2.2.2 - Les interactions parents/enfants

La relation entre un père et son enfant débute bien avant la naissance de ce dernier. En effet, le moment où l’homme découvre qu’il va être père d’un nouvel être est unique et, par conséquent, fait place à de multiples émotions et constructions mentales singulières. Les réactions ayant trait à la prise de conscience de cette nouvelle réalité qui s’approche sont déterminées par la façon dont l’individu a vécu sa propre enfance et par les relations qui se sont donc établies avec son père et avec sa mère, (F. Dodson, 1975).

Le processus lié au fait de devenir père suscite, des processus psychologiques complexes qui se caractérisent par trois moments décisifs. Le premier moment, qui correspond à l’annonce de la paternité, implique la mise en œuvre de processus de constructions mentales, de  remémorisation  et de  sympthomatisation  (couvada-syndrom  ou syndrome de couvade). Le deuxième moment, qui correspond à la naissance du bébé, oriente les constructions mentales selon le sexe de l’enfant. Le troisième moment survient lors des premières manifestations relationnelles entre le père et l’enfant, (F. Hurstel et G. D. Parvesal, 2000).

La relation entre l’enfant et le père est fondamentale pour le développement personnel du sujet psychologique. La relation entre le père et la mère et leurs rapports avec l’enfant, avant même la naissance de leur fils, conditionnent en grande partie las croissance du nouveau-né.

Selon J. Le-Camus et Zaouche-Gaudron (1998), nous pouvons définir trois types différents de participation paternelle : l’interaction, la disponibilité et la responsabilité. Ainsi, la disponibilité nous renvoie à l’accessibilité potentielle du père par rapport à son enfant, qu’il soit ou non présent. La responsabilité correspond, en termes pratiques, à la réalisation de différentes tâches (telles qu’accompagner l’enfant à une consultation chez le médecin, assumer le rôle de parent d’élève). L’interaction correspond au contact direct et visible lors de tâches associées au bien-être de l’enfant, ainsi que pendant d’autres activités partagées par le père et l’enfant (comme les loisirs).

Les interactions parentales sont, ainsi, dès le premier jour de vie, différentes entre les deux parents. Il subsiste une unicité relationnelle puisque, même quand le père réalise la même tâche que la mère, les manifestations relationnelles sont différentes, ne constituant pas de la sorte une réplication des relations mère/enfants, (F. Hurstel et G. D. Parvesal, 2000).

Ainsi, en ce qui concerne l’interaction père/enfant, il semble que, pendant le premier trimestre, le père a tendance à interagir d’une manière plus physique et à apporter une plus grande stimulation sociale, en tapotant de façon rythmée l’enfant de façon à établir des rapports avec son enfant, tandis que la mère a tendance à être plus rythmée et à se retenir, utilisant plutôt des sons calmes, répétitifs e imitatifs, (Yogman, 1981 ; Yogman et al., 1987).

Lorsque l’enfant est âgé d’environ six mois, le père a tendance à utiliser un modèle de relation physiquement plus inattendu et interactif que celui de la mère, bien que les jeux d’intensité physique aient tendance à diminuer selon l’âge, (Clarke-Stewart, 1978; Crawley et Sherrod, 1984; Frascarolo-Moutinot, 1994, M. Lamb, 1976, 1977, Power et Parke, 1979, Teti, Bond et Gibs, 1988,Crawley et Sherrod, 1984).

En raison de cette stimulation physique, à ce stade les bébés préfèrent jouer avec leur père qu’avec leur mère et ils ont tendance à réagir de manière plus positive quand c’est le père qui les prend dans ses bras, (Clarke-Stewart, 1978).

Au niveau de la stimulation, il semble que les deux parents encouragent l’exploration visuelle, la manipulation d’objets, tout en étant attentifs aux relations et aux conséquences. Cependant, à l’exception de ces domaines, il n’y a pas de différences significatives au niveau de l’interaction entre le père et la mère et leur bébé, (Teti, Bond et Gibs, 1988 ; Power, 1985).

On constate donc que « le jeu représente un élément essentiel des relations père/enfant » (M. Lamb, 1996, p. 112), une fois que ce domaine présente des différences significatives entre les deux figures parentales.

Selon une étude de Yarrow et collaborateurs (1984), les pères passent le double du temps total (en étant seuls), consacré à l’interaction, à jouer avec leurs enfants âgés de 6 à 12 mois (43% et 44%, respectivement) que les mères (16% et 19%, respectivement).

Les mères passent la plupart du temps dont elles disposent à réaliser des tâches associées à  l’acte de prendre soin du bébé (des tâches alimentaires et des tâches consacrées à l’hygiène de l’enfant), domaine dans lequel les hommes participent beaucoup moins, (I. Rendina et J. D. Dickerscheid, 1976 ; Yarrow et al., 1984).

De cette façon, nous constatons qu’il existe des différences significatives en ce qui concerne les styles d’interaction paternelle et maternelle, dont les origines sont difficiles à déterminer. Elles peuvent s’expliquer par le biais de facteurs biologiques (inhérents aux différences déterminées par le sexe de l’individu et qui prédisposent, par conséquent, la mère et le père à assumer certaines tâches de manière différente) et/ou de facteurs sociaux (qui s’établissent à partir des rôles sociaux de l’homme  et de la femme  qui influencent la réalisation de certaines tâches parentales).

La pertinence des interactions précoces différentiées entre le père et l’enfant (ainsi que les interactions péri, pré et post-natales) implique que le père adopte une attitude différente de celle de la mère et, en ce qui concerne l’accomplissement de tâches du genre maternel, il devra les effectuer selon son sexe et le genre auquel il appartient, c’est-à-dire le sexe masculin.

Quant aux interactions parentales, il faut à tout prix souligner le rôle du père, de l’homme concret, lors du contact direct avec son enfant en ce qui concerne de nombreuses activités, dès sa naissance, et les caractéristiques et les conséquences que celles-ci ont pour l’enfant.

Cette perspective présuppose, par conséquent, une valorisation du  père réel, de l’homme concret, qui interagit fréquemment avec son enfant, que ce soit pour jouer, que ce soit pour l’aider à faire les devoirs, ou bien que ce soit pour le réprimander quand quelque chose ne va pas bien.