Les automatismes cognitifs

Toute activité humaine repose sur une représentation fonctionnelle de la situation élaborée par et pour l’action. Ces représentations fonctionnelles font appel à diverses représentations des objets de l’environnement, de schémas d’action et de connaissances préalablement constituées et contenues en mémoire à long terme. Parmi ces nombreuses représentations qui interviennent continuellement dans le déroulement de l’activité humaine,certaines peuvent être activées sans intention préalable de la part de l’individu. Ce phénomène repose sur le caractère automatique du processus chargé de sa mise en œuvre. Camus (1996) précise que ce n’est pas la représentation qui est automatisée, mais le processus chargé de l’activer ou de l’évoquer.

Une première observation émerge de nos lectures, il paraît difficile de dissocier la notion d’automatismes cognitifs en tant que composantes élémentaires d’une habileté de la notion d’automaticité en tant que processus de traitement de l’information. Ces deux notions se confondent et les auteurs évoquent indifféremment processus automatiques ou automatismes, cognitifs ou non, pour décrire le même phénomène (Perruchet, 1988, Pailhous, 1987 ; Camus, 1996).

La notion contemporaine du traitement automatique de l’information (Shiffrin et Schneider, 1977) a vu le jour avec l’émergence des travaux sur les processus de contrôle de la mémoire et sur l’hypothèse de l’existence d’un processeur central lié au contrôle attentionnel (Atkinson et Shiffrin, 1968). Néanmoins, à la lecture des nombreuses études dans divers domaines des sciences humaines (perception, mémoire, linguistique, résolution de problèmes, biologie, sociologie…) il semble difficile, voire illusoire, de proposer une définition unique du concept d’automaticité. De plus, selon Perruchet (op. cité), une réponse comportementale, observable, à une situation donnée, ne peut jamais être considérée comme totalement automatique, seules peuvent l’être certaines composantes du traitement qui sous-tend ce comportement. Ainsi, selon l’auteur, la notion d’automatisme ne peut être considérée sans la prise en compte de concepts complémentaires comme la conscience, l’attention ou le contrôle volontaire. Pour Logan (1988a et 1988b) et Camus (op. cité), l’automaticité se caractérise par la récupération en mémoire de représentations préalablement constituées. Cette récupération est automatique à partir du moment où une opération unique assure un accès direct aux solutions mémorisées. Lautrey quant à lui, introduit la partie « Psychologie » du Vocabulaire de sciences cognitives (Houdé et al., 1998) en précisant les caractéristiques du traitement automatique de l’information, en l’occurrence, l'absence de coût attentionnel, l'absence de contrôle, l'absence de conscience, le parallélisme des opérations et la rapidité d'exécution. Enfin, Logan (1985) souligne que les automatismes portent sur les composantes élémentaires d’une activité globale, les mécanismes intervenant sur ces composantes étant différents de ceux intervenant sur l’activité globale.

Ainsi, à l’instar de nombreux chercheurs, ces auteurs ne proposent pas de définition stricto sensu des automatismes cognitifs, mais les décrivent à l’aide de propriétés dans lesquelles se retrouvent les concepts élémentaires évoqués ci-dessus. Afin de préciser la notion d’automatismes cognitifs, nous présenterons donc les principales propriétés qui leur sont attribuées. Toutefois, notre objectif n’étant pas ici de faire une étude critique ou exhaustive du concept d’automaticité, nous ne nous attarderons pas sur les nombreux critères qui ne font pas l’unanimité chez les auteurs, certains étant même fortement contestés.

Le concept d’automaticité du traitement de l’information repose sur deux caractéristiques majeures reconnues par l’ensemble des auteurs : l’absence de coût cognitif ou de charge mentale et l’absence de contrôle volontaire ou intentionnel (Perruchet, 1988b).