A - Contenu des représentations sociales du paludisme au Cameroun

Le dépouillement des résultats d’enquête s’est fait en plusieurs étapes :

(a) D’abord le recueil des idées, images ou croyances qui viennent à l’esprit de l’enquêté à l’écoute des mots suivants : paludisme au Cameroun. Cette perception de l’enquêté était le plus souvent indiquée soit par un mot ou un groupede mots, appuyé éventuellement par des explications telles que prévoit le formulaire d’enquête. Dans certains cas aussi, à défaut de trouver un mot ou un groupe de mots qui cristallisent la perception, l’enquêté en a donné des explications.

(b) Ensuite, nous avons tenté un regroupement des perceptions. Au total, les 7 tendances de perception ci-après ont été identifiées :

• Santé ou maladie : ici nous avons rangé toutes les perceptions de l’enquêté renvoyant à ces deux concepts. Dans cette tendance, l’on a noté les différents symptômes de la maladie, les modes de transmission, les cibles ou des allusions à la santé (bonne ou mauvaise) telles que données comme représentations par les enquêtés. L’on a retrouvé ici des expressions comme : moustiques ; eaux stagnantes ; souffrances ; maladie redoutable ; maladie qui tue beaucoup chez nous, grave problème de santé ; piqûres des moustiques la nuit ; moustiquaires imprégnées ; tuer les moustiques ;prescriptions variées des médecins ; Caniveaux non nettoyés ; marécages ; Distribution MII mais utilisation par peu de ménages, etc.
•  Economique : dans cette tendance, nous avons rangé toutes propositions en rapport avec l’économie. Il s’est agi notamment : du poids économique de la maladie, du coût élevé des médicaments ou de la pauvreté des individus exposés au paludisme. Les expressions suivantes sont revenues : les médicaments coûtent cher ; argent ; tout faire pour vite se soigner ; si tu n’as pas d’argent, tu meurs ; à l’hôpital, il faut l’argent pour se soigner, pharmacies, les nouveaux médicaments coûtent cher, anti-moustiques "moon-tiger" ¹⁰⁴ , maladies qui font vivre certaines personnes, etc.
• Politique : cette tendance a accueilli toutes les représentations des enquêtés en rapport avec l’organisation politique du pays pour lutter contre la maladie. Celles-ci sont allées des éléments renvoyant à l’accessibilité géographique des structures sanitaires aux impressions laissées par les interactions entre les patients du paludisme et le personnel soignant. Selon certains enquêtés, des agents de santé seraient affectés aux postes qu’ils occupent en raison des considérations politiques pas toujours en faveur d’une bonne prise en charge du paludisme dans le pays. Voici quelques éléments des déclarations des enquêtés : hôpitaux loin des villages ; personnel de santé affecté en fonction de la coloration politique des décideurs ; personnel peu accueillants dans les centres de santé ; infirmiers vendant des moustiquaires sans être inquiétés ; maladie qui fait employer des hommes et des femmes ;
• Stratégique : Cette tendance a accueilli toutes les propositions faisant allusion à un apport extérieur au Cameroun pour la lutte contre le paludisme. Certains enquêtés ont fait mention d’organisations internationales dans leurs représentations. Les explications qu’ils en ont données ont été que celles-ci influencent les stratégies de lutte contre le paludisme ou encore qu’elles appuient financièrement la lutte contre cette endémie dans le pays. Pour cette catégorie, les enquêtés ont souvent simplement marqué comme représentations : OMS ; FMI ; organisations internationales ; maladie peu intéressée par la communauté internationale à la différence du SIDA etc. et ils ont donné les explications sus-évoquées.
• Affaire du village : Dans cette catégorie, les enquêtés ont donné des imagesindiquant l’acception populaire courante des causes et manifestations du paludisme chez certains individus ou certaines communautés dans le pays. Ainsi par exemple, des représentations suivantes ont été souvent mentionnées : Avortement, Traitements traditionnels ; humidité, fraîcheur, consommation de fruits crus, Humidité, aliments crus, pluies ; détournements par les marabouts et charlatans ; traitement traditionnel ; Eglises, prières de guérison, etc.
• Surnaturel : Certaines des images ou pensées indiquées par les enquêtés étaient difficiles à mettre en rapport avec la survenue de la maladie. C’est le cas des représentations comme : sorcellerie ; esprits fâchés ; sort lancés à des personnes, etc.
• Autres : Cette dernière tendance s’est imposée parce qu’un certain nombre de propositions de représentations ne rentraient dans aucune des catégories précédentes. A certains moments, elles s’éloignaient largement des considérations purement médicales ou de santé. Voici quelques exemples d’idées, de croyances ou d’images qui viennent à l’esprit des quelques personnes enquêtées à l’évocation des mots inducteurs : batailles rangées dans les projets ; dons de médicaments par les députés ; fonds détournés ; femmes enceintes et début de grossesse ; gros achats, argent géré sans transparence, refus des labos d'investir dans les vaccins, duperies des ONG, détournement des fonds.