1.1.4. Les stratégies de prise de notes

En ce qui concerne les stratégies utilisées pendant la prise de notes, nous avons relevé le fait que d’un côté que les notes prises par les trois étudiants en droit ont été très largement déterminées par le style d’enseignement pendant chaque cours : une simple reproduction d’une dictée presque aussi abondante que le cours quand l’enseignant dictait (hormis les répétitions facilitatrices de la dictée, et divers commentaires, etc.), quelques fragments ou même parfois rien du tout quand les objets du savoir étaient oralisés ou « glosés ». Ce qui semble indiquer un manque d’autonomie chez ces étudiants face à la performance demandée. 

A l’inverse, le fait que certaines informations données sur un ton plus « lâche » n’aient pas été retenues par tous indique que la consigne de ne pas prendre de notes, donnée de façon implicite a été comprise par ces étudiants, ce qui est une marque de « compétence linguistique ».

Nous avons remarqué d’autre part que pour les étudiants non natifs ayant tendance à vouloir absolument tout noter, l’accumulation des reformulations dans le discours de l’enseignant a constitué un facteur de complexification. Pourtant ce qui était considéré comme source de difficultés et d’exaspération pour des étudiants non natifs a au contraire favorisé le choix des segments à prendre en notes chez l’étudiante native.

Les notes prises ont été largement déterminées par le débit : le désir de tout noter a été compromis par l’accélération du débit ;un débit rapide a occasionné des difficultés de prises de notes. Aussi, la prise de notes ayant été difficile, le contenu de celles-ci ne pouvait que témoigner des difficultés rencontrées.

On a constaté aussi que certaines notes étaient reformulées de façon acceptable aussi bien par les étudiants de droit que par certains étudiants inscrits au cours de français langue étrangère. De même, certains étudiants ont introduit, par paraphrase des termes qui n’étaient pas dans les discours sources.Ce qui indique une certaine « compétence linguistique », une certaine aptitude à reformuler le discours de l’enseignant.

On a constaté par ailleurs que d’autres reformulations des étudiants contredisaient parfois les informations reformulées. En fait le procédé de reformulation était assez mal connu par ces étudiants qui voulaient noter tout ce qu’ils entendaient. On doit reconnaître que demander ces étudiants non natifs de considérer le fonctionnement reformulant de la production de l’enseignant et d’opérer des choix nécessaires est quand même une performance assez difficilement réalisable par.

En ce qui concerne les techniques de prise de notes, nous avons relevé des procédés semblables, utilisées aussi bien par les trois étudiants de droit que par les étudiants inscrits au cours de français langue étrangère, à une exception près -le soulignement- par un étudiant du cours de langue. Car s’il est vrai que les segments employés par l’étudiante native étaient souvent tronqués, que les symboles = et → ainsi que l’abréviation étaient utilisés beaucoup plus dans ses notes que dans celles des deux étudiants non natifs, ces symboles ont également été relevés dans les notes des étudiants inscrits au cours de français langue étrangère. Ce qui démontre d’une certaine maîtrise de certaines stratégies de prise de notes qui de la part chez ces étudiants.

Ainsi, dans la plus part des cas où il le symbole « = » par exemple était présent, il mettait en relation soit deux mots, soit deux syntagmes nominaux ou verbaux et rarement deux groupes syntaxiques complets. De même, d’autres abréviations correspondaient par hasard à certains procédés de contraction propres à la langue française : des symboles comme suit (°) remplaçant certaines terminaisons en « tion » par exemple. Ce qui veut dire que tous les étudiants avaient compris la nécessité d’adopter un certain système d’abréviation.

En revanche, certaines notes d’étudiants inscrits au cours de FLE n’étaient constituées que de syntagmes nominaux. Aucune stratégie particulière ne s’en dégageait. Ces notes étaient beaucoup plus le reflet des difficultés rencontrées par les étudiants qu’autre chose. Les abréviations diverses et variées correspondaient souvent à une convention personnelle, les mots étaient souvent justes amorcés ou remplacés par une seule lettre difficilement interprétable par une tierce personne, chacun essayant d’inventer ses propres procédés. Certains étudiants ont utilisé la ponctuation alors que d’autres ne l’ont pas fait. On peut conclure que cette disparité dans la façon de procéder est le reflet de la différence du niveau de compétence des étudiants en français.