2.2.5- Adolescence et vulnérabilité au VIH/Sida

L’adolescence est une période exaltante et difficile (Sillamy, 1996). Elle est exaltante, parce que c’est le moment où les énergies s’amplifient, où l’on se découvre plus fort et où l’on croit que l’on peut transformer le monde. Elle est difficile, parce que le désir d’autonomie et de liberté s’accommode mal avec la dépendance matérielle à l’égard de la famille. Les adolescents vivent à des niveaux de maturation différents, car, s’ils sont adultes physiquement, ils restent encore très dépendants de leur entourage et vulnérables psychologiquement.

En dépit de l’idéologie qui imprègne la représentation de l’hétérosexualité chez l’adolescent, fait de romantisme et de fidélité, les relations engagées sur le long terme sont en réalité l’exception plutôt que la norme. Les relations hétérosexuelles de nos jours prennent beaucoup plus souvent la forme d’une série de liaisons courtes mais intenses. Aussi longtemps que dure la liaison, elle se caractérise par l’exclusivité ou la fidélité. Tout écart de l’un ou de l’autre par rapport à cette fidélité est habituellement le signal de la faillite irréparable de la relation, et signifie le plus souvent, pour le partenaire infidèle, l’avènement de la relation « stable » suivante. Au début, dans ce type de liaison « stable », le couple adoptera des pratiques sexuelles protégées, utilisant le préservatif afin d’éviter à la fois la conception et la transmission de maladies, et proscrivant les pratiques anales. Très vite, cependant (dans les six prochains mois), ces pratiques protégées seront abandonnées ou réduites à l’intermittence.

Les résultats des études sur les profils d’activité sexuelle, qui ont révélé cette tendance à passer d’un partenaire à un autre et à abandonner rapidement, avec chaque partenaire, les pratiques protégées, ont été interprétés de façon implicite comme le témoignage d’une plus importante prise de risques, au plan sexuel. Cela a conduit certains théoriciens à tenter d’expliquer pourquoi les adolescents prennent davantage de risques dans ce domaine. On a principalement soutenu qu’ils agissent ainsi parce qu’ils sont plus portés à croire qu’ils échapperont aux risques encourus. On avance essentiellement que les adolescents ont un sentiment élevé d’invulnérabilité personnelle. Ils pensent : « ça pourrait arriver à quelqu’un d’autre mais pas à moi ». Il en est de même pour le risque de grossesse (Du Rant et Sanders, 1989), et le risque de Sida (Perloff et Fetzer, 1986). Certains auteurs supposent qu’une telle idée d’invulnérabilité découle de l’égocentrisme de l’adolescent. Kasperson et al. (1988) suggèrent que l’illusion d’invulnérabilité dérive d’engagements répétés dans des activités à risques sans qu’aucun phénomène de contagion ne s’ensuive.

Au-delà du sentiment élevé d’invulnérabilité personnelle, il en existe d’autres facteurs de vulnérabilité à l’adolescence. Nous avons l’exemple de la vulnérabilité biologique des jeunes filles ce que Berghauser et al. (2003) désignent par « vulnérabilité sexospécifique ». En effet, le développement physique est maintenant atteint plutôt que par le passé. Par exemple, l’âge moyen des premières menstruations est passé de 14 ans en 1900 à environ 12 ans et demi de nos jours (SWAA/Panos, 2002). Beaucoup d’adolescents commencent l’activité sexuelle à un âge précoce. Elles reçoivent des propositions sexuelles aussi bien de la part des jeunes de leur âge, que de la part d’hommes bien plus âgés qui peuvent être séropositifs. Ces derniers leur offrent des cadeaux en échange des rapports sexuels. Les muqueuses génitales de celles-ci (jusqu’à 20 ans) n’étant pas encore matures, elles se blessent facilement lors de ces rapports sexuels et ceci les rend plus vulnérables au VIH (SWAA/Panos, 2002). Les rapports sexuels sont considérés comme plus risqués lorsqu’ils sont pratiqués à un jeune âge plutôt qu’à un âge plus avancé chez les jeunes filles. L’appareil génital féminin est plus exposé aux infections à VIH avant l’âge adulte.

De même, elles s’intéressent plus aux films, émissions audiovisuelles à caractère sexuel que les adolescents. Elles sont aussi très sollicitées par des hommes trop riches (fey-men, hommes d’affaires, etc.) à cause de leur physique attrayant et à cause de leur naïveté et il est fréquent qu’elles aient de relations plus courtes et probablement moins formelles. De plus, elles sont moins susceptibles de vivre avec leurs partenaires sexuels, ce qui entraîne souvent l’une des partenaires à fréquenter simultanément d’autres partenaires, augmentant ainsi le risque d’infection. Cette période de relations sexuelles moins stables peut être plus longue pour les personnes ayant leur premier rapport sexuel à un jeune âge que pour les personnes retardant le moment de leur première expérience sexuelle.

Le comportement sexuel des adolescentes de nos jours est un véritable vecteur de transmission du VIH/Sida. Elles sont en quête de repas décents. Elles pratiquent la prostitution, le vagabondage sexuel pour vivre et être à la mode (vestimentaire, technologique, etc.). Mal informées parfois, et du fait de leur faible niveau financier, elles ne peuvent imposer l’utilisation du préservatif.

Les adolescents vivent leur sexualité dans un contexte social ouvert. Les vidéo-clips suggestifs, les séries télévisées où la sexualité est étalée, la publicité dans les médias, etc., peuvent influencer leur comportement et projeter une image négative de la sexualité qui est bien souvent renforcée par la pornographie ou du romantisme idéaliste. Il faut aussi mentionner que les rapports sexuels des adolescents ont lieu la plupart du temps dans un contexte amoureux. Cependant, les relations amoureuses peuvent se succéder à quelque temps d’intervalles ou de ruptures. Le fait de changer de partenaire sexuel place de plus en plus l’adolescent en position de vulnérabilité très élevée.