A - Validation de la malaria ou paludisme sur le plan scientifique

Depuis l’antiquité, les populations se plaignaient des fièvres fréquentes (malignes, putrides, insidieuses, bilieuses, pernicieuses, comateuses, intermittentes, quotidiennes, doubles, tierces, quartes, etc.) dont les zones marécageuses sont les lieux de prédilection. Ces fièvres causaient de nombreux décès. Des recherches scientifiques ont été initiées pour comprendre ce phénomène et l’on a parlé de fièvres des marais. Pour tenter d’expliquer la survenue de ces fièvres, une théorie, dite de miasme morbide, a été développée et vulgarisée par Hippocrate De Cos, Claude Galien, Ibn Sînâ, Pedanius Dioscoride et Rhazes (P. Aubry, 2005). Celle-ci postule que les fièvres observées chez les populations sont la conséquence des exhalations des eaux stagnantes, des effluves ou des émanations putrides et autres exhalations méphitiques des marais. La théorie de miasmes morbides a prévalu jusqu’au 19e siècle (M. Vaucel et al, op.cit.).

Jusqu’à la fin du 19e siècle, le paludisme reste alors une maladie presque inconnue. C’est le 6 novembre 1880, à Constantine, que A. Laveran 13 fait une découverte qui révolutionne les savoirs sur la maladie et établit l’étiologie du paludisme telle qu’elle est connue actuellement. Il observe, en effet, un élément microscopique parasitant le sang. Pendant une dizaine d’années, ses recherches permettent de classer le parasite responsable de la transmission de la maladie (hématozoaire 14 ) dans l’embranchement des protozoaires, la classe des sporozoaires et le genre plasmodium. L’histoire du paludisme s’enrichit plus tard par l’identification de quatre espèces de plasmodiums qui transmettent le paludisme à l’homme. Ce sont : plasmodium falciparum, plasmodium vivax, plasmodium malariae et plasmodium ovale. Le plasmodium falciparum est le plus répandu et le plus virulent des quatre.

En 1897, D. Ross 15 montre que la transmission du paludisme des oiseaux se fait par un moustique. La découverte des kystes paludéens dans les parois de l’estomac d’un anophèle  ayant piqué un malade atteint de paludisme l’amène ensuite à faire le postulat du même type de transmission pour le paludisme humain. Le moustique incriminé dans cette transmission est l'anophèle femelle. En 1898, les travaux de P. Manson 16 valident cette thèse. Clarac et Bouet font les mêmes observations à Madagascar entre 1902 et 1904. Bien plus, ils établissent une corrélation entre la fréquence, et la gravité du paludisme d’une part, et la dispersion et l’abondance des anophèles d’autre part. Ils remarquent aussi que la destruction des lieux de ponte des moustiques réduit nettement la morbidité due à cette maladie (M. Vaucel et al, op. cit). Telle est l’évolution des connaissances sur la maladie sur le plan scientifique. Il reste maintenant à savoir comment les termes qui la nomment de nos jours ont été introduits dans le langage courant.

Notes
13.

Médecin militaire, ancien élève de Pasteur. Il reçoit le prix Nobel de Médecine en 1907.

14.

Parasites affectent les animaux mais ne sont pas transmissibles à l’homme

15.

Médecin anglais de l'armée des Indes. Il reçoit le prix Nobel de médecine en 1902.

16.

Médecin anglais des douanes chinoise d’Amoy.