Dans un premier temps, il est important de distinguer la différence entre logement et hébergement. Dans le cas du logement, même temporaire, les locataires ont un statut d’occupation (bail ou contrat de résidence) avec des droits (droit commun qui garantit le maintien dans les lieux et réglemente l’expulsion) et des devoirs (payer son loyer et entretenir l’habitation louée). Les personnes paient un loyer et peuvent si besoin, bénéficier des aides personnalisées au logement versées par la caisse d’allocation familiale (CAF).
Dans le cas de l’hébergement, il n’y a aucun titre d’occupation. Un contrat peut être parfois signé entre l’hébergé et le centre, mais celui-ci est plus un outil éducatif qu’une pièce juridique. Les bénéficiaires (car ils ne sont pas locataires) ne paient pas de loyer, mais paient éventuellement une participation aux frais d’hébergement qui doit être proportionnelle aux ressources. Ces personnes ne bénéficient pas des protections et des droits des locataires (Par exemple ils n’ont pas le droit à l’APL et sont soumis à un règlement intérieur). Ainsi, la fin de l’hébergement peut être ordonnée par les responsables du centre d’hébergement pour le simple motif de non-respect du règlement intérieur, ou pour le fait que la personne ne respecte pas le contrat engagé avec le centre (démarche d’insertion, de soin, etc.…). En résumé l’hébergement est provisoire et le bénéficiaire n’est pas chez lui.
Depuis mars 2007, le secteur de l’hébergement est construit sous la forme de trois dispositifs qui ont une volonté de continuité entre eux.
L’hébergement d’urgence est défini comme un accueil inconditionnel, c'est-à-dire sans sélection des publics, de courte durée et souvent seulement pour la nuit. Les personnes doivent en général quitter le centre vers 8h du matin. C’est un hébergement collectif, soit sous forme de dortoir ou de petites chambres de 2 à 4 personnes. Les chiens, compagnons fidèles de nombreuses personnes en errance, n’y sont pas toujours acceptés ou doivent dormir dans un chenil. Cette situation entraîne souvent les personnes qui ont des chiens à refuser de fréquenter ces centres. Certaines associations essayent de trouver des solutions à ce problème.
Depuis mars 2007, le plan d’accueil renforcé pour les sans-abris (PARSA) prévoit de transformer des places d’urgence en places de stabilisation. Alors que l’urgence prévoyait d’accueillir les personnes quelques jours par mois, l’hébergement en stabilisation a comme avantage d’accueillir sur des périodes beaucoup plus longues (De un à trois mois consécutifs) permettant ainsi aux sans-abris de ne pas avoir à rechercher tous les soirs un nouveau mode d’hébergement. De plus ces centres sont maintenant ouverts la journée et les personnes ne sont plus contraintes de passer toute la journée dans la rue. Ils disposent d’un financement plus conséquent, mais en contrepartie doivent mettre en place un suivi social auprès des personnes accueillies et signer un contrat avec l’usager. Alors que la loi prévoit que toute personne qui demande une place de stabilisation doit pouvoir en bénéficier, certains professionnels observent que certaines personnes sont obligées d’attendre plusieurs semaines avant qu’une place se libère.
L’hébergement d’insertion se caractérise par la sélection du public accueilli, par l’élaboration d’un projet d’insertion et par un accueil de plus longue durée. Le séjour n’est plus limité dans le temps, mais il est en moyenne de dix-huit mois. Les personnes sont hébergées en général dans une chambre individuelle et bénéficient d’espace collectif (cuisine, salle à manger, télévision,…). Se développent aussi des structures en hébergement éclaté, où les personnes sont hébergées dans des studios ou des appartements répartis sur différents quartiers de la ville.
La première différence entre les trois types d’hébergement est la sélection de la population : l’urgence est inconditionnelle, la stabilisation demande aux usagers de s’engager progressivement dans un processus d’insertion sociale, mais la sélection n’est pas encore d’usage, alors que l’insertion demande que l’usager ait un projet d’insertion sociale et/ou professionnelle. Malgré ces contraintes, le nombre de demandeurs répondant aux critères est depuis quelques années largement supérieur au nombre de places disponibles ce qui entraîne de fait à devoir sélectionner le public. Cette distinction voudrait qu’il existe un continuum entre ces deux niveaux. Un premier qui accueillerait tout le monde sans critère ni condition, mais pour une courte durée et qui renverrait ensuite à un deuxième niveau, composé de structures diverses, sélectives, mais assurant un hébergement plus long en vue de réussir le travail d’insertion. Avec les places de stabilisation une étape intermédiaire a été créée, mais on peut douter qu’elle suffira à améliorer le dispositif. En effet, comme nous le verrons, la passerelle entre urgence et insertion ne semble pas aussi évidente dans la pratique et de nombreuses personnes se retrouvent cantonnées à l’urgence et à la stabilisation. L’autre difficulté est qu’avec la crise du logement, la mobilité dans le secteur du logement social est ralentie. Ce phénomène freine le passage de l’hébergement au logement et pose la question de la fluidité des parcours. Mais avant de traiter cette question, il est préférable de bien comprendre le fonctionnement des CHRS d’insertion.
Les chiffres sont issus du rapport réalisé par la commission des affaires sociales du sénat. Consultable sur : http://www.senat.fr/rap/a08-103-8/a08-103-81.pdf