1.5 La pluriparentalité

Dans les ouvrages qui parlent des familles contemporaines, on retrouve une diversité de néologismes comme : parentalité, coparentalité, pluriparentalité, homoparentalité, chacun ayant ses spécificités et caractéristiques provenant de ces nouvelles configurations familiales. Définissons d’abord ces néologismes.

Le terme « parentalité », adopté de l’ethnologie et de la psychologie, reprend le domaine des relations parents et enfants sans toutefois se limiter à la condition généalogique de filiation, comme cela a été établi dans le concept juridique. Ce terme va plus loin, il implique des liens plus étendus dans l’espace familial, en reconnaissant qu’un enfant peut avoir, au même temps ou régulièrement, dans sa vie, plusieurs adultes exerçant des fonctions parentales. Le parental devient alors une fonction sociale.

Pour Anaut (2005), le terme « parentalité » est couramment utilisé pour décrire l’état d’être parent ou le fait de le devenir. Il renvoie à des compétences d’ordre psychologique et éducatif des personnes en condition de parents. Dans ses conditions, Neirinck (2001) souligne que la parentalité n’est pas la parenté. Deux termes qui ne sont pas synonymes. La parenté renvoie plus à la situation de filiation et de consanguinité, un concept juridiquement adopté.

Un autre néologisme, issu des familles dites contemporaines, concerne le mot coparentalité qui, d’après le dictionnaire « Le Petit Robert », est « l’exercice conjoint des droits et des responsabilités du père et de la mère à l'égard de l'enfant, après une séparation, un divorce ». Ce mot, employé initialement par les sociologues et psychologues français, est apparu suite à l’accroissement du nombre des divorces et des séparations, ainsi que les facteurs qui découlent de cette situation comme, par exemple : l’éloignement des pères séparés ou divorcés dans la vie des enfants. Selon Thèry (1998), le principe de la coparentalité « vise à sécuriser le lien de l’enfant à chacun de ses deux parents, et en particulier à réassurer le lien entre l’enfant, son père et sa ligne paternelle » (p. 194). Ce principe fait référence à la préoccupation des législateurs français vis-à-vis la responsabilité des deux parents auprès de leurs enfants, même après une séparation conjugale. Nous reviendrons plus particulièrement sur ce principe dans le prochain chapitre.

Parallèlement, « la pluriparentalité » est un autre néologisme qui émerge au début du XXIè siècle et qui est apparu dans l’ouvrage de Le Gall et Bettahar (2001). Il s’agit de familles recomposées, de familles d’accueil, de familles adoptives, de familles recourant à la procréation médicalement assistée ou de familles homoparentales qui toutes caractérisent les nouvelles formes familiales que nous trouvons dans les sociétés actuelles.

Selon Fine (2001), la pluriparentalité consiste en plusieurs types de parents sociaux s’ajoutant aux parents de sang. Elle va au-delà d’une logique de substitution d’un parent par un autre, au profit d’une logique de continuité, où peuvent coexister différentes personnes qui participent activement à la vie des enfants. Cette conception remet en question le système de parenté occidental de filiation bi-linéaire, fondé sur le biologique (Segalen, 2006) et le système de filiation caractérisé par la bilatéralité, c’est-à-dire transmise du côté paternel et maternel et par l’idéologie du sang (Fine, 2001).

Les débats actuels, à propos des familles contemporaines, parlent du manque de normativité concernant les parentés additionnelles ou parallèles qui vient de ces nouvelles configurations familiales.

De nos jours, devant l’accroissement du nombre des familles recomposées, le foyer traditionnel à deux parents d’origine biologique constitue, parfois, l’exception plutôt que la règle. Il est courant, dans ces circonstances, que les beaux-parents aient des contacts plus fréquents avec les enfants d’une autre union que les propres parents biologiques, notamment quand le parent ne réside pas avec ses enfants. La difficulté, qu’il y a aujourd’hui, est que ce parent social, pour plusieurs législations (Théry, 1998 ; Cadolle, 2001 ; Segalen, 2006), n’est qu’un tiers, il n’a ni droit, ni devoir à l’égard d’un enfant qu’il éduque et élève. Les législations ne prennent pas en compte la situation des familles recomposées. En tenant compte de la réalité de ces familles, la loi française du 21 février 2002, portant sur l’autorité parentale, a donné un cadre juridique à ces situations familiales. Comme le souligne Commaille (2002), cette loi comprend des dispositions visant à mieux prendre en considération l’existence des tiers dans la vie des enfants. Quand un enfant est séparé d’un proche, notamment d’un beau-parent, le juge pourra concéder à ce dernier un droit à entretenir des relations avec l’enfant.

Ces relations multiples et non reconnues par le droit, qui s’installent entre adultes et enfants, sont aussi une source de conflits qui demandent des formes plus souples et plus appropriées de gestions des conflits que, habituellement, on retrouvent dans les interventions d’un médiateur familial.