2.2.2- L’approche psychosexologique

L’orientation psychanalytique avait déjà montré que la sexualité humaine devait être aussi étudiée dans ses aspects non physiologiques. Seulement, cet intérêt manifesté pour les déterminations du psychisme dans l’acte sexuel s’était électivement centré sur l’individu, considéré uniquement dans son aspect égonodal. Or, chaque individu est un nœud, caractérisé par la fonction de l’égo et du social en son sein.

L’orientation psychosexologique est donc intégrative. Elle essaie de mettre en évidence les incidences de la personnalité propre, des facteurs socio-culturels sur le comportement sexuel et l’idée que l’acte sexuel n’est jamais strictement ni purement personnel – même le fantasme masturbatoire atteste de la présence au moins symbolique de l’ « autre », dans le « plaisir solitaire » (Hanry, 1973). Le sexe nous met toujours en communication avec autrui et toute relation, même intime, est une relation sociale.

Les travaux portant sur la culpabilité sexuelle, montrent qu’elle est une disposition de la personnalité qui transparaît lorsque le sujet viole les normes de conduite sexuelle de son groupe, sa communauté. Ils élaborent une échelle de culpabilité et aboutissent à la conclusion que le sentiment de culpabilité peut varier avec l’âge, le sexe ou la religion des sujets.

A la suite de Freud, Eysenck (1976, 1979) étudie les attitudes et les comportements sexuels dans leur rapport avec les traits de personnalité spécifiques. Il essaie de rattacher les conduites sexuelles repérables à sa théorie de la personnalité, décrite en termes d’extraversion/introversion. Ses corrélations sont établies à partir des données recueillies auprès des étudiants et des adultes. En définitive, il s’insurge contre le sociologisme ambiant qui voudrait faire dépendre les comportements sexuels des facteurs d’environnement uniquement. Pour lui, les attitudes et les comportements sexuels sont aussi fortement déterminés par des facteurs génétiques dans lesquels les aspects physiologiques, hormonaux et sécrétoires jouent un rôle important.

Des recherches de psychologie sociale, notamment celles de Kirkendall et Libby (1996) s’attachent prioritairement à démontrer le parallèle entre relations sociales et relations sexuelles. Selon cette perspective, fondée sur la théorie de l’interaction, l’acte sexuel est une forme aiguë d’interaction sociale. En ce sens, il est déterminé par les qualités préalables de la personnalité des partenaires et de leur mode de conception des rapports interindividuels. En fait, l’orientation générale des recherches dans cette approche porte sur l’importance de la motivation et des aspects qualitatifs, individuels et subjectifs, qui rendent l’acte sexuel unique et incomparable, d’un individu à un autre et d’une situation à une autre.

Le point de vue physiologique considérait que seule la rapidité de la réaction sexuelle des sujets à un stimulus pouvait être différentielle. L’ensemble des autres réactions étaient considérées, indépendamment de leur source (le sujet, le partenaire, le milieu), comme identiques pour tous. La psychosexologie, dans une démarche opposée, essaie de mettre en évidence la signification spécifique de l’acte sexuel et les facteurs qui y contribuent. Elle varierait selon que le sujet est seul, avec un partenaire, selon le lieu où se déroule l’acte sexuel, selon les perceptions que le sujet a de la réalité sociale, mais aussi et surtout selon ses dispositions thymiques momentanées.

Une autre orientation, basée sur la théorie de l’apprentissage, s’articule autour de l’idée qu’une grande partie des comportements sexuels, aussi bien que sociaux, est apprise. Cet apprentissage sexuel se fait alors au moyen des renforcements. Selon cette perspective, le degré de permissivité sexuelle se mesure à la qualité des expériences préalables des individus. Ainsi, une première expérience sexuelle satisfaisante serait un antidote contre les peurs et les inhibitions sexuelles. Au contraire, l’insatisfaction sexuelle originelle peut conditionner négativement la perception et les attentes sexuelles de l’individu. C’est un raisonnement de type behavioriste, radical et partiel, avec son souci de la mesure de ce qui est observable et seulement observable et qui, de ce fait, occulte les formes de l’introspection qui déterminent les conduites. Bandura (1970), essaie de dépasser ce qu’il appelle le behaviorisme périphérique et sa focalisation exclusive sur les actes observables.

Pour lui, l’accent doit être mis sur les aspects sociaux de cet apprentissage, car ce sont eux qui déterminent une grande partie des activités sexuelles des hommes et des femmes. Il s’agit notamment de l’apprentissage par imitation ou par expérience directe qu’il appelle apprentissage vicariant ; de l’utilisation des symboles qui permet de représenter les évènements, d’analyser les expériences personnelles, de communiquer, de créer, d’imaginer et de prévoir ; des processus d’auto-régulation grâce auxquels l’individu réagit activement aux influences extérieures en les sélectionnant, en les organisant et en les transformant. Ces processus permettent à l’individu de ne pas seulement être un réceptacle, mais un acteur de sa propre conduite.