2.2.1 - La différentiation parentale

En conditions dites normales, un enfant est la conséquence d’une relation entre un homme et une femme, qui représentent donc les deux éléments constitutifs du couple parental. L’existence de cette double réalité parentale distincte est essentielle pour un bon développement humain, puisque la mère ne peut en aucun cas remplacer le père et que, à son tour, le père ne peut en aucun cas remplacer la mère. Ces figures parentales ont des caractéristiques spécifiques selon leur sexe et que l’enfant a besoin de reconnaitre et de distinguer.

Ainsi, le père n’est pas seulement un co-parent, mais, surtout, l’autre figure parentale, en tenant compte des caractéristiques liées au sexe et au genre, des propres stratégies éducatives et de sa personnalité.

Le père doit se percevoir et être perçu par la mère et par l’enfant comme une non-mère,  pas-mère car le père et la mère ne sont pas interchangeables, c’est-à-dire que l’un d’eux ne peut pas, et ne doit pas, être l’autre, (J. Le-Camus et Zaouche-Gaudron, 1998).

Selon H. Wallon (1954), les parents ne peuvent pas se supplanter l’un à l’autre car ils ont des fonctions paternelles et maternelles clairement distinctes les unes des autres et car celles-ci ne sont pas interchangeables. Pour maintenir l’équilibre familial, il faut que le père assume une fonction de sollicitude, qui est essentielle en ce qui concerne les premières années de vie de l’enfant. C’est aux parents que revient l’obligation de se présenter à l’enfant comme des êtres distincts, fiels à leurs fonctions et ayant des comportements différentiés qui ont trait à leur sexe. L’absence de différence mettrait en danger l’équilibre familial et le bien-être de l’enfant. Il est en effet essentiel que tous les enfants aient un père et une mère qui se comportent en tant que tels.

M. Porot (1954) considère que les influences du père et de la mère ne sont pas semblables, en termes qualitatifs, et que l’importance de chacun de ces éléments dépend de l’âge de l’enfant, en soulignant les incidences et les conséquences de cette distinction.

Selon A. Goddard (2001), l’équilibre familial entre le père, la mère et l’enfant dépend de l’existence de différences en termes de genre et de sexe entre le couple. Ce sont ces différences qui permettent que les figures parentales deviennent complémentaires. L’absence, provoquée par la non participation de l’un de ces deux éléments ou par l’existence de comportements similaires entre les deux éléments (le plus souvent de la part de la femme), risque de réduire la dynamique relationnelle constituée par deux éléments : le père (le parent) et l’enfant.

D. Dumas (1999) va beaucoup plus loin quant à cette approche et déclare même que les pères qui se comportent avec leurs enfants comme s’ils étaient la mère (les  nouveaux pères) sont, le plus souvent, plus destructeurs que les pères qui abandonnent leurs enfants.

C. Olivier (1994) considère qu’en ce qui concerne les fonctions parentales, chaque père a une double responsabilité. En effet, selon lui, le père a une fonction d’exemple corporel pour l’enfant du même sexe et une fonction d’élément de désir pour l’enfant du sexe opposé.

A. Naouri (1992) estime que la différence de sexe entre les parents n’est perçue par l’enfant que si la discrimination des rôles qu’ils jouent est bien claire. D’autre part, il soutient que le père et la mère doivent avoir des attitudes et des comportements spécifiques.

Ainsi, les différences entre les deux figures parentales se manifestent d’une manière précoce et sont essentielles pour soutenir la dynamique de  dé- fusionnement  et d’autonomisation de l’enfant, (J. Le-Camus, 1997). Outre le fait qu’elles se manifestent par des particularités associées au sexe biologique (telles que l’odeur, la texture de la peau et la consistance musculaire), ces différences se manifestent également à travers des dialogues que les deux parents établissent de manière précoce avec l’enfant et qui présentent une marque tangible de masculinité et de féminité.

Y. Castellan (1993) rappelle l’importance de l’existence des  deux parents et souligne que l’attention du bébé quant à la différentiation sexuelle est sollicitée bien avant qu’il ne la connaisse puisque pour le nouveau-né les particularités physiques du père représentent une nouveauté complémentaire, «  une autre chose qui est importante, puisqu’il est au côté de sa mère, accepté par sa mère » (idem, p. 127).Les deux parents contribuent en apportant des fonctions essentielles mais profondément différentes qui si manifestent dès la naissance de l’enfant et qui se développent et accompagnent son développement. De cette façon, l’enfant ou le jeune qui a la capacité de les distinguer réussit à les identifier de manière naturelle comme appartenant à un  couple parental.

P. Malrieu et S. Malrieu (1973) considère également que les fonctions parentales sont différentes et qu’il subsiste donc, d’une part, une différentiation concernant les fonctions sociales et qu’il y a, d’autre part, une tonalité affective et sexuelle différente.

Selon G. Courneau (1989, p. 22), « le père est le premier autre que l’enfant rencontre en dehors du ventre de sa mère », et représente la non-mère et, de ce fait, matérialise tout ce qui n’est pas la mère.

En donnant libre cours à la théorie de la différentiation sexuelle des figures parentales, il faut en particulier comprendre quel est le type de relations qui s’établissent au sein des familles homosexuelles. Cela nous permettra donc de comprendre quels sont les effets que la non différentiation sexuelle peut avoir sur le développement de ces enfants (au cas, bien sûr, où il y aurait, en effet, une différentiation).

Par conséquent, il est donc essentiel, pour le bien-être de tout enfant, que celui-ci ait la possibilité d’interagir régulièrement avec les deux figures parentales, distinctes l’une de l’autre, qui sont également complémentaires. Cela permettra à l’enfant de reconnaitre chez ses parents des caractéristiques et des manières d’être et des comportements relationnels, emblématiques de l’un des deux sexes (le sexe masculin) ou de l’autre (le sexe féminin), contribuant de la sorte au succès de l’identification et de la définition de la personnalité.