A - Discours de santé publique sur le paludisme au Cameroun

Ces discours, à l’instar de ceux de la période d’avant 1992, intègrent les énoncés standards sur les causes et la transmission de la maladie. Toutefois, ils se focalisent peu sur l’élimination du vecteur de la maladie, le moustique, comme c’était le cas lorsque les efforts visaient encore à éradiquer le paludisme du pays. Ils ont beaucoup plus trait à la protection des individus contre les piqûres des moustiques qui transmettent la maladie et à la prise en charge des accès palustres dans les formations sanitaires. La nuance à relever ici est que ces discours mettent un accent particulier sur la formation sanitaire comme le lieu recommandé à consulter par les patients dès l’apparition des premiers symptômes de la maladie. Concomitamment, ces discours relèvent le renforcement de l’éducation sanitaire dans les communautés pour faciliter l’identification des symptômes de la maladie.

Ainsi, les discours de santé publique sur le paludisme au Cameroun pendant cette période sont caractérisés par :

• L’éducation sanitaire dans les communautés pour l’utilisation des mesures d’hygiène et d’assainissement permettant de lutter contre la prolifération des moustiques ;
• L’incitation à recourir à une formation sanitaire pour la prise en charge précoce des accès palustres. Cet aspect du discours de santé publique apparaît clairement dans les messages de sensibilisation déclinés sur plusieurs supports de communication et dont la quintessence est : Si vous avez des frissons et des maux de têtes fréquents, surtout en fin de journée, c’est peut-être le paludisme. Allez rapidement à l’hôpital ;
• L’identification de la femme enceinte et de l’enfant de moins de 5 ans comme les cibles les plus fragiles de la maladie. Afin de les amener à mieux se protéger du paludisme, le programme national de lutte contre cette maladie recommande la moustiquaire pour la protection de ces deux cibles et la prise quotidienne de la chloroquine par la femme enceinte pendant toute la durée de sa grossesse.
• Enfin, ces discours relèvent, au fil des ans, l’augmentation de la résistance du plasmodium à la chloroquine et recommandent l’utilisation alternative d’autres antipaludéens plus efficaces.

Tableau 6 : Spécimen de messages au cœur des discours de santé publique sur le paludisme pendant la décennie 1990

(Source : Présent travail à partir des messages de sensibilisation pendant cette période.)

Le tableau 6 ci-dessus donne des spécimens de messages de santé publique au cœur de ce type de discours. Dans les activités de sensibilisation, ils sont déclinés sur différents supports de communication. Sur les supports scripturaux spécifiquement comme les affiches et les dépliants par exemple, ils sont souvent complétés par des messages iconographiques montrant les cibles des messages en train d’exécuter l’action recommandée. Des exemples de ces messages illustrés sont en annexe du présent travail.

De manière générale, les discours de santé publique sur le paludisme au Cameroun pour la période allant de 1992 à la fin du second millénaire s’inscrivent dans une logique qui concentre les efforts sur l’évitement des piqûres des moustiques, notamment par l’utilisation de la moustiquaire, l’éducation sanitaire dans les communautés et l’encouragement des individus à recourir à une formation sanitaire pour la prise en charge précoce des cas d’accès palustres. Ce type de discours poursuit la mue qu’elle avait amorcé lors de la période d’avant 1992 en s’inscrivant dans un programme, exécuté dans le cadre d’un système de santé en pleine reforme. Il importe aussi de remarquer que ces discours mettent peu d’accent sur les mesures visant à lutter contre la prolifération du vecteur de la maladie dans le pays et se concentrent plus sur la riposte contre les piqûres de moustiques, c’est-à-dire sur les préventions secondaire et tertiaire des cas de paludisme. Les discours économiques sur la prévention seront-ils révélateurs d’un environnement favorable pour accompagner ce choix stratégique de lutte contre la maladie ?