4.1. La taille de l’échantillon

Normalement, il est difficile d’interroger tous les membres d’une société pour des raisons du temps, de l’étendue du terrain d’étude, de la nature même de l’étude, de moyens financiers disponibles et de l’obligation d’employer un grand nombre d’enquêteurs dont la formation ne peut pas être assurée. Ensuite, cette recherche a privilégié la méthode de l’entretien directif et semi directif en enquêtant sur une partie de la population. Cela veut dire l’ « ensemble des personnes dont on veut connaître l’opinion »222.

D’abord, j’ai limité l’espace d’enquête au niveau des villages près des entrées principales de ces zones. Après, j’ai interrogé de manière aléatoire quelques villageois auprès de Kakamega – Kenya Wildlife Service (KWS), Kakamega – Kenya Forest Service (KFS) et du parc national de Saiwa swamp, dans des villages choisis en prenant en compte la taille du village et son éloignement de l’entrée principale des touristes. Ces entretiens étaient du type individuel, effectués en swahili ou/et en Luhya le cas échéant. Ils se sont déroulés à leur domicile de 08h00 à 18h00.

Par ailleurs, comme le remarquent Pearce et Moscardo, la communauté est une entité et non des tranches selon l’âge, le sexe, la profession et le domicile223. En effet, Kibicho dans sa thèse sur les aires protégées kenyanes, affirme à juste titre qu’ « elles ne suffisent pas pour identifier ces segmentations »224 car l’administration de ces zones essaie de répondre au besoin de groupes plutôt que de ces segments. Par conséquent, nous avons choisi de manière aléatoire n’importe quel membre de la communauté âgé d’au moins 18 ans dans le foyer choisi au hasard. Chaque foyer a eu droit à un questionnaire.

Cependant, ni la communauté d’accueil ni les touristes ne sont homogènes, comme le démontrent plusieurs recherches sur le tourisme et la communauté d’accueil. Chaque membre d’un groupe appartient aux différents sous-groupes, ce qui rend difficile la construction d’un échantillon vraiment représentatif. Celui-ci conduit certains à proposer par exemple, « si la fréquence relative des femmes est de 52% dans la population (…) la fréquence relative des femmes dans l’échantillon se rapproche le plus possible de 52% »225. Mais, le manque d’assez d’informations et de sources démographiques fiables sur la structure et la composition de la structure sociétale226 favorisent l’homogénéisation de l’échantillon.

Par ailleurs, même avec un échantillon apparemment aléatoire et représentatif, certaines catégories sont automatiquement exclues227. Par conséquent, Martin nous conseille qu’il est illusoire de chercher à respecter le critère de représentativité228. Par exemple dans notre cas, c’est l’absence des personnes actives qui ne pouvaient pas être présentes durant l’enquête qui se déroulait généralement pendant la journée, tandis qu’elles vaquaient à leur occupations. Aussi, c’est le cas des villageois présents mais qui étaient en train de travailler dans leurs champs à côté de leurs maisons.

Pour réduire cette exclusion, j’ai essayé de faire quelques enquêtes pendant la soirée et le week-end ou dans les champs là où ils travaillaient. Par contre, comme le cite Kibicho dans sa thèse, « l’important n’est pas toujours de constituer un échantillon parfaitement représentatif statistiquement, mais de faire naître le plus d’idées possibles, et d’attitudes différentes à l’égard du sujet d’étude »229. D’ailleurs, Martin remarque qu’ « il n’existe pas de critère absolu permettant de savoir si un échantillon est ‘bon’ ou ‘mauvais’ »230. Cela veut dire que l’essentiel est la procédure de sélection de l’échantillon. Il observe ailleurs que, « l’intérêt d’un échantillon ne se juge pas de manière intrinsèque, en fonction de ses seules propriétés statistiques »231.

Par exemple, comme proposé ailleurs, aucun échantillon ne doit comportermoinsde trente individus232 et l’usage de l’échantillon dans les sciences sociales varie entre 100-1000 individus233. Ce type de critère est purement quantitatif, par contre selon Martin, la valeur réelle d’un échantillon existe « en fonction de son adéquation à une problématique ou à une série d’interrogations précises »234. Il ajoute que « même le critère de représentativité n’est pas nécessairement un idéal »235. C’est le cas de nos habitations choisies de manière aléatoire, alors que les personnes choisies se limitent à celles qui sont présentes, et parfois à la seule personne présente. Ainsi le sens ‘probabiliste’ des individus dans la population est largement dilué.

Notes
222.

Quivy et Campenhoudt, Manuel de Recherche en Sciences Sociales, Dunod, 1995, p 47.

223.

Pearce, et Moscardo, Tourism Community Analysis, Asking the Right Questions, in Pearce, D.G., Butler, R.W., dir., Contemporary issues in Tourism development, Routledge, 1999, p 48. Sa version originale en anglais: « people come in whole packages, not slices of ages, genders, occupations and residential locations ».

224.

Kibicho, op.cit, 2005 p 183.

225.

Javeau, l’Enquête par Questionnaire, Editions de l’université de Bruxelles, 1985, 43-44.

226.

Loubet del Bayle, Introduction aux Méthodes des Sciences Sociales, Privat, 1978, 234 p.

227.

Guibert et Jumel, Méthodologie des Pratiques de Terrains en Sciences Humaines et Sociales, Armand Colin, 1997 ; cf. aussi, Dépelteau, La Démarche d’une Recherche en Sciences Humaines, de la Question de Départ à la Communication des Résultats, les presses de l’université Laval, 1998.

228.

Martin, L’Enquête et ses Méthodes : l’Analyse de Données Quantitatives, 2007, Armand Colin.

229.

Kibicho, op.cit, 2005 p 181.

230.

Martin, op.cit.

231.

Ibid.

232.

Javeau, op.cit ; Guibert et Jumel, op.cit.

233.

Guibert et Jumel, op.cit.

234.

Martin, op.cit.

235.

Ibid.