Parie 6 : Modélisation du jugement de la nécessité d’aider

1. Hypothèses de recherche

Notre première étude a permis de mettre en lumière les critères sur lesquels les travailleurs sociaux s’appuient pour effectuer un choix entre les demandeurs. Il en est ressorti que la « Motivation » qui est un critère non défini par la loi se trouvait dans le noyau central de la représentation sociale. Il a été observé également que certains critères comme « L’alcoolisation », « La violence », « Les troubles psychiques » et le « manque d’autonomie » étaient considérés comme des critères négatifs pour être admis en CHRS d’insertion. D’autre part, il a été montré qu’il existait une évolution des représentations de ces critères d’admission au cours de la formation professionnelle et que par conséquent il était possible d’émettre l’hypothèse de l’existence d’une culture professionnelle qui se construit au cours de la formation.

La deuxième enquête a permis de voir comment les travailleurs sociaux de notre échantillon intègrent et évaluent des informations à propos de personnages fictifs décrits à l’aide des critères dégagés par notre première enquête. Il a été montré que les cinq critères d’admission présentés pour cette recherche étaient bien intégrés par l’ensemble des participants. Il a été confirmé que lors de l’évaluation, le critère « Motivation » était prépondérant et qu’il prenait une place plus importante que le niveau d’isolement social et l’urgence face au logement du demandeur. Il a été vu également que les travailleurs sociaux utilisaient, partageaient, voire transmettaient des stéréotypes sur des informations comme l’alcoolisation.

Pour cette dernière enquête, il sera recherché le modèle d’intégration algébrique que les travailleurs sociaux utilisent pour élaborer leur jugement de la nécessité d’aide. En effet, Anderson (1981) a montré qu’il était possible de modéliser la manière dont les individus élaborent leur jugement à la condition de connaître au préalable l’algèbre cognitive qu’ils utilisent. Cette connaissance est donc indispensable pour élaborer la modélisation du jugement de la nécessité d’accueillir une personne en CHRS d’insertion. En effet, jusqu’au niveau actuel de la recherche, nous connaissons les critères sur lesquels les travailleurs sociaux s’appuient et savons que le critère de la motivation est essentiel. En découvrant le modèle algébrique, il sera possible de décrire le processus cognitif du jugement de la nécessité d’aide. Par exemple, apprendre qu’un groupe de personne élabore son jugement sur un modèle de la moyenne, permet de savoir qu’il est inutile de fournir toutes les qualités de la personne à évaluer, mais de mentionner seulement les plus importantes. Compte tenu des travaux d’Anderson (1981) qui a montré que l’évaluation de sympathie d’une personne s’effectue à partir d’un modèle algébrique de type moyenne, nous émettons l’hypothèse que les travailleurs sociaux fonctionnent sur un modèle algébrique de type additif et plus particulièrement sur celui de la moyenne. Les résultats de notre dernière recherche ont souligné que très peu d’interactions significatives apparaissaient et que le critère de la motivation était très important. Nous émettons l’hypothèse que les travailleurs sociaux élaborent leur jugement de la nécessité d’accueillir une personne en CHRS sur un modèle de moyenne pondérée. D’autre part, nous souhaitons vérifier s’il existe des différences de d’élaboration du jugement entre les professionnels et les étudiants et entre des professionnels qui travaillent dans des secteurs différents (Urgence et insertion).