6.1.1.7- Décision du port du préservatif et force de l’affectivité.

A l’inverse de la force de l’habitude, un test du khi-deux confirme, avec une probabilité de 99%, l’influence de la force de l’affectivité sur la décision des adolescents-élèves de se protéger. Ainsi, 26% seulement d’adolescents-élèves subissant par ailleurs une influence totale de la force de l’affectivité n’ont eu aucun rapport sexuel non protégé au cours des trois mois précédant la deuxième phase de l’étude.

Tableau 74 .Répartition des adolescents-élèves sexuellement actifs en fonction de l’influence de la force de l’affectivité et de la décision d’utiliser un préservatif au cours des trois derniers mois précédant la deuxième phase.

Source : Nos calculs

Le tableau ci-dessus nous révèle que la décision du port du préservatif est totalement influencée par la force de l’affectivité. Ainsi, les adolescents-élèves ont des rapports sexuels non protégés pour parvenir à une plénitude sexuelle complète et totale ou tout simplement manifester leur amour pour leur partenaire. Les émotions, d’une manière générale, d’après Levenson (1994) sont conçues comme sélectionnant un nombre limité de modes d’action dont l’efficacité a été testée par le temps. Par expérience, les adolescents savent faire la différence entre un acte sexuel protégé et un acte sexuel non protégé. Malgré les messages préventifs qui indiquent que le préservatif fait durer le plaisir, les adolescents sont unanimes sur le fait que même si le préservatif fait durer le plaisir, il le diminue tout autant. Bon nombre de participants ont délibérément opté pour l’acte sexuel non protégé, juste pour avoir plus de plaisir. Il faut donc faire une différence entre la qualité, l’intensité du plaisir et le temps pour parvenir au plaisir.

La psychanalyse essaie de fonder un système de compréhension de mécanismes et des conduites sexuelles basées sur la prise en compte de la pulsion sexuelle et de son évolution. Pour Freud (1962), le développement psychosexuel se fait dans une linéarité discontinue et croissante. A l’adolescence, la maturation pubertaire ouvre la voie à la sexualité génitale ou du moins met en place les conditions qui lui sont nécessaires. Pour Freud, c’est la sexualité qui fait la vie affective de l’Homme avec tout ce qu’il porte en lui comme émotions, sentiments, et motivations. Pour comprendre pourquoi la force de l’affectivité influence totalement le port du préservatif, il est tout d’abord indispensable de comprendre le rôle de la satisfaction sexuelle dans la vie des adolescents.

Le problème du fonctionnement dynamique entre les registres cognitifs et les registres affectifs dans la réalisation du comportement sexuel est au cœur de notre préoccupation scientifique. Le préservatif a deux versants : un versant cognitif et un versant affectif. Du point de vue cognitif, le préservatif est une garantie pour la lutte contre le VIH/Sida. Mais, du point de vue affectif, le préservatif ne constitue pas une garantie pour le plein épanouissement sexuel. Cette situation quelque peu paradoxale crée une atmosphère relationnelle et dynamique entre l’affectivité et la cognition. Les adolescents sur le plan cognitif ont élaboré mentalement que l’introduction du préservatif dans l’acte sexuel freine, diminue ou empêche totalement la satisfaction sexuelle. C’est la raison pour laquelle ils ne l’utilisent pas lorsqu’ils veulent ressentir plus de plaisir.