Les similitudes/divergences avec les autres organisations du monde social :

Excepté le conflit historique entre F.A.G.E. et P.D.E. entraînant dans quelques cas restreint des oppositions structurelles locales, il n’existe pas de conflits d’intérêts réels entre associations ou fédérations locales. Sur le milieu étudiant et à la différence du monde social, les relations interstructurelles locales sont dans leur ensemble pacifiées. Cette situation résulte pour une large part de la faiblesse des fonds institutionnels disponibles et des besoins structurels plus légers. Les associations étudiantes fonctionnent habituellement sans réel soutien financier institutionnel. Elles n’ont donc pas le besoin impérieux de s’opposer pour l’obtention de ces financements.

A l’échelon des fédérations étudiantes locales, le travail commun entre structures s’opère par mutualisation des expériences et avec la force du relationnel que l’ensemble des technologies de communication actuelles contribue à renforcer. Celle-ci s’adjoint d’une forte indépendance des organisations entre elles, chacune défendant son autonomie.

Il existe en revanche dans le monde social des conflits d’intérêts parfois sérieux entre associations oeuvrant sur des thématiques parallèles, pour la détention de ressources stratégiques. Comme le montre notamment Anne-Marie Dieu dans « Valeurs et associations », les bénévoles, les financements sont l’objet de désirs concurrentiels. Les approches comme les manières de travailler au sein des organisations sont en outre quelquefois diamétralement opposées. C’est le cas notamment de Médecins Sans Frontière, bâti sur le modèle de l’entreprise privée, fonctionnant à partir d’une politique de marketing agressive, d’un fort usage des médias, en regard de structures plus anciennes comme la Ligue des Droits de l’Homme, ou Oxfam.

Le militantisme associatif étudiant ne s’attache pas à une idée politique ou une idéologie particulière, mais reste pour l’essentiel centré sur la dimension associative de l’engagement, la neutralité politique. Il n’existe donc pas de divergence entre le rôle de militant et l’engagement associatif, c’est-à-dire entre valeurs du mouvement et réalité de l’action quotidienne. En effet, ces valeurs se fondent sur le pragmatisme et l’action quotidienne. Mouvement national et actions locales restent donc dans une relation forte de proximité d’engagement, au moins pour le cas de la F.A.G.E.

Les organisations du monde social vivent parfois cette relation avec plus de difficulté. Comme le montre notamment Sainsaulieu, des divergences d’interprétations des idéaux fondateurs et de leur adéquation face aux évolutions sociétales apparaissent plus régulièrement au sein de ces dernières, notamment celles fondées sur une base idéologique. Des tensions peuvent se faire jour entre structures locales et organisation nationale, voire parfois entre structures locales.

Les répartitions de populations bénévoles dans les organisations associatives étudiantes et les structures du monde social se construisent sur des bases similaires. Même s’il existe un plus grand brassage au sein des secondes, les populations bénévoles tendent elles aussi à se regrouper par tranches d’âges. En revanche, il existe peu de complémentarité entre organisations du monde social, les relations s’établissant davantage sur la base d’une concurrence pour la possession des ressources bénévoles.

Enfin, il n’y a pas d’espace de mutualisation locale dans le monde social : il n’existe pas de structures transversales de rencontre pour les organisations du monde social d’une même ville. La structuration se fait prioritairement en tuyaux d’orgues, des fédérations locales d’associations du même secteur pouvant même exister (cas du C.A.D.R. pour les organisations de commerce équitable de Lyon par exemple). Les réseaux se côtoient, mais se rencontrent rarement. Les seuls espaces publics de rencontre existant sont ceux créés par la ville d’appartenance, au sein de conseils de développement par exemple (mise en place d’une démarche de participation citoyenne). Cependant, depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, les organisations du monde social tendent à se regrouper épisodiquement sous la forme de plates-formes d’échanges. Ces structures sont éphémères, et donc à comparer aux structurations plus institutionnalisées du monde étudiant. Sur un nombre certain de points, le secteur associatif étudiant dispose donc d’une expérience plus poussée. Il en découle un impact sur les modalités futures de l’engagement collectif des individus dans le monde social, que ce soit par effet progressif de diffusion (exemplarité de l’action menée qui devient source d’inspiration pour d’autres militants associatifs) ou par effet de réédition par les actuels étudiants bénévoles associatifs dans leurs engagements ultérieurs.