3.4.4– Théories cognitives sur le comportement de santé

Les théories cognitives sur le comportement tentent de prédire ce que les individus feront dans certaines circonstances. Le défi ici consiste à déterminer quelles cognitions sont essentielles et quel degré de changement elles annoncent. Une des hypothèses majeures des théories actuelles sur le changement de comportement veut que les intentions d’un individu constituent un facteur essentiel du comportement. On estime que celles-ci sont fonction, à la fois, des conséquences attendues du changement, des influences sociales et des émotions perçues (Fishbein, 1982). La mesure de l’intention a supplanté celle des attitudes, dès lors qu’on entend prédire un changement de comportement. Par exemple, nombreux sont les adolescents qui savent qu’ils doivent utiliser le préservatif et avoir une sexualité responsable et il en découle une intention : ils décident d’acheter un préservatif et de le porter régulièrement pour éviter le VIH/Sida. Si une large proportion de ceux chez qui une telle intention se fait jour procède réellement aux changements de comportements attendus, on en déduira que la mesure de l’intention est un bon outil de prédiction.

Cependant, dans de nombreux cas, notre comportement peut changer ce que nous pensons. Dans le cas de la prévention contre le VIH par le port du préservatif, je peux encore désirer être en bonne santé, mais lorsque je trouve difficile de porter ou d’utiliser un préservatif pendant les rapports sexuels, j’arrête de faire des efforts dans ce domaine. Si cela arrive à beaucoup d’individus, l’intention peut ne pas être une mesure prédictive forte, ou alors, il faut admettre que c’est une fausse intention qui a été mesurée. En vérité, l’observation du comportement humain indique qu’il est plus aisé de trouver de bonnes raisons d’agir comme nous le faisons que de modifier nos actions pour les accorder à nos pensées. C’est ici, la base de la théorie sur la dissonance cognitive, qui prend pour hypothèse que lorsque le comportement d’une personne est en conflit avec ses propres croyances, la dissonance est psychologiquement très inconfortable et le changement s’opérera afin de rétablir une consonance (un accord) entre les pensées et les actes, ce changement s’opère sur l’élément le moins résistant, en général la cognition (Reich et Adcock, 1976).

La plupart des modèles de changement du comportement sont des théories basées sur une hypothèse de volonté, à savoir un comportement déterminé de manière cognitive. Par exemple, la théorie du « Health Belief Model » et ses ramifications est fondée, comme nous le verrons un peu plus loin, sur le concept de base, qui veut qu’attitudes et croyances soient les déterminants majeurs du comportement de santé, et que tout comportement réagissant à une menace pour la santé est basé sur deux types principaux de cognitions : l’espoir qu’une action spécifique mène à une amélioration de la santé et la valeur subjective que les gens accordent à une santé améliorée. La divergence dans les comportements est alors liée à l’adéquation des cognitions et à la facilité avec laquelle nous adoptons nos cognitions à de nouvelles expériences.

Dans les théories basées sur les étapes, l’intention est considérée comme la dernière étape avant l’adoption d’un nouveau comportement. Les modèles cognitifs supposent généralement que l’auto-efficacité (confiance en soi, certitude que l’on a les moyens de procéder à un changement) est en jeu et que le rôle spécifique du contexte peut également s’y ajouter, en tant que perception des normes sociales et des barrières à l’action (Masters, Creer et Gerards, 2002). Les approches cognitives faisant appel à la motivation sont jugées importantes pour ceux qui vont innover de nouveaux comportements. Cette importance accordée aux approches cognitives est en partie due au fait que les cognitions sont des déterminants incontestables du comportement. Toutefois, au regard de la complexité du comportement, il est indispensable de ne pas seulement se référer aux cognitions mais de tenir compte d’autres déterminants aussi importants comme le contexte.