2.2.4- Adolescence et sexualité

L’étude du développement de la sexualité à l’adolescence met en lumière les continuités, non seulement avec l’enfance mais aussi avec l’âge adulte, dans la mesure où l’évolution de l’identité sexuelle, du sentiment de compétence dans le domaine sexuel, de l’imaginaire, du fantasme et du désir sexuel, constituent des processus développementaux qui se déroulent sur toute la durée de la vie. De toute évidence, la signification psychologique et sociale de l’activité sexuelle pendant les premières années de l’adolescence évolue parallèlement à la maturation physique qui se produit à ce moment-là. En effet, les changements physiques et hormonaux mettent l’adolescent en situation de s’engager dans une plus grande variété d’activités sexuelles.

A mesure que se déroule l’adolescence, les relations avec les pairs en viennent progressivement à intégrer une composante plus clairement sexuelle. En effet, la fille et le garçon admirent, observent avec joie les premiers signes du développement pubertaire et les changements qui les font accéder ouvertement, au vu et au su de tout le monde, à l’adolescence. Ce passage de l’enfance à l’adolescence peut susciter chez les adolescents le désir de jouir des avantages et privilèges que lui offre son nouveau corps. L’un des privilèges reste bel et bien la satisfaction sexuelle qui était jusqu’ici incomplète.

Il faudra également préciser tout comme Rodriguez-Tomé et al. (1997) que le contexte socioculturel détermine aussi les formes que la sexualité peut prendre à l’adolescence, en définissant ce qui est acceptable à chaque âge. Bien avant que les transformations physiques de la puberté ne soient réalisées chez l’adolescent, la signification sociale de chaque élément de ces changements lui aura été communiquée avec plus ou moins de clarté et de succès. Cette situation peut amener ce dernier à la mise en application du construit cognitif lié à sa sexualité. Dans ce construit cognitif l’activité sexuelle et la satisfaction sexuelle occupent une place de choix. C’est dans cette optique qu’il faut comprendre la précocité sexuelle, le vagabondage sexuel, la prostitution, l’activité sexuelle intensive chez certains adolescents.

La sexualité à l’adolescence est plus qu’un simple répertoire de désirs et de comportements sexuels. Elle est intriquée dans des systèmes complexes d’opinion à l’égard des rôles des hommes et des femmes en général et de leurs relations entre eux. Les adolescents n’ont pas tous un accès identique à ces systèmes de croyances, en fonction de leur statut socioéconomique, de leur origine ethnique, de leur religion, de leur nationalité, etc. Pour la majorité des adolescents l’expérimentation sexuelle suit une trajectoire prédictible, celle prise par la majorité de leurs pairs. Les changements dans les profits de comportements sexuels et d’opinions sont vraiment graduels, s’inscrivent dans une évolution plutôt qu’une rébellion, et tendent à impliquer un grand nombre d’individus. C’est dans ce sillage que psychologues et sociologues considèrent l’adolescence comme période de trouble et d’incertitudes, mais elle est aussi, et peut-être à cause de cela, une étape où la liberté et l’autonomie s’accroissent. L’adolescence est également explicable en relation avec les processus généraux de construction de l’identité et de l’orientation sexuelle.

Les opinions populaires sur l’adolescence ont pour point commun de la considérer comme une période caractérisée par la préoccupation pour le sexe et la sexualité. On pense généralement que les adolescents sont mus, sinon obsédés, par l’envie d’en connaître davantage sur la sexualité : ce que les gens peuvent faire et ce qu’ils feront, avec qui, où, et selon quelle fréquence. On ne suppose pas forcément que cette curiosité sexuelle est directement liée à la recherche d’expériences sexuelles personnelles, mais on pense qu’elle est en rapport avec la mise en place du désir sexuel. Cependant,  les données disponibles ne confirment que partiellement ces croyances populaires. La curiosité à l’égard de la sexualité caractérise le début de l’adolescence, mais elle est rapidement satisfaite. Vers le milieu de l’adolescence, la plupart des jeunes se considèreront comme très avertis à propos de sexualité et déclarent qu’ils en savent assez (Rodriguez-Tomé et al., 1997). En tout état de cause, peu d’entre eux admettent leur ignorance et moins encore reconnaissent avoir de la curiosité. Ceci implique que les manifestations de curiosité sexuelle s’estompent rapidement à l’adolescence.

Les préoccupations sexuelles à l’adolescence semblent en fait davantage en rapport avec le désir sexuel qu’avec la curiosité. Ce désir se manifeste d’abord simplement par le fait d’aspirer à des aventures sexuelles. Il s’agit au départ d’une aspiration sexuelle non spécifique puisque le partenaire n’est pas identifié et que les actes sexuels désirés sont vagues. Un peu plus tard, l’aspiration sexuelle atteint une nouvelle phase qui comporte une évolution beaucoup plus détaillée de l’aventure ou de la série d’aventures : la première approche, la scène de séduction, l’accomplissement de l’acte, etc. Il faut également préciser que les garçons sont davantage préoccupés de sexualité en elle-même, alors que les filles s’intéressent à la sexualité en tant que composante de la participation à un couple. En entrant dans l’adolescence, les individus des deux sexes commencent à se soucier davantage de leur image corporelle. C’est ainsi qu’une déviation par rapport à la norme culturelle sur tout aspect de l’apparence physique peut être source d’anxiété.