En ce qui concerne les entretiens et les questionnaires pour la communauté d’accueil et les touristes, cette recherche a privilégié l’utilisation d’un questionnaire comprenant des questions fermées et ouvertes. Ce choix avait pour but d’éviter que les interviewés acceptent ou réfutent d’emblée les idées préconçues du chercheur236 comme l’on constate dans les questionnaires totalement fermés. En outre, avec une telle méthode, comme le disent Pearce et Moscardo,237 c’est avec certitude que l’on décrit le point de vue des interviewés envers le fait touristique. Le dépouillement a pu révéler ce que les individus pensaient. Par exemple, l’une des questions ouvertes pour la communauté d’accueil était d’identifier les problèmes principaux et les grands défis (eau, agriculture, animaux, conflits pour la terre…) rencontrés en vivant près de ces zones de biodiversité.
Pour les touristes, il était nécessaire de reconstruire leurs itinéraires réalisés depuis leur arrivée au Kenya jusqu’aux zones étudiées et de même après leur visite. Cette approche nécessite une compréhension des faits d’une manière flexible, sans subir la rigidité des idées préalables comme constatées dans la plupart des recherches en sciences sociales. Les questionnaires ayant des questions uniquement fermées restent très superficiels et leur fiabilité est remise en question car ils risquent de susciter chez l’interviewé une réponse fausse.
Les experts
Les entretiens effectués auprès des experts se sont déroulés en face à face et en individuel. Ici, des personnes ont été interrogées en raison de leur niveau d’expertise ou de leur notoriété. Dans cette catégorie, j’ai intégré dans mes échantillons des leaders de projets communautaires en matière d’écotourisme, des leaders parmi les guides touristiques locaux et des responsables des aires protégées. Au total 14 responsables ont participé à cette enquête : 5 à Kakamega – KWS, 5 à Kakamega – KFS et 2 à Saiwa à cause de sa taille et faute de guides touristiques et de projets communautaires en tourisme. Egalement, un officier de l’Ecotourism Kenya et l’autre du KWS tous deux à Nairobi y ont participé.
Pour ce type d’échantillon, comme le cite Rieucau, il « n’est pas nécessaire d’augmenter le nombre de personnes constitutives de l’échantillon, dès lors que dans le test, les réponses se ressemblent, voire se répètent… »238. Les questions posées à chacun de ces intervenants étaient adaptées à leurs fonctions évitant ainsi de répéter les interrogations.
Les sociétés locales
J’ai eu également des entretiens avec la communauté d’accueil. Ces entretiens étaient menés de manière directive en utilisant des questions ouvertes et fermées prédéfinies au préalable dans le but de connaître leurs mentalités et leurs comportements à l’encontre de ces espaces. J’ai eu l’opportunité de recueillir un maximum d’informations car les interviewés ont parlé spontanément. De plus, j’ai évité l’utilisation de questions totalement fermées ayant pour réponse « pas du tout d’accord » … « tout à fait d’accord ». Ces réponses à échelle ne permettent pas à l’interviewé de « communiquer le fond de sa pensée et de son expérience » 239. Les questions posées ont permis d’éviter des réponses fausses et influencées.
Des études de différents villages autour de ces zones ont été menées en intégrant dans mes échantillons des personnes différentes en termes d’âge, sexe, profession, état-civil et niveau de vie. Les questionnaires ont été administrés sans rendez-vous, le taux de réponse était quasiment 100%, car dans le cas où un répondant a jugé inutile ou superflue de répondre, j’en ai simplement cherché un autre en respectant les règles de l’échantillon aléatoire.
Pour cette enquête, un échantillon de 100 personnes ont participé à Kakamega – KWS, 99 à Kakamega – KFS et 50 à Saiwa, représentatif de la population autour de ces zones de biodiversité, âgé de 18 ans et plus selon la méthode probabiliste (aléatoire). L’âge moyen des répondants était 40 ans pour Saiwa, 42 ans pour Kakamega – KWS et 43 ans pour Kakamega – KFS. Ces enquêtes ont été réalisées par moi-même entre début juin 2007 et fin juillet 2007. Les modes de construction de ces deux types d’échantillons sont présentés ci-après (tableau 7 ; 8 ; 9).
Par contre, ce type d’instrument utilisant un questionnaire ouvert a ses faiblesses : notamment il est moins rapide à cause des réponses longues, la réponse risque de n’être ni claire ni précise, le sujet interrogé peut demander des explications à l’enquêteur, avec le risque d’influencer celui-ci. Au niveau de l’analyse, il présente quelques difficultés à cause de manque d’homogénéité dans les réponses.
Ces questionnaires ouverts ont été utilisés pour ce type d’étude en respectant les trois préoccupations fondamentales, comme le démontre Loubet del Bayle (1978) : la validité du questionnaire, un questionnaire qui doit être fidèle et opératoire. Enfin, ces enquêtes ne duraient que 35 minutes par personne, afin d’éviter de lasser les interviewés.
En faisant référence à Scheibling, Rieucau affirme dans sa thèse que le « Géographe est intéressé par ce que la société a fait et continue à faire du territoire en termes d’organisation et de construction territoriale »240. En s’intéressant au passé et au présent, il est possible d’analyser comment une « société utilise le territoire pour vivre et se perpétuer … (à travers) des représentations, des sentiments d’appartenance, des comportements individuels ou collectifs qui participent à l’organisation spatiale »241. Il était nécessaire de savoir comment ces ociétés utilisent l’espace, le manipulent et agissent sur lui.
Les trois grands thèmes de ces questionnaires sont centrés sur la perception de la communauté d’accueil envers les zones de biodiversité, leur perception envers l’activité touristique et leur participation aux projets touristiques. Sans être limitées à ce qui suit, les 12 questions pour la communauté d’accueil dans ces questionnaires se résument ainsi :
Les touristes
Les touristes sont l’un des acteurs fondamentaux d’un espace touristique. Ainsi pour cette thèse, bien que les touristes soient peu nombreux dans cette destination comme indiquée dans les chapitres précédents, il était nécessaire de les interroger sur leur perception envers cette destination, pour savoir comment on peut les attirer davantage.
Étant donné que la région de l’ouest du Kenya, avec une faible activité touristique, est éloignée des autres régions phares reconnues, cette recherche a supposé que les touristes fréquentant cette région sont des écotouristes au sens strict du terme. C’est l’ensemble de ces touristes qui ont constitué la population de base pour les enquêtes.
Le questionnaire utilisé comprenait quatre éléments principaux : les données démographiques (nationalité, profession, âge) ; le caractère de leur voyage où je leur ai demandé entre autres choses de reconstruire leur itinéraire, de dire pourquoi ils ont choisi cette destination, comment ils ont organisé leur voyage; s’ils ont eu l’occasion de rencontrer la communauté d’accueil et l’impact de leur visite sur celle-ci ; et des commentaires sur leur expérience touristique.
Le flux touristique étant faible et irrégulier dans les destinations étudiées, il était nécessaire de trouver un moyen efficace de distribuer les questionnaires. L’aide des guides touristiques pour le faire m’a semblé la plus juste parce que les touristes, après avoir fait une randonnée guidée dans la forêt, pourraient plus facilement répondre aux enquêtes faites par leur guide que par d’autres enquêteurs. Ces enquêtes se sont déroulées entre juin 2007 et Décembre 2007 à Kakamega – KWS et entre le 2 juin 2008 et le 23 août 2008 pour Kakamega – KFS.
Pour Saiwa, là où il n’y avait pas de guides touristiques, j’ai dû engager un enquêteur qui est resté entre le 15 juin 2007 et 28 août 2007 pour un coût de 50 euros. Au total 187 questionnaires ont été remplis dont 100 à Kakamega – KWS, 50 à Kakamega – KFS et 37 à Saiwa. 82 questionnaires ont été retenus pour l’analyse à Kakamega – KWS, 33 à Kakamega – KFS et 28 à Saiwa car les autres étaient incomplets. Au total 143 questionnaires ont été remplis représentant un taux de réponse de 57%. Les questionnaires ont été menés en face à face dans un style soit directif ou non directif.
Quivy et Campenhoudt, op.cit.
Pearce et Moscardo, op.cit.
Rieucau, op.cit., 1994. p 70.
Quivy et Campenhoudt, op.cit, p 62.
Rieucau, op.cit., 1994.
Ibid.