1.7– Intérêts et pertinence de l’étude

Notre étude permettra de comprendre pourquoi des personnes préparées à une action ne la réalisent toujours pas. Elle met également en évidence l’insuffisance de l’influence des croyances sur la préparation psychologique des individus face au VIH/Sida.

Un précédent travail, mené au Mali, a montré que la majorité des personnes qui sont convaincues de l’existence du VIH/Sida ont connu dans leur entourage proche (famille, amis, voisins…), une personne malade ou décédée du Sida (Castle, 2003). Des preuves, des données, des explications pourrait-on dire, sont donc nécessaires pour que l’information soit acceptée et utilisée. Notre étude veut montrer que la croyance à elle seule ne suffit pas pour garantir l’adoption des méthodes préventives chez les individus. Car, même après avoir vu des individus mourir du Sida, certaines personnes ont toujours des rapports sexuels non protégés et à risques, avec des partenaires multiples. C’est par exemple le cas des médecins infectés dont les patients souffrent et meurent du Sida au quotidien.

Au plan théorique, nous nous proposons de lire l’incidence de l’inertie cognitive sur la résistance au changement. Nous remettons en évidence un problème pertinent en psychologie : celui de la dynamique fonctionnelle entre le registre affectif et le registre cognitif. Nous allons également peaufiner, corriger et ameliorer le modèle de comportement planifié d’Ajzen.

Au plan social, cette recherche pourrait permettre aux éducateurs et à leurs pairs, aux parents et à tous ceux qui participent directement ou indirectement à la lutte contre le Sida, ainsi qu’aux organismes et comités de lutte contre cette pandémie de comprendre et de mieux cerner les facteurs psychologiques qui peuvent susciter la résistance au changement de comportement face au VIH/Sida. Elle est aussi une réponse de la psychologie à la problématique suscitée par le VIH/Sida, dans la mesure où elle pourrait favoriser la redéfinition de la politique de sensibilisation et de persuasion des populations. Notre recherche est importante, car elle accorde à la dimension psychosociale une certaine originalité dans la préparation mentale des personnes face au VIH/Sida.

Notre recherche touche une sphère de réflexion qui, jusqu’ici, n’a pas été minutieusement explorée en psychologie, encore moins en psychologie sociale. Elle pose la question du VIH/Sida sous l’angle du comportement sexuel et celle de la sexualité dans le domaine de la psychologie sociale de la santé. Elle s’intéresse à une notion complexe qui constitue une énigme dans les recherches en sciences sociales : les attitudes. Elle permettra de comprendre que les croyances revêtent une dimension épistémologique extrêmement importante dans le sillage de la psychologie. Elle se base sur le fait qu’il est non seulement important d’amener les gens à croire en l’existence du Sida, mais qu’il importe aussi d’intégrer la gestion des variables intermédiaires entre intention et comportement dans la préparation psychologique pour favoriser la planification et la consolidation des comportements sexuels préventifs.

Conscients du fait qu’il n’y a encore ni remède, ni vaccin, les chercheurs et les hommes de science reconnaissent unanimement que l’une des stratégies idéales de la prévention au VIH/Sida est la promotion d’un comportement sexuel responsable comportant moins de risques et donc susceptible de sauvegarder l’espèce humaine contre cette catastrophe, la préserver des souffrances engendrées et garantir sa continuité. C’est dans cette perspective scientifique que nous situons la quintessence et l’essence de notre étude. Il ne faudra pas perdre de vue que notre étude s’intéresse à une population dont le statut social et économique l’expose au « trafic » sexuel et à la délinquance sexuelle. Les adolescents constituent une population fragile du point de vue psychologique, les variables intermédiaires auxquelles nous faisons allusion dans notre étude peuvent avoir des effets très néfastes sur leur fonctionnement psychologique et par conséquent sur leurs comportements sexuels. Le Sida, comme nous le constatons, pose un problème de comportement qui est la préoccupation centrale du psychologue. C’est dans cette optique que le regard scientifique du psychologue est indispensable pour éradiquer cette pandémie.