2.1 Le vêtement, un moyen de distinction.

Goffman124 nous l’indique déjà, l’acteur social utilise son corps et ses apparences en fonction de son appréciation des situations, pour y mettre en scène les stratégies adéquates. Le vêtement, seconde peau, vient donc se substituer, sous le regard d’autrui, au corps invisible. Sont donc interprétés comme signes, dans une situation d’interaction, les parties visibles du corps et ses parties invisibles au travers des vêtements, qui les livrent ou les masquent, qui les corrigent ou les valorisent. C’est ainsi que si le corps est social et si ces marqueurs rentrent en compte dans l’identification de l’individu, les vêtements n’en sont pas moins opérant dans cette identification, en tant qu’éléments tangibles interprétables dans l’interaction, en tant que medium, mais aussi en tant qu’éléments identitaires d’un genre.

La sociologie du corps n'ignore pas l'importance de ces éléments quant à la production d'identité par le corps et ses techniques :

‘« Les stéréotypes se greffent avec prédilection sur les apparences physiques et les transforment volontiers en stigmates, en signes fatals de travers moraux ou d’une appartenance de « race » [...] Un marché en pleine croissance renouvelle en permanence les signes visant à l’entretien et à la mise en valeur de l’apparence sous les auspices de la séduction ou de la « communication ». Vêtements, cosmétiques, pratiques physiques, etc., forment une constellation de produits convoités destinés à fournir la « loge » où l’acteur social soigne ce qu’il donne ensuite à voir de lui-même à la manière d’une vivante carte de visite »125

Dans ce chapitre, nous ne nous risquerons pas à produire une historicisation du phénomène de parure ou encore une liste exhaustive de tous les changements qui ont contribués à composer nos vestiaires contemporains. Il ne s’agit pas là en effet de répondre à un besoin de retracer l’histoire du vêtement, ce que nombre d’historiens spécialisés ont déjà réalisé de façon remarquable mais de canaliser notre approche du vêtement en ce qu’il est un produit social et culturel participant à l’identification individuelle, donc en le plaçant directement dans une perspective sociologique et sémiologique. Ainsi nous utiliserons les concepts de la sémiologie et les théorisations de l’organisation de la société pour comprendre en quoi le vêtement peut informer, communiquer, distinguer, identifier.

Notes
124.

E. Goffman, La mise en scène de la vie quotidienne. 1. La présentation de soi, op. cit.

125.

D. Le Breton, La sociologie du corps, op. cit. 99