de l’expansion du nombre d’associations thématiques, structures fondées sur des micro-projets, et le plus souvent portées par un individu seul. Ces petites associations expriment la volonté de prise en main par l’individu de son destin, sans délégation et au plus proche de la réalité locale. Ouverture sur l’altérité et construction d’un rapport plus responsable au monde constituent les principales orientations de ces nouvelles structures. L’action de ces structures se tourne en outre davantage vers la création de projets nouveaux que vers la construction d’une participation aux projets en cours dans le monde social. A la différence des corporations étudiantes et des fédérations nationales F.N.E.F. et C.N.E.F., ces associations étudiantes bâtissent leur action sur une ouverture à l’altérité quand les premières se construisent sur la base de l’exclusion de la différence.

Les corporations, structures étudiantes plus anciennes, se concentrent pour leur part sur le développement du libéralisme, en créant notamment les mutuelles régionales. Celles-ci ont alors comme mission de concurrencer la M.N.E.F., aux mains des deux U.N.E.F. Le fonctionnement des corporations étudiantes est sur ce point totalement novateur pour les organisations du secteur sans but lucratif, en même temps que totalement en phase avec son époque. L’argent devient un enjeu de pouvoir, car l’argent permet d’accéder au pouvoir. Cette posture n’existait pas auparavant dans le milieu étudiant. Dans cette logique, il devient nécessaire de construire des mutuelles concurrentes à la M.N.E.F., afin de priver les deux U.N.E.F. de leur principale ressource financière. En même temps, ce processus donne à voir des collusions inédites entre organisations de représentation et intérêts financiers. Celles-ci n’ont pas à l’époque de retranscription dans le monde social, aucun parti, syndicat comme aucune autre structure d’engagement collectif n’étant alors adossé à une organisation privée dont l’objectif est en premier lieu de générer du capital.

La distance entre organisation nationale et associations locales se creuse donc encore davantage au cours de cette période. Tandis que le C.L.E.F. s’éloigne du modèle syndical pour tendre vers celui d’une organisation économique, les associations de terrain se rapprochent pour leur part des associations d’entraide qui émergent dans le monde social.

L’absence de suivi du C.L.E.F. par la base amène peu à peu les responsables associatifs étudiants à prendre conscience de son inanité. La construction d’une organisation nouvelle s’impose donc vers la fin des années soixante-dix. Le C.N.E.F. naît ainsi en 1982, par la fusion entre F.N.E.F. et .C.L.E.F. Cependant, à rebours de ses ambitions, cette nouvelle organisation reproduit rapidement les mêmes travers que ses deux prédécesseurs : représentation unique des
mono-disciplinaires, structuration autour des identités pré-professionnelles, forte délégation de la parole, ignorance des particularismes locaux, accents paternalistes et moralisateurs d’un autre âge en font une organisation dès sa conception dépassée. Cette fois encore, le modèle exclusif s’impose.

La C.N.E.F. poursuit l’implication de ses prédécesseurs dans le néolibéralisme, filialise certaines de ses activités selon une approche similaire à la gestion d’une entreprise en réseau, firme horizontale. Cette nouvelle fédération s’impliquera ainsi plus fortement dans l’animation d’un réseau économique et dans la construction de relations financières que dans l’animation du réseau des associations étudiantes. Les liens entre étudiants et bénévoles sont presque inexistants, hormis sous un rapport financier. La C.N.E.F. s’oriente en outre vers la promotion d’un discours méritocratique à l’égard des étudiants, en phase avec la société libérale de son temps.

Le mouvement associatif étudiant continue pour sa part à se développer sur le local, loin de ces organisations et de ces considérations. Le fédéralisme local se construit sur le monde étudiant, sans forcément de lien avec ce qui se produit au même moment dans l’ensemble du monde social. Il est accompagné par la décentralisation des équipements universitaires sur les villes moyennes, qui se met en œuvre à cette époque. Des partenariats nouveaux se tissent, entre associations étudiantes de terrain et institutions locales. L’individu prend son expansion sur le terrain, quand dans le même temps, le local s’impose peu à peu.

Les associations étudiantes locales se rapprochent du modèle des associations de développement économique local. On assiste à l’émergence d’identités particulières, fondées sur le local comme lieu de vie et d’appartenance. L’individu marque sa présence. Il n’y a plus dans le milieu étudiant d’unité et de globalité mais la constitution progressive d’un réseau d’identités locales, se retraduisant notamment dans la construction de fédérations locales aux identités marquées et indépendantes.

La C.N.E.F. passe à coté de ces principales évolutions, et s’affirme en outre peu à peu comme une organisation politiquement marquée à droite. Le rejet d’une telle posture s’avère radical de la part des responsables associatifs étudiants, caricaturant à l’excès des rejets similaires visibles dans le monde social. Lors des scrutins électoraux étudiants de la fin des années quatre-vingt, la C.N.E.F. est laminée, n’arrivant parfois même pas à présenter de candidats. Diverses fédérations de ville se regroupent à partir de 1988 et pensent alors la transition.

Face à une vision reproduisant le schéma d’un regroupement national des mono-disciplinaires, la perspective d’un regroupement fondé sur les fédérations de villes s’impose. Après deux ans de débats, le mouvement associatif étudiant tourne le dos au modèle syndicalo-corporatiste des organisations précédentes, et s’ouvre à une nouvelle structuration fondée sur le local. La F.A.G.E. naît ainsi le 12 décembre 1989, forte de ces nouvelles ambitions ( 231 ). Elle signe dans le même temps le retour d’un modèle inclusif d’organisation fédérative sur le milieu associatif étudiant.

Dans son utopie créatrice, cette nouvelle organisation se veut un lien entre symbolique de la grande U.N.E.F. et réalités actuelles de l’agir associatif étudiant ; une sorte de reconstruction de l’U.N.E.F. sans les groupes internes politisés. La F.A.G.E. affiche dès sa naissance clairement une ligne apolitique et sa volonté de se concentrer sur l’action de terrain et le local. Une organisation inclusive naît alors, signant la fin de la crainte du monde associatif envers son environnement. Cette naissance et ce retour au modèle d’organisation inclusif après un passage appuyé dans le modèle exclusif affirment en outre l’existence d’un réel continuum de pensée et de pratiques entre l’U.N.E.F. antérieure à la F.N.E.F. et la F.A.G.E.

La F.A.G.E. renoue avec une forme plus syndicale d’organisation. Elle appuie son développement sur le renouveau associatif visible dans l’ensemble du monde social au cours des années quatre-vingt. Elle fait se côtoyer en interne différents types d’organisations : « corpos » anciennes, associations nouvelles, associations de filière, associations thématiques, fédérations de ville et
mono-disciplinaires. Elle s’ouvre aux particularismes locaux, en décentrant notamment son siège social plusieurs années durant hors de Paris.

Ce renouveau s’accompagne d’une forte adhésion des associations locales aux fédérations locales, et d’une forte adhésion de ces dernières à la F.A.G.E. Ce phénomène retraduit l’attrait que représente alors le projet F.A.G.E., et tranche avec le déclin du fédéralisme visible à la même époque dans le monde social.

Une nouvelle structuration des rapports entre fédérations locales et structure nationale se fait jour : désormais, il n’y a pas un centre de décision mais des centres. Le pouvoir est désormais aux mains des fédérations locales. On assiste alors sur le monde étudiant à l’émergence d’un poly-système. Ce type d’organisation n’est à cette époque guère visible sur le monde social, excepté chez S.U.D.

Les organisations fédérées jouissent en interne d’une réelle indépendance, d’une large autonomie d’action. Cette organisation n’est pas construite sur une base de structuration pyramidale mais sous la forme d’un réseau. La coordination des idées s’établit sur une base de synthèse consensuelle entre les diverses identités locales. Le rapport entre national et local se construit par les biais du partenariat et du relationnel. Les liens entre structures se construisent par affinités, sur une base de pragmatisme, de relations de services mutuels et de mutualisation des expériences entre membres du réseau.

La modélisation structurelle mise en œuvre par le réseau F.A.G.E. se trouve conséquemment être en phase avec les attentes du terrain. Cette adéquation se retraduit ainsi rapidement dans les scores électoraux que réalise ce réseau lors des différents scrutins étudiants.

La tendance à l’amplification des scores associatifs ira croissante au cours des années. Pour l’essentiel, le mouvement associatif étudiant progresse au détriment des organisations étudiantes de gauche, dont l’audience chute de près de 20 % entre 1983 et 2002.

Le C.I.P., en posant au grand jour la question de la professionnalisation des filières et l’intégration des étudiants dans le monde du travail, génère en 1994 un dissensus entre associations étudiantes. Trois mono-disciplinaires « corporatistes » scissionnent de la F.A.G.E. pour créer une structure alternative, P.D.E. Cette séparation se fait sur fond d’intérêts divergents entre deux mutuelles régionales pour le contrôle de la F.A.G.E., par responsables associatifs étudiants interposés. Les intérêts financiers en jeu donnent alors corps aux divergences entre filières sur le métier d’étudiant. Le besoin de marquer sa différence se fait alors plus fort que l’intérêt d’être ensemble.

P.D.E. devient l’organe politique étudiant de la S.M.E.R.R.A. et le restera, quand dans le même temps, la F.A.G.E. cherche à s’émanciper de la tutelle financière des mutuelles régionales. A partir de cette époque, ces deux organisations cohabiteront, créant ça et là des zones de conflits intestins lors des scrutins électoraux étudiants.

La F.A.G.E. tente pour sa part de diversifier ses ressources financières, et crée une centrale d’achat, F.A.G.E.-Assos-Services. Bien que cette expérience soit un échec financier, elle permet à la F.A.G.E. d’entrer de plain-pied dans le monde de l’économie sociale et solidaire et d’essayer d’utiliser l’outil économique comme élément de structuration d’un réseau.

Dans les années qui suivent, la F.A.G.E. s’émancipe définitivement de ses tutelles financières et élargit la gamme de ses actions et de ses interlocuteurs. Elle participe en son nom propre à la tentative de sauvetage de la M.N.E.F., unique organisation étudiante à le faire ouvertement.

Mais elle ne regroupe derrière elle qu’une petite partie du monde associatif étudiant. Ce dernier, composé d’une myriade d’associations, reste flou, insaisissable, à l’instar des individus qui animent ces structures.

D’autres organisations existent, qui tentent de fédérer d’autres réseaux étudiants. P.D.E. regroupe pour sa part des organisations clairement identifiées par leur devenir professionnel. Fondée sur une dynamique proche de la F.A.G.E. et sur la base d’organisations de même type, elle ne doit son existence qu’à la poursuite d’intérêts financiers extérieurs au monde associatif étudiant.

AnimaFac, créé en 1996, apportera un éclairage complémentaire sur le mouvement associatif étudiant. Pensé et géré comme un réseau fluide, cette organisation va peu à peu agréger tout un ensemble d’associations thématiques. Elle ne prend pas part aux différents scrutins électoraux étudiants, laissant ce terrain aux différentes organisations étudiantes actuelles. En revanche, elle s’affirme comme représentant du monde étudiant au sein d’instances extérieures à l’Education Nationale (Jeunesse et Sport, International, autres ministères, …).

Les modalités de l’action représentatives de la F.A.G.E. se construisent autour de valeurs pragmatiques, sans référence à une utopie et dans une recherche de résultats tangibles. En interne, l’organisation se transforme au cours de ces dernières années, afin d’intégrer au mieux les différences (création d’un collège spécifique pour les mono-disciplinaires, limitation du poids de
Paris, …). Elle est une tentative de rencontre entre le process d’individuation qui s’affirme, les pratiques gestionnaires et de services des associations locales, et la défense d’intérêts corporatifs des mono-disciplinaires. Au niveau global, les modalités de structurations et les postures de la F.A.G.E. sont en relative synonymie avec celles des autres organisations du monde social.

A l’instar de la grande U.N.E.F., nous verrons cependant dans notre seconde partie que les réalisations pratiques, les projets de la F.A.G.E. s’avèrent inédits, bousculent les pratiques en cours dans le monde social, et sont en avance sur leur temps. Il restera en suspens la question du risque, inexistante et non traitée par toutes les organisations associatives étudiantes qui se sont succédées après l’U.N.E.F. Sans cette dernière, le monde associatif étudiant peut-il se prévaloir d’un quelconque rôle de fer de lance dans les transformations sociales et dans les modes d’engagement collectif des individus ?

P.D.E. reste jusqu’à aujourd’hui une niche identitaire, fondée sur des bases traditionalistes et d’identités professionnelles, et très fortement dépendante de sa mutuelle de tutelle. Son positionnement en fait un mouvement plutôt marqué à droite. AnimaFac se développe sur une logique de réseau, et cherche à créer des synergies transversales. Il organise peu à peu une forte communication institutionnelle sur l’expérience associative étudiante et sur sa reconnaissance.

L’importante fluidité qui ressort de l’observation du mouvement associatif étudiant rend délicate l’observation de ce dernier, a fortiori compte-tenu du peu de données dont il est producteur. Les trois organisations évoquées développent chacune des réseaux parallèles qui s’entrecroisent sans que chacun en soit toujours conscient. L’enquête sur laquelle nous travaillons permet d’étudier un pan particulier du secteur associatif étudiant, le plus visible. Ne disposant pas de données sur les réseaux AnimaFac et P.D.E. car inexistantes ou presque, il s’ensuit que ce travail observera sans doute moins facilement les dynamiques les plus émergentes, les moins saisissables, passant de fait peut-être à coté du nouveau par instant. Il permettra toutefois d’observer les modalités de l’action collective des organisations les plus structurées et les plus viables, et de ce fait, celles qui disposent des facultés les plus accrues pour réapparaître d’ici quelques années sur la société civile, et impacter les modes d’engagement des individus dans le monde social. C’est ce à quoi s’attachera notre seconde partie.

Notes
230.

( ) A certains égards, il se développe une certaine forme de synonymie entre l’U.N.E.F. et la F.E.N., structure syndicale aux orientations internes consensuelles, et elle aussi fortement tournée vers l’activité de service.

231.

( ) Sur le modèle de survie des organisations au cours du temps décrit par Verta Taylor dans sa contribution à l’ouvrage collectif « Le désengagement militant » d’Olivier Fillieule, il est alors possible d’analyser rétrospectivement les trois organisations F.N.E.F., C.L.E.F., et C.N.E.F. comme des « organisations exclusives ». Leur fonction principale aura été de conserver et de faire perdurer le potentiel militant tout au long de la phase de transition du mouvement associatif étudiant entre U.N.E.F. et .F.A.G.E. « Organisations dormantes » compte tenu de leur faible adhésion avec la base étudiante des années 70-90, elles permettront néanmoins de faire survivre l’idée du militantisme associatif étudiant au cours d’une période davantage propice aux mouvements contestataires. TAYLOR Verta in FILLIEULE Olivier, Le désengagement militant, Belin, 2005.