L’activité de conduite d’un véhicule

La conduite d’un véhicule fait partie des activités humaines qui sont pratiquées quotidiennement par nombre d’individus dans les sociétés industrialisées. La majorité des individus adultes, hommes et femmes confondus, ont, ou auront, au cours de leur existence l’occasion de conduire un véhicule automobile. La voiture représente, à l’heure actuelle et dans nos sociétés modernes, le moyen de transport le plus répandu. Si, du fait de sa généralisation, l’activité de conduite peut sembler simple et routinière, elle conserve néanmoins un statut ambigu, à la frontière des activités quotidiennes et des activités de travail (Van Elslande, 2000). En effet, de nature complexe, la conduite d’un véhicule est une activité soumise à des règles tant explicites (réglementation routière, etc.) qu’implicites (code de conduite tel la courtoisie…). Elle repose sur un certain nombre de connaissances et d’habiletés cognitives (procédures, automatismes) dont l’acquisition nécessite un apprentissage spécifique. De plus, ces habiletésévoluent en fonction des expériences vécues et des situations rencontrées par l’individu, et leur niveau d’automatisation dépend, en grande partie, de l’expertise du conducteur (Perruchet, 1988a). Ainsi, par la pratique, le conducteur acquiert un certain niveau d’expertise de la conduite qui évolue avec le temps et les événements : elle peut ainsi être remise en cause par un incident ou accident, un changement de véhicule, de réglementation, d’environnement routier, l’intégration de nouveaux systèmes d’assistance…

Le conducteur est donc, en même temps, composant et acteur principal du système conducteur/véhicule/environnement. Il est en interaction constante avec son véhicule et le contexte de la circulation. La diversité du système routier, environnement dynamique par excellence, le contraint à s’adapter à des situations variées évoluant de manière indépendante (Amalberti, 1996). Cet ajustement permanent est soumis aux contraintes dynamiques et temporelles inhérentes d’une part au déplacement et à la maîtrise du véhicule dans l’environnement routier, d’autre part au comportement des autres usagers, enfin, à la survenue ponctuelle d’événements largement aléatoires (météo, trafic, etc). De plus, les tâches qui composent cette activité particulière peuvent s’alterner ou être effectuées simultanément (Bellet, 1998), et nécessitent des ressources attentionnelles disponibles. Cette demande attentionnelle n’est cependant pas constante, et la variabilité de l’activité reste fonction des exigences du système (Sperandio, 1995). A ces facteurs de complexité, il convient d’ajouter des facteurs psychologiques et physiologiques propres au conducteur tels que la motivation, la personnalité, les styles cognitifs, la fatigue, le niveau de stress éventuel…

Bien que les principales caractéristiques cognitives (apprentissage, automatismes, processus attentionnels…) de la conduite d’un véhicule automobile s’appliquent également à celle d’un véhicule industriel, la spécificité de cette activité (volume et charge du véhicule, réglementation spécifique…) et le contexte socioprofessionnel dans lequel elle s’exerce, ne permettent pas toujours de généraliser les résultats des recherches sur la conduite automobile à la conduite d’un véhicule industriel. Ainsi, l’étude de l’activité de conduite des conducteurs routiers s’insère-t-elle dans un champ de recherche spécifique, encore peu exploré du point de vue de la psychologie ergonomique.