1.4 Les familles monoparentales

L’expression « famille monoparentale » a été introduite par les sociologues féministes des années 70 (Boisson, 2008). Il s’agissait de nier des termes stigmatisant comme celui de « fille-mère » ou de « mère célibataire » en leur donnant un statut de famille.

La monoparentalité concerne l'éducation par un seul parent d'un ou de plusieurs enfants. Dans la majorité des cas, il s’agit de la mère en situation de monoparentalité. Les facteurs qui la déterminent sont la séparation et le divorce, le veuvage et la naissance des enfants en-dehors d’une vie en couple. Actuellement, le divorce et la séparation sont devenus le mode de constitution de la famille monoparentale le plus courant.

En France, en 1999, 74% de ces familles étaient liées à une rupture conjugale (Déchaut, 2007). De plus, selon l’INSEE et l’INED, en 1999, en France, 17,1% des enfants faisaient partie d’une famille monoparentale. Les études françaises d’Archambault (2007), Déchaux (2007), Martin, (1997) et Léfaucheur (1992), et les études canadiennes de Stephenson et Emery (2003), qui étudient la réalité de ces familles depuis des années, montrent bien que la pauvreté est la raison principale de cette nouvelle structure familiale. Ils soulignent, aussi, la nécessité du soutien de l’Etat et des aides financières pour réduire la situation de vulnérabilité économique et sociale qui rôde autour de ces familles.

L’étude élaborée par Lefaucheur (1992), comparant les pays selon leurs politiques sociales concernant les familles monoparentales, a révélé que, dans des pays comme les Etats Unis, le Canada et le Royaume-Uni, la proportion des pauvres dans les foyers monoparentaux est trois à quatre fois plus élevée qu’avec les couples ayant des enfants à charge. De plus, ce risque est plus important chez les moins de trente ans.

Pour la France et l’Allemagne, le risque de pauvreté lié à la monoparentalité est moindre en raison de la protection que ces pays lui accordent. Cette assistance réussit à faire sortir de la catégorie pauvre environ la moitié des parents seuls. En Suède ou aux Pays-Bas, l’assistance gouvernementale est encore plus efficace.

La France dispose d’un large système de politiques familiales destinées aux familles qui bénéficient de barèmes favorables de l’impôt sur les revenus, d’allocation pour parent isolé versée pour le père ou la mère s’ils se retrouvent seul(e) pour élever leurs enfants), et encore d’allocation de soutien familial destinée aux mères seules qui ne reçoivent pas de pension alimentaire de leur ancien conjoint. Selon Déchaut (2007), ces contributions aident à augmenter leur niveau de vie de 20% en moyenne.

Au Brésil, le nombre des familles monoparentales est toujours grandissant. En 2006, il comptait pour 18% du total des familles et les recherches sur le sujet soulignent l’importance pour l’état d’investir dans des politiques publiques axées sur l’aide à ces familles.

Eduardo de Oliveira Leite (1997) a déploré l’inertie de l’État et le manque d’initiatives publiques pour contrer ce phénomène. Les familles monoparentales, majoritairement composées par la mère et ses enfants, ne disposent d’aucun soutien, ni d’aide financière de la part de l’Etat brésilien. La problématique de la monoparentalité ne retient pas l’attention des décideurs. Il en résulte que les pères brillent par leur absence en raison du choix de la mère d’élever toute seule ses enfants ou en raison de l’éloignement progressif du père causé par la séparation.  

Le sociologue français Martin (1997) a réalisé une recherche portant sur le parcours de la monoparentalité et sur la façon dont le lien avec l’ex-conjoint se présentait en fonction de la procédure du divorce. Selon cette étude, près de 60% des parents non-gardiens ont perdu tout contact avec leurs enfants ou les voient seulement de façon épisodique, notamment ceux qui demeurent sans nouveau partenaire. Les résultats varient aussi en fonction des milieux sociaux ; la proportion de ceux qui ne voient jamais leurs enfants est beaucoup plus grande (50%) chez les non-diplômés que chez les diplômés (13%). D’après la même recherche, le paiement de la pension alimentaire varie selon le type de divorce. Il y a ordonnance de pension alimentaire, dans une proportion de 75% lorsque le divorce a été consensuel et de 58% lorsque le litige persiste. Aussi, pour les divorces consensuels, la pension alimentaire est versée dans une proportion de 66% alors qu’elle passe à 55% pour les divorces litigieux.

Ces chiffres démontrent l’importance de préconiser, comme le suggère la médiation familiale, des procédures amiables de gestion des conflits. Une telle pratique pourra diminuer les conséquences négatives de la séparation et amenuiser les effets de la pauvreté au moment où la famille est en réorganisation.

Toutefois, il faut souligner que la monoparentalité n’induit pas nécessairement la fragilité (Segalen, 2006). Cette condition peut être transitoire pour les familles, illustrant le phénomène de « dualisation des destins féminins » contemporain, c’est-à-dire que les jeunes femmes précarisées et des femmes plus diplômées, en situation de monoparentalité, sont en mesure de faire appel à des aides payées.

Au Brésil, peu d’études sur les conséquences du divorce et sur les familles monoparentales sont effectuées, ce qui nous laisse sans chiffres pour les effets d’une étude comparative entre le Brésil et la France. Néanmoins, d’après notre expérience auprès des couples en voie de séparation, les divorces litigieux sont toujours plus difficiles à régler et les pensions alimentaires ne sont habituellement pas payées. Généralement, les contributions alimentaires sont fréquemment associées à l’obtention « du droit de visite ». Comme la principale responsabilité des enfants repose sur les épaules de la mère, celle-ci a tendance à les négocier en fonction de la contribution alimentaire. Parallèlement les pères qui paient une pension alimentaire veulent la reconnaissance qu’ils jouent leur rôle de père.

Martin (1997) a fait les mêmes observations au sujet des couples français. L’obtention d’un droit de visite est habituellement une sorte de contrepartie à la pension alimentaire. De la même façon, il existe une certaine confusion entre le droit et le devoir des parents par rapport à leurs enfants. Dans le sens juridique, c’est l’enfant qui a le droit de recevoir la contribution parentale et les parents, l’obligation de les assister économiquement.

En définitive la monoparentalité et ses conséquences constituent seulement une des nouvelles formes de parentalité de nos jours. Il existe d’autres types comme les familles recomposées et les familles homoparentales.