Les facteurs qui caractérisent la situation de travail sont regroupés, soit sous le terme de contraintes, soit sous le terme d’exigences du travail (Sperandio, op. cité). La notion de contrainte désigne généralement un facteur ou un groupe de facteurs externes à la tâche (environnement, rythmes imposés, etc.). Quant au niveau d’exigence, il est principalement utilisé pour désigner une variable caractéristique de la performance attendue ou une norme de production, par ex : la quantité d’information à traiter ou le degré de difficulté d’une prise de décision, qui ne dépend aucunement des caractéristiques de l’opérateur29. Pour le conducteur routier, la performance attendue s’exprime en termes de consommation, de délais de livraison, de respect de la réglementation routière… Parmi les exigences de la tâche, la dimension temporelle qui a été souvent étudiée, principalement à partir des caractéristiques de la tâche ou des conditions externes dans lesquelles elle est accomplie (Welford, 1977), semble être une dimension fondamentale de la charge qualifiée de mentale par l’auteur.
Il peut arriver que les exigences de l’activité sollicitent les individus au-delà de leurs possibilités. En ce cas, ces exigences peuvent ne plus être satisfaites, avec toutes les conséquences qui en résultent pour la fiabilité de l’opérateur (Leplat, 1992). On peut donc dire que lorsque les exigences de la tâche augmentent au-delà d’un certain seuil, des erreurs apparaissent ; la performance pourrait ainsi être considérée comme l’un des premiers indicateurs de la charge. Soulignons ici que ces exigences sont tout aussi bien objectives que subjectives. En effet, les exigences d’une tâche ne seront pas perçues de manière identique par tous les individus, de même qu’elles ne seront pas forcément perçues de manière identique par le même individu à des moments différents. La prise en compte de la subjectivité de l’individu, et donc des exigences « perçues », nous paraît nécessaire dans toute étude tenant compte de la charge de travail. Ces différences dans la perception des exigences d’une tâche tiennent aux caractéristiques individuelles des opérateurs (variabilité individuelle). Certaines de ces caractéristiques peuvent être considérées comme relativement stables (l’expertise par exemple), d’autres se révéler très variables (par exemple la fatigue ou l’anxiété) en fonction de l’état physique et psychologique de l’individu, ainsi que de l’environnement dans lequel il évolue.
Enfin, selon Leplat (1980), l’activité du professionnel est déterminée par des conditions dites « de travail » qui sont internes ou externes à l’individu. Selon les caractéristiques de l’opérateur, les mêmes conditions de travail peuvent aboutir à une charge de travail différente. Il paraît donc réaliste de considérer qu’une même tâche prescrite peut donner lieu à une charge de travail différente selon les compétences de l’individu, les conditions environnementales et le moment d’exécution de la tâche, et l’état physique et psychologique dans lequel il se trouve.
Nous émettrons une réserve en ce qui concerne la difficulté d’une prise de décision. Il semble, en effet, que cette difficulté peut être fonction des capacités de l’opérateur, notamment en termes de raisonnement ou de résistance au stress dans des conditions d’incertitude et de fatigue par exemple.