C. Joseph (Migr., 16-24)

Le cas de Joseph, auquel Philon s’intéresse longuement, doit être compris comme une extension du développement sur l’Exode : il se situe directement à la suite de l’introduction de la réflexion sur l’Exode, et il se conclut par un retour à la figure de Moïse.

Joseph ne fait pas partie à proprement parler des patriarches, mais il est, avec les trois patriarches que sont Abraham, Isaac et Jacob, ainsi qu’avec Moïse, l’une des figures les plus importantes de l’exégèse de Philon, se voyant même consacrer un traité dans l’Exposition de la Loi, à l’égal d’Abraham et de Moïse, et sans doute encore d’Isaac et Jacob pour qui les traités sont perdus. Il représente cependant souvent un niveau de vertu et d’exemplarité inférieur, en tant que figure de l’homme politique en partie prisonnier des réalités sensibles dont il a la charge. Sa présence dans ce traité, après les deux exemples fondamentaux d’Abraham et de Moïse, peut donc surprendre. Elle s’explique pourtant en partie, semble-t-il, par cette imperfection. Le développement que lui consacre Philon met en effet en valeur deux points : le premier est que la figure de Joseph constitue une forme d’annonce et d’espérance de l’Exode, ce qui permet de souligner l’importance et la nécessité de ce dernier ; le second est le problème que pose la réalisation de l’Exode pour un être attaché à l’Égypte, c’est-à-dire au corps. La notion d’Exode s’applique bel et bien à lui, mais d’une manière plus complexe que Philon s’attache à mettre en lumière en présentant toutes les vertus de Joseph, et la façon dont une partie de lui-même, à savoir précisément ces vertus, pourront vivre l’Exode.

Pour faciliter la présentation de ce passage relativement long, nous l’étudierons en plusieurs étapes, selon ses articulations successives.