4.2 – Conséquences psychologiques de la carence paternelle

4.2.1 - Carence d’autorité, délinquance et troubles comportementaux

Selon M. Porot (1973), « de sa mère l’enfant attend  l’amour. De son père l’enfant attend d’abord l’autorité » (idem, p. 154) Bien que ce principe soit synonyme d’exagération, puisque l’enfant attend beaucoup plus de son père, le père semble être, en effet, la personne la mieux placée pour représenter l’autorité.

L’autorité, la discipline et les règles sont des éléments essentiels pour le développement de l’être humain. Toutefois, il faut faire une différence entre l’autorité et la tyrannie car  la plupart des enfants aiment se sentir protégés grâce à l’autorité, mais ils souhaitent que celle-ci soit modérée juste et hiérarchique (Michaux, 1950).

Dans le cadre de la psychanalyse, le père est le représentant et le symbole de la loi et lorsqu’il n’est pas présent pour transmettre l’autorité le développement de l’enfant peut en souffrir en raison de conséquences plus néfastes. Quand la fonction paternelle est défaillante, l’enfant ou l’adolescent est susceptible d’avoir des problèmes psychologiques graves y compris des psychoses, (J. Lacan, 1966).

Les psychiatres H. Luccioni et J. M. Sutter (1965) ont souligné les effets du manque d’autorité, notamment ceux liés à la carence paternelle. En considérant que l’autorité est un véritable aliment psychologique, ayant un effet libérateur et éducatif, ils la définissent comme étant une réalité psychologique qui est indispensable pour l’harmonie individuelle.

Lorsqu’il n’y a pas d’autorité, ce manque se déploie en de nombreux symptômes : « Les symptômes, présents dans le Syndrome du Manque d’Autorité, sont de plus en plus associés, en partie ou totalement, à une carence du père » (H. Luccioni et J. M. Sutter, 1965, p. 815). Ils ont donc conclu que de nombreux actes de délinquance sont le résultat de ce manque d’autorité, laquelle est, en général, garantie par le père.

Le Moal (1971) a aussi soutenue, dans sa thèse Parents séparés, enfants perturbés , que la dissociation du couple et l’absence du père qui, souvent, en advient, se traduisent par une situation favorable à l’éclosion de la délinquance et de nombreux troubles du caractère.

Certaines études ont été réalisées afin de comprendre les effets de la carence paternelle au niveau des comportements de délinquance.

Pfiffne, McBurnett et Rathouz (2001) ont analysé la relation entre la présence ou l’absence du père biologique et l’existence de comportements antisociaux vis-à-vis des différents membres de la famille. Selon les résultats obtenus, les familles dont le père est présent, au sein du foyer, présentent moins de symptômes antisociaux que les familles dont le père a abandonné le foyer. Dans ce cas-ci, les caractéristiques antisociales devenaient plus intenses lorsqu’on ne savait pas où était le père ou lorsqu’il ne pouvait pas êtres recruté. En effet, le comportement antisocial de tous les membres de la famille était plus probable lorsque le père était absent et ne participait pas à la vie familiale. Mais ce qui est curieux, c’est que le comportement antisocial surélevé des enfants associés à l’absence du père biologique ne s’est pas modifié en raison de la présence du beau-père, ce qui souligne la difficulté associée au remplacement du père biologique par une autre figure de référence.

Plus récemment, R. Coley et B. Medeiros (2007) ont étudié le rapport entre l’implication du père non-résident et la délinquance chez les adolescents américains. Selon un échantillon composé par 647 adolescents et leurs mères, ils ont constaté que l’engagement paternel représentait un facteur protecteur quant aux comportements délinquants. Ainsi, le père non-résident qui maintenait un contact régulier avec leurs enfants et qui s’inquiétait du bien-être et était soucieux en raison du comportement de l’enfant, contribuait, de la sorte, à la diminution des comportements délinquants et des troubles comportementaux de leurs enfants. Ces auteurs ont également constaté que l’implication parentale avait tendance à augmenter lorsqu’il existait des comportements délinquants, et cela surtout au sein des familles afro-américaines.

Contrairement à ce que quelques  psychologues  défendent, la discipline, les règles et, parfois, certaines punitions, ne provoquent aucun  trouble psychologique  chez l’enfant. À l’inverse, l’absence des figures d’autorité, de discipline, l’absence de règles, l’idée que tout est possible et qu’il n’existe aucune  interdiction personnelle ou sociale  peuvent, par contre, provoquer des  troubles psychologiques, plus ou moins graves, chez l’enfant ou l’adolescent.

Mais, c’est important de relever que ce qui permet que l’autorité soit une réalité positive qui construit le développement personnel, c’est, justement, la justice. Lorsqu’elle est orientée par un principe de justice et de bon sens, l’autorité, la discipline et les règles acquièrent, en effet, une importance capitale. Par conséquent, lorsqu’il n’y a pas d’autorité, cela a un effet préoccupant car la personne la mieux placée pour assumer cette fonction de représentant de la « Loi » est, justement, le père.

Ainsi, il est indéniable que la participation active et constante du père biologique dans la vie de l’enfant est essentielle, que ce soit en termes de prévention de la délinquance ou bien au niveau de la prévention de troubles comportementaux.