I. Les saints

Les figurations des saints dans les tableaux-reliquaires polonais sont rares. Nous ne disposons que d’un exemple de panneau unique, où une sainte est présentée dans le même espace pictural que la Vierge (Pl. XXVIII). La représentation de la Vierge à l’Enfant avec sainte Ursule provient déjà de la dernière phase de l’époque médiévale1374. Il n’est pas très évident de savoir pourquoi sainte Ursule fut honorée dans le tableau. D’une part, on peut supposer qu’un tel contenu était le choix du commanditaire, mais aucune source historique n’est susceptible de confirmer cette présomption1375. D’autre part, la présence de reliques attribuées à des « onze mille vierges » (selon un authentique conservé dans le reliquaire : R. XI MILIA VIRGINUM1376) dont le martyre aurait suivi d’après la légende celui de la sainte1377, est en mesure d’expliquer l’introduction de son effigie dans le tableau.

Les représentations mariales accompagnées de saintes vierges étaient répandues surtout dans des compositions des retables et des panneaux portatifs à volets. Le programme iconographique des triptyques-reliquaires est basé, en règle générale, sur le même schéma. Le portrait de la Vierge à l’Enfant, placé dans le panneau central contenant des logettes à reliques, est flanqué des figurations des saintes Catherine (à dextre) et Barbara (à senestre), comme le démontre l’exemple du triptyque « de Konopka » (Pl. XIII) et celui de la chapelle des Pelletiers (Pl. XV). Nous pensons que c’était aussi le cas d’un troisième triptyque, dont le panneau central est conservé au Musée de Varsovie ; un des authentiques évoquant sainte Catherine se rapporterait aussi bien à ses reliques qu’à son portrait placé sur le volet disparu1378.

Il nous faut enfin constater, qu’à part Ursule, Barbara et Catherine on ne trouve pas d’autres effigies de saints dans les tableaux-reliquaires polonais. Redisons ici que la présence des reliques d’un saint n’exigeait pourtant pas une confirmation dans une image, et que l’iconographie de l’image ne dépendait pas non plus des reliques qui y étaient incluses.

Notes
1374.

L. LEPSZY, Muzeum Diecezjalne w Tarnowie, „Teka GKGZ”, 2 : 1906, p. 328, n° 41 ; F. KOPE-
RA, Dzieje malarstwa w Polsce. Średniowieczne malarstwo w Polsce, Kraków 1925, t. I, p. 211, reprod. 182 ; DOBROWOLSKI 1935, p. 228 ; W. JUSZCZAK, Tryptyk bodzentyński, (dans :) M. Walicki(dir.), Studia Renesansowe, Wrocław-Warszawa-Kraków 1963, t. 3, p. 309 ; J. GADOMSKI, Gotyckie malarstwo tablicowe Małopolski 1500-1540, Warszawa-Kraków 1995, p. 94, 96, 99, reprod. 159.

1375.

Constatons que le vocable de l’église paroissiale, dans le lieu de provenance du tableau (Porąbka Uszewska), ne fut jamais lié à sainte Ursule. Il est possible que l’image ait été créée à l’instigation d’une fondatrice dont la patronne était la même sainte. En revanche, il est peu probable que le tableau ait été jadis exposé dans la chapelle du château de Dębno situé aux alentours, celle-ci portant le vocable de Tous les saints, ce que présumaitsuite à notre conversation en 2002, T. Bukowski, directeur du Musée diocésain de Tarnów, où ledit tableau-reliquaire est déposé. Enfin, L. Luchter-Krupińska, conservatrice du château, a constaté que faute de documents une telle présomption semble erronée.

1376.

Catalogue : III.A, n° 17.

1377.

Nous savons que cette légende des onze mille vierges repose sur une lecture fautive de l’inscription XI.M.V., qu’il faudrait traduire par « onze martyres et vierges » (undecim martyrum virginum), cf. par ex. A. MICHIELS, Histoire de la peinture flamande, Paris 1866, t. IV, p. 73 ; G. DE TERVARENT, La légende de Sainte Ursule : dans la littérature et l’art du Moyen Âge, Paris 1931, p. 12 ; M.-P. TERRIEN, La christianisation de la région rhénane : du IV e au milieu du VIII e siècle, Besançon 2007, p. 64.

1378.

Catalogue : III.A, n° 14.