A. Jacob : une deuxième voie (Migr., 25-28)

L’amorce de ce développement reprend formellement, avec la figure de Jacob, le passage de Moïse à Joseph observé précédemment. En effet, revenu à Moïse après avoir présenté le cas de Joseph, Philon poursuit son exégèse en rappelant que le Législateur prescrit d’accomplir l’Exode avec rapidité. Or, il expose que cet impératif peut cependant être relativisé dans certains cas, représentés par l’histoire de Jacob. Le développement qui s’ouvre est une forme de répétition de la trame qui voyait Philon aborder l’Exode en lui-même, puis en préciser une modalité particulière à travers la figure de Joseph : partant de la réalité fondamentale et centrale qu’est l’Exode, Philon s’attache à un cas particulier ou problématique.

Nous verrons que ce passage pose toutefois des problèmes de composition plus complexes, à deux titres. Tout d’abord, avec Jacob, ce n’est pas seulement une nouvelle modalité de l’Exode qui est présentée, mais une véritable deuxième voie, qu’il faudra situer dans l’argumentation d’ensemble de Philon. Ensuite, la citation autour de laquelle s’organise la présentation du cas de Jacob (Gn 31, 3) constitue, même si cela n’est pas explicite chez Philon, un écho du lemme commenté jusqu’à présent, à savoir la quasi totalité de Gn 12, 1, en même temps que l’amorce du commentaire de la fin du verset : après avoir parlé de la migration sous l’angle du départ, il commence à en évoquer le terme, la terre où celle-ci conduit. Ces deux éléments importants de composition, qui pourraient suggérer le passage à une nouvelle étape du commentaire, peuvent néanmoins s’intégrer de façon cohérente à l’ensemble exégétique dont nous avons dégagé les grandes lignes en introduction, qui conduit d’Abraham jusqu’à Isaac : le terme de la migration est réellement déjà intégré dans la réflexion générale sur la notion de migration à partir de l’exemple d’Abraham.