b) Diptyques

A notre connaissance, deux diptyques-reliquaires peints sur panneaux sont conservés sur le territoire de la Pologne1248. Le troisième diptyque, provenant de Poméranie, est une création de l’orfèvrerie gothique (fig. 99)1249. Ce reliquaire d’argent doré, créé en 1388 pour le commandeur teutonique Thiele von Lorich, aurait été pris comme butin pendant la bataille de Grunwald en 1410 et déposé par Ladislas Jagellon dans la cathédrale de Gniezno1250. C’est un des plus anciens et des plus précieux petits autels incrustés de reliques conservés en Pologne. D’autres exemples, datés du XVe siècle, élaborés en bois polychrome étaient, d’après des remarques de Kinga Szczepkowska-Naliwajek, des interprétations moins couteuses des œuvres d’orfèvre-
rie1251. La structure du diptyque, similaire à celle du plenarium 1252, est composée de cinquante-huit logettes à reliques disposées autour des figurations. Le même schéma se retrouve dans les diptyques-reliquaires peints sur panneau, provenant des ateliers cracoviens.

Le diptyque-reliquaire du trésor de la cathédrale de Wawel est daté, selon les mentions d’archives déjà citées, entre 1440 et 1450 (Pl. V)1253. Sa datation est pourtant problématique, car les peintures des volets ne sont homogènes ni du point de vue du style ni pour ce qui est de la technique de leur élaboration. La Vierge de type cracovien sur le panneau miniature du volet gauche (fig. 25)1254, démontre une aisance certaine de l’artiste à poser d’épaisses couches de peinture, mais elle n’est pas achevée dans les détails1255. En revanche, l’effigie christique du volet droit – d’une texture différente, vitreuse, peinte sur des couches en résine –, fut apparemment découpée d’un autre tableau et placée sur verre1256. Les deux images sont incluses dans les panneaux composés de plusieurs reliquaires. D’après l’analyse stylistique établie par Gadomski, l’encadrement du diptyque ainsi que la représentation mariale furent créés autour de la moitié du XVe siècle. Mais la Sainte Face, introduite en même temps, est sans aucun doute plus ancienne1257. Par contre, le diptyque du Musée diocésain de Sandomierz (Pl. VI-VII) avait reçu une double décoration picturale des côtés recto-verso1258. A l’intérieure, deux images de petites dimensions sont enfermées dans de larges encadrements-reliquaires dorés et décorés de cabochons modelés dans un enduit. Des éléments du style doux qui impliquent d’emblée des traits géométrisés (des plis devenant plus raides), et leur comparaison avec d’autres peintures similaires sont à la base de la datation de ce diptyque au début du troisième quart du XVe siècle, que propose Helena Małkiewicz1259. Les représentations cracoviennes se référent incontestablement au schéma du diptyque-reliquaire répandu dans le monde médiéval dès le XIVe siècle. Nous allons revenir sur cette question dans les pages qui suivent ; d’abord dans l’analyse iconographique des œuvres polonaises1260, et ensuite dans leur étude comparative avec d’autres créations provenant des territoires européens1261.

Notes
1248.

Catalogue : III.A, n° 2, 5.

1249.

Voir E. VON CZIHAK, Die Edelschmiedekunst in Preußen, Leipzig 1908, vol. 2, p. 150 ; D. SOKOLICKA, Relikwiarz z Elbląga z 1388, (dans :) M. Walicki (éd.), Studia Pomorskie, vol. I : 1957, p. 155 ss, fig. I-II ;A. BOCHNAK, Eksport z miast pruskich w głąb Polski w zakresie rzemiosła artystycznego, (dans :) Ibid., vol. II : 1957, p. 24, fig. 16-17 ; K. SZCZEPKOWSKA-NALIWAJEK (dans :) Die Parler und der schöne Stil… 1978, vol. 2, p.522-523 ; Eadem, Złotnictwo gotyckie Pomorza Gdańskiego, Ziemi Chełmińskiej i Warmii, Wrocław-Warszawa 1987, p. 60-68, fig. 43-46, cat. n° 28 ; M. WOŹNIAK, Das Reliquiendiptychon des Elbinger Hauskomturs Thilo von Lorich, „Anzeiger des Germanischen Nationalmuseums”, Nürnberg 1992, p. 51-62 ; PREISING, op. cit., p. 34-35, cat. n° 50 ; SZCZEPKOWSKA-NALIWAJEK 1996, p. 183 s., fig. 50.

1250.

Voir note supra ; « Muzeum Wojska Polskiego » Varsovie, [en ligne] http://www.muzeumwp.pl .

1251.

SZCZEPKOWSKA-NALIWAJEK, loc. cit.

1252.

Plenarium ou plenarius – le nom donné aux livres qui renfermaient les épitres et les évangiles ou l’office particulier d’une fête, cf. (dans :) L.-F. JÉHAN, Dictionnaire des origines du christianisme (...), (éd.) J.-P. Migne, Paris 1856, p. 978. Voir Buchreliquiar (dans :) Reallexikon zur Deutschen Kunstgeschichte, [en ligne] http://rdk.zikg.net/gsdl/cgi-bin/library.exe .

1253.

Voir supra § 1.2, 2 ; Catalogue : III.A, n° 2.

1254.

Chap. Ier, § 4.2.2.

1255.

GADOMSKI 1978, p. 313 ; Idem 1981, p. 113 s. ; Idem 2000, p. 69.

1256.

Cf. note supra.

1257.

Idem 1981, p. 114.

1258.

Catalogue : III.A, n° 5.

1259.

MAŁKIEWICZ, loc. cit.

1260.

Voir infra § 4.

1261.

Chap. VII, § 1.