7. Lieux non spécialisées (la rue, les bureaux, les transports publics, la maison)

Il est courant d’entendre des gens faire des déclarations sur la maladie dans ces endroits qui, en principe, ne présentent aucune spécialisation par rapport à cette endémie. Ainsi, dans les lieux de service ou à la maison, un aveu du genre : J’ai le palu ⁷³ n’a rien de surprenant. Il appelle le plus souvent la compassion des autres qui ont dû faire l’expérience de la maladie en d’autres temps ou qui sont informés de l’inconfort physique qui accompagnent généralement des accès palustres et des dangers encourus par les patients. Les personnes qui font ces aveux publics reçoivent souvent en retour des conseils de leurs interlocuteurs, notamment sur les médicaments les plus à même de les guérir⁷⁴ rapidement. Souvent aussi, ces conseils sont des indications pour qu’ils évitent d’attraper à nouveau le paludisme une fois remis de la présente crise.

Un phénomène récent a transformé les cars de transports publics interurbains en des lieux de vente de médicaments et gadgets de santé par des personnes sans qualification aucune. Ces individus parlent de plusieurs maladies, y compris du paludisme. Ils en profitent pour vendre des baumes répulsifs pour la prévention des piqûres des moustiques. Les transports publics ont acquis cette spécificité à la suite de la circulation incontrôlée de produits pharmaceutiques venant le plus souvent des pays asiatiques dans le pays.

Nous pouvons conclure en l’existence des lieux de prédilection de l’énonciation des discours sur le paludisme au Cameroun. Toutefois, il faut noter que ces lieux ne sont guère spécifiques ou exclusifs pour ce genre de discours ; on parle en effet du paludisme un peu partout au Cameroun. La conséquence directe en est que les discours standards sont souvent pris dans des interdiscours, ce qui est de nature à influencer positivement ou négativement les pratiques des camerounais sur la prévention de cette maladie.

Avec l’identification des lieux électifs d’énonciation des discours sur le paludisme, nous achevons la présentation des pré-requis annoncés plus haut pour l’existence de tels discours dans l’espace social. Nous pouvons, à présent, tenter de comprendre les différentes stratégies utilisées pour leur construction.