2. Marqueurs culturels des représentations sociales du paludisme au Cameroun

E. Hillenbrand (op cit.) indique que pour des raisons économiques, les Camerounais, indépendamment de leur rang social et de leurs origines, ont recours à la médecine traditionnelle. Pourtant, ils n’abandonnent pas la médecine moderne. Les guérisseurs traditionnels sont donc des gardiens d’une culture médicale traditionnelle dans laquelle les maladies renvoient à des représentations précises. D.N. Lantum (1978) constate toutefois que le guérisseur traditionnel, peut être un naturopathe, un herboriste ou un tradi-thérapeute ou tradi-praticien. Ces différents termes sont synonymes, mais ne désignent pas nécessairement les mêmes personnes. Le guérisseur traditionnel est un tradi-thérapeute ou un tradi-praticien car il est, en principe, le dépositaire des savoirs et pratiques séculaires de la médecine traditionnelle. A contrario, le naturopathe et l’herboriste sont des guérisseurs qui utilisent les éléments qu’ils recueillent directement dans la nature (plantes, herbes, écorces d’arbres, etc.) pour traiter leurs patients. Le naturopathe et l’herboriste ne sont pas des guérisseurs traditionnels dans le sens que nous venons de l’expliquer, mais, tous sont des agents de santé qui posent aujourd’hui des diagnostics sur des maladies en se représentant généralement les pathologies comme le recommandent leurs cultures. A ces représentations séculaires des maladies, Ils ajoutent, de temps à autres, les représentations courantes de la médecine conventionnelle.

Force est de noter que c’est surtout en milieu rural que le guérisseur traditionnel continue à conserver les acquis culturels liées à la cause, la manifestation, la désignation et la prise en charge des maladies. En milieu urbain, on note de plus en plus un rapprochement entre certains guérisseurs traditionnels et le personnel de la médecine conventionnelle. Ce rapprochement se fait par des contacts réguliers ou la référence des malades d’une des formes de médecine à l’autre. La conséquence directe de ce travail en concertation est la dégradation progressive des éléments culturels clé de la médecine traditionnelle par l’incorporation progressive dans celle-ci des éléments de diagnostic et de prise en charge empruntés à la médecine conventionnelle.

S’agissant singulièrement du paludisme au Cameroun, ce rapprochement des deux formes de médecine nous suggère de rechercher les représentations de la maladie dans les véhicules de communication que sont les langues locales. La façon de designer les maladies renvoie le plus souvent à l’appréhension de celles-ci par les groupes de populations locutrices d’une langue quelconque depuis des temps immémoriaux.