1-2-6- La parentalité

‘« Au fond, ce que veut souligner le concept de parentalité, c’est qu’il ne suffit ni d’être géniteur, ni d’être désigné comme parent pour en remplir toutes les conditions, encore faut-il « devenir parent », ce qui se fait à travers un processus complexe impliquant des niveaux conscients et inconscients du fonctionnement mental ». (D.Houzel, 2002, p.62)’

Le terme de parentalité est un mot récent dans le champ de la psychiatrie. Il a été introduit par R.Clément en 1985 à l’occasion d’un article paru dans la revue Le groupe familial. La parentalité est un processus au coeur de la périnatalité psychique et qui s’amorce avec le désir d’enfant.

La parentalité

‘« n'est pas une instance de la personnalité, mais plutôt un secteur de fonctionnement de celle-ci ; elle est à rapprocher du concept de relation d'objet, dont elle constitue un sous-ensemble particulier et essentiel : à savoir la relation d'objet à l'enfant, que celui-ci soit imaginaire ou réel » (S.Stoléru,1998).’

D.Houzel dégage trois dimensions de la parentalité, étroitement imbriquées les unes aux autres : l’exercice de la parentalité, l’expérience et la pratique de la parentalité. Selon D.Houzel (Op.Cit), ce qui définit l’exercice de la parentalité dans nos sociétés de droit écrit sont les aspects juridiques de la parenté et de la filiation. Les liens sociaux sont régis par des règles de transmission, avec des liens complexes d’appartenance, d’alliance et de filiation.

L’expérience de la parentalité correspond aux vécus subjectifs, dans leur dimension consciente mais également inconsciente, liés à l’expérience du devenir parents. Cette expérience de la parentalité est étroitement en lien avec le désir d’enfant qui l’a inaugurée et « le processus de transition vers la parentalité , la parentification » (p.66).

Quant à la pratique de la parentalité, elle concerne tous les soins parentaux apportés à l’enfant, soins tout autant physiques que psychiques.

Les « nouvelles » formes d’accès à la parentalité qui se développent aujourd’hui avec les techniques médicales interrogent le lien entre la parentalité et le biologique. La mise en avant et la défense du lien biologique peut rapidement conduire à une désymbolisation du lien parental. Lorsque le devenir-parent se trouve en défaut d’appui sur l’expérience du corps, faut-il considérer que la parentalisation se trouve fragilisée, tant au plan intrapsychique qu’intersubjectif ? L’appel à un tiers médical et/ou social pour accéder au devenir-parent comporte-t-il un risque de fragilisation ? Comment penser un lien à l’enfant qui soit parental sans être biologique ?

Les couples rencontrés dans les unités de néonatologie ont souvent fait appel à des techniques reproductives spécifiques (c’est le cas pour une partie de notre échantillon). L’augmentation du taux de prématurité est en partie liée au développement de ces nouvelles techniques. Le taux de prématurité est cinq fois plus élevé chez les enfants issus de la procréation médicalement assistée (PMA) que dans la population générale (M.Dehan,1994).

La conception de l’enfant, assistée par le médecin ou à laquelle le médecin assiste, évoque une scène primitive non plus à deux mais à trois. Dans quelle mesure cette médicalisation de la conception influence-t-elle la dynamique du couple et comment se traduit-elle dans la relation parent-enfant imaginaire et/ou réel ?

Si notre travail de recherche n’aborde pas spécifiquement ces questions, il interroge toutefois le devenir-parent dans son rapport au tiers médical. Dans le cas des naissances prématurées, le biologique fait défaut et contraint les parents à faire appel à la médecine. Si les médecins n’interviennent pas dans la conception de l’enfant, la vie de l’enfant dépend de leurs soins et les parent attendent que les médecins décident du retour à domicile de leur l’enfant.

Aussi la néonatologie, en se développant, donne-t-elle à réfléchir à la construction d’une parentalité singulière, au sein d’un univers hautement technologique en présence de soignants et avec une incertitude permanente sur le devenir de l’enfant.