Introduction générale

Le marché mondial2 de l’éducation a pris un essor considérable notamment durant ces dix dernières années ; c’est un fait original pour ce secteur d’activité et surtout un fait qui inquiète3 quant à ses retombées qualitatives. Demandons-nous, en effet, comment dans ces conditions marchandes, le transfert du savoir peut-il être effectué, notamment lorsque la prestation se joue dans les pays dits en voie de développement ? C’est particulièrement le cas lorsque ce marché porte sur des prestations de services de haut niveau, qui doivent favoriser le développement des pays et qui touchent par conséquent un service majeur devant être, en principe, garanti par les États. Á l’image du Viêt-nam, les pays émergents se tournent ainsi vers la communauté scientifique internationale pour la formation de leurs élites. Ils espèrent pouvoir soutenir la demande croissante des secteurs économique et social pour la formation de leurs ressources humaines qualifiées. Ils souhaitent aussi, en suspend, bâtir ou consolider le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche, dans un souci de pérennité du fonctionnement de l’appareil éducatif. Ils sont donc convaincus de l’importance du capital humain pour soutenir leur développement4. Ce processus est largement dépendant de la capacité de pouvoir valoriser le capital humain en présence. Cet enrichissement est cependant un phénomène complexe, qui ne se nourrit pas exclusivement du seul environnement universitaire et/ou supérieur. Il dépend de nombreux autres paramètres, notamment des acquisitions fondamentales culturelles, sociales, provenant du réseau familial, de l’école ou du milieu environnant global notamment professionnel5.

Il se crée donc, à l’échelle planétaire, les conditions d’une demande spécifique 6, première étape d’un processus de construction d’un marché mondial de l’éducation vers des pays qui possèdent l’expertise, les programmes scientifiques, les moyens financiers, etc., en bref, des prestations de service symbolisées par l’offre étrangère. Cette offre est produite principalement par les établissements de l’enseignement supérieur des pays développés, publics ou privés. Elle est internationale ou transnationale7 et peut se présenter sous trois formes : la mobilité (on se déplace vers l’expertise), la délocalisation (c’est l’expertise qui se déplace), la formation à distance8. Toutes ces activités se développent de manière exponentielle et représentent une manne économique substantielle comme a pu notamment le démontrer l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC)9. Elles prennent leur envol et se produisent entre autre sur un terrain de l’enseignement supérieur qui était jusqu’à présent occupé par des activités de coopération culturelles qui perdent ainsi largement leur monopole10. Il se forme ainsi un triptyque de conditions favorables au développement d’un marché et/ou du transfert du savoir, entre l’offre – la demande – l’environnement. Au niveau universitaire, le transfert du savoir est donc dorénavant partagé entre des organisations qui poursuivent des logiques différentes, allant d’une vision purement commerciale à la recherche de l’efficacité économique, à celle entièrement culturelle ayant pour seul objet le partage du savoir11.

Cette évolution accentue les problèmes posés par la qualité des prestations de services classiques, exportées, gérées dans un cadre commercial et celles relatives à l’appareil éducatif en particulier. Réputé comme imparfait et contestable, lorsqu’il s’agit de prestation d’intérêts divers, le concept de marché peut dès lors revêtir une forme encore plus « qualitativement douteuse » puisque la prestation est censée servir à la fois des intérêts collectifs, sociaux ainsi que des intérêts financiers. Nous verrons que cette question dépasse en fait le cadre de notre problématique puisque, de toute façon, à défaut de soutiens extérieurs suffisants, l’investissement privé s’impose comme l’un des seuls recours à l’insuffisance des capacités d’autofinancement des pays. Pour la majorité de l’offre, publique ou privée, la question n’est donc pas de savoir s’il faut l’éviter mais plutôt comment intégrer l’activité privée comme un préalable stratégique12.

Ainsi, le marché de l’éducation offre, en plus de l’imperfection propre à tout secteur marchand de ce type, la particularité de questionner sa capacité à pouvoir tenir son rang de service capital auprès du public. Á ce titre bon nombre d’économistes, surtout les nouveaux Keynésiens (à la différence de la nouvelle économie classique 13), ne croient pas que les marchés s'équilibrent rapidement en suivant la loi de l'offre et de la demande. En effet, pour eux, les salaires et les prix ne sont pas flexibles mais « visqueux » du fait des imperfections de l'information 14. Á une autre échelle, l’imperfection, c’est aussi l’incapacité du marché de pouvoir fournir des conditions permettant l’information, le choix et le contrôle. Avec le marché de l’éducation, on ajoute aux risques de l’imperfection, le risque de l’inadéquation des prestations de services payants et qui de plus, à l’exportation, posent la conditionnalité de pouvoir répondre aux attentes des pays demandeurs.

Les pays émergents, dont fait partie le Viêt-nam, se retrouvent face à une situation extrêmement délicate. L’enjeu est relatif au capital humain, à la capacité de pouvoir former les ressources humaines suffisantes pour garantir les objectifs de développement 15. La question de la pérennité des prestations s’avère d’autant plus complexe lorsqu’elle est posée dans un environnement où s’invite une multitude d’acteurs polymorphes, porteurs d’intérêts particuliers et véhiculant des logiques différentes16. Ces acteurs sont principalement représentés par – les concurrents de l’offre ainsi que la demande de la population - la société civile et la société économique - les institutions et les États - les étudiants, les enseignants, les universités ou les entreprises. Ils sont tous dotés de projets différents avec également une rationalité limitée, qui peut interpeller la manière selon laquelle leurs intérêts se marient. Ils sont autonomes mais rentrent en interaction dans un système, en l’occurrence le marché de l’éducation, qui contribue à structurer leurs relations à travers le jeu éducatif et commercial. Tout ceci crée un environnement d’acteurs qui s'ajuste à des contingences et des changements de natures diverses, mais surtout qui évolue aussi rapidement que la croissance et le développement des pays émergents. C’est un système en mouvement dans lequel il n'existe pas d'ajustement naturel, c'est-à-dire automatique et incontrôlé, mais uniquement des construits, des comportements intentionnels17, y compris dans notre cas intentionnellement politique.

La question de la pertinence du transfert

C’est dans ce système très complexe que nous nous questionnons sur les limites de ce concept de « marché imparfait », dans sa capacité de pouvoir générer et garantir l’un de ses objets : le transfert des savoirs. Ce questionnement est souligné par l’enjeu principal de la circulation du savoir et sa co-construction par de multiples acteurs ainsi que par la formation du capital humain et le jeu ou les intérêts des acteurs. L’ensemble produit un environnement de recherche qui s’articule autour du triptyque suivant, figure 1 :

[Figure 1 – Triptyque des composantes initiant la thèse]
[Figure 1 – Triptyque des composantes initiant la thèse]

Parce qu’il touche le domaine de l’éducation, le concept de marché doit être interrogé, non seulement dans sa capacité de produire des biens et des services, mais aussi de pouvoir générer les ressources humaines qui sont appelées à le faire vivre. Cette interdépendance nous conduit à la question de la pérennité et de la pertinence des résultats et finalement à la capacité d’évaluer ces mêmes résultats 18. La question du résultat prend une forme particulière lorsqu’il s’agit d’éducation car l’enjeu est le développement du capital humain, mais cet enjeu peut être fortement relatif en fonction des objectifs et des acteurs. Á qui profite l’activité et dans quelles perspectives : à la carrière des étudiants, à la sauvegarde de leur famille élargie, aux établissements qui cherchent à se construire ou s’autofinancer, au secteur économique qui recherche le profit ou à l’Etat qui souhaite maintenir ses objectifs politiques ? La prestation éducative a pour singularité de produire du savoir en sachant que la matière première est la ressource humaine, mais que le résultat ne profite pas forcément à cette dernière. Ainsi, un État forme des citoyens avant tout pour garantir des intérêts collectifs au delà des intérêts individuels. Le capital humain profite à tout le monde, au collectif, à l’État, au secteur économique mais aussi, avant tout, à la personne qui le véhicule. Dans un contexte de marché, ce même capital humain prend la valeur d’une cible qui intéresse dès lors les producteurs du savoir, en l’occurrence les établissements supérieurs dans leur mission d’universalisation des connaissances. Dès lors, l’analyse du jeu des acteurs prend tout son sens car les enjeux peuvent être contradictoires, liés à des attentes ou à des besoins à différentes places et niveaux sociaux, ce que nous pouvons définir par la logique des acteurs 19. Cette notion invite à une multipolarité théorique et introduit les dimensions culturelles, historiques et psychologiques dans l'analyse stratégique.

Une approche transdisciplinaire

Nous faisons le choix d’aborder le sujet des transferts du savoir à travers le marché de l’éducation en poursuivant une approche scientifique très transversale20. Nous nous inscrivons donc dans une logique transdisciplinaire du domaine des sciences humaines et sociales. C’est le sujet de l’éducation, des conditions de son transfert et des compétences dans le monde du développement, qui imposent plus que jamais une démarche scientifique s’enrichissant de la complémentarité des sciences. Cette démarche s’inscrit dans le sens de celle prônée, entre autre, par Deleuze ou par Bourdieu21. En référence à la classification proposée par Yves Bertrand22, nous observons qu’en s’interrogeant sur la circulation du savoir dans le monde du développement, nous avons une lecture sociocognitive23 et sociale24 qui porte sur l’articulation des phénomènes culturels, sociaux ainsi que sur leurs conséquences.

Notre thèse nous a amenés malgré la difficulté de ce positionnement, à nous situer au croisement de nombreux champs disciplinaires du domaine des sciences humaines et sociales25. Elle concerne principalement les sciences de l’éducation, mais aussi, par notre ambition méthodologique, les sciences de la gestion. L’approche de Mialaret26, propose ainsi une lecture du traitement scientifique en trois branches, tableau 1 :

[Tableau 1 – Approche scientifique de la recherche]
[Tableau 1 – Approche scientifique de la recherche]

L'approche éducationnelle diachronique ou synchronique de la thèse permet entre autre d’aborder l’histoire de l’éducation au Viêt-nam pour comprendre les enjeux de la thèse et le jeu des acteurs : sous un angle aussi bien historique, anthropologique, sociologique que politique – à travers l’économie de l’éducation pour aborder la place de l’éducation dans le système économique vietnamien, le rôle essentiel du financement de l’éducation comme moteur de la stratégie des acteurs et notamment de la politique publique et enfin pour étudier l’efficacité des systèmes éducatifs – grâce à l’économie du développement, pour mesurer les enjeux liés au marché mondial de l’éducation rapportés au niveau du Viêt-nam.

L’approche relative au domaine de l’éducation met ainsi en lumière le jeu des acteurs impliqués dans la délocalisation des formations : la sociologie, la politique, la dynamique des organisations, la stratégie. Ces sciences de l’éducation permettent l’accès aux connaissances des systèmes et des organisations, en l’occurrence de l’offre éducative et des partenaires locaux. Les sciences qui se trouvent en interface interviennent quant à elles sur la connaissance et le développement des acteurs en tant que personne, la psychologie, les neurosciences, la psychanalyse, etc. Elles nous éclairent sur le comportement des individus en tant qu’acteurs du système et interviennent non seulement dans la construction du savoir (la motivation, le désir, les capacités intrinsèques, etc.), mais aussi dans toute la formation des relations entre les acteurs (dynamique et phénomène de groupe, circulation du pouvoir, etc.).

Notre intérêt pour une vision sociocognitive ou sociale des problèmes abordés nous conduira à privilégier les sciences portant sur les phénomènes collectifs et sociaux. Parmi toutes celles qui rapprochent le sujet(s) ou l’acteur(s) de son ou de ses objets, on distingue les sciences relatives à l’évaluation et particulièrement des politiques publiques. Elles sont essentielles pour mesurer la pertinence des prestations, pour la mise en relation entre les objectifs et les résultats de la formation. Elles représentent donc un outil méthodologique de premier plan pour notre recherche.

L’approche didactique, permet quant-à elle d’aborder les matières qui véhiculent les savoirs scientifiques. Ces derniers concernent potentiellement celles susceptibles de composer un programme de formation au management. Notre choix méthodologique nous conduira cependant à interroger la didactique essentiellement en termes d’adaptation des contenus et des conditions globales du transfert des savoirs. Il ne s’agira donc pas d’analyser les valeurs scientifiques mais plutôt la capacité des apprenants de pouvoir se les approprier. Cette démarche nous mènera indubitablement à interroger le système de gestion des activités, autrement dit l’ingénierie pédagogique.

Problématique et hypothèses

Nous partons de l’idée que la formation du capital humain représente une prestation de service sujette à alimenter un marché mondial de l’éducation. Nous faisons l’hypothèse que la marchandisation du savoir ne représente cependant pas toujours et parfois loin s’en faut, des conditions propices à une formation pertinente du capital humain et donc des conditions des ressources humaines nécessaires partout dans le monde. Nous supposons que le risque qualitatif est d’autant plus lourd pour des pays émergents qui, à défaut de ressources suffisantes, deviennent des récipients des savoirs transférés et subissent ainsi les éventuels aléas du marché de l’éducation. Les conflits d’intérêts que suscite cette activité peuvent être incompatibles, voire contradictoires, avec l’intérêt de certains acteurs et notamment de celui de certains États. L’environnement concurrentiel qui préfigure à l’instauration de tout marché mondial de ce type, peut, lorsqu’il est appliqué à l’éducation, être générateur de conflits d’intérêts entre l’offre et la demande, voire entre les demandeurs eux-mêmes. Ceci risque d’interférer négativement sur les conditions et sur la qualité des savoirs transférés. Touchant ainsi le domaine d’un service public essentiel au fonctionnement des États, la globalisation économique risque ainsi d’imposer ses règles de fonctionnement, y compris lorsqu’elles sont perfectibles, à un secteur de l’éducation qui était jusqu’à alors relativement épargné par les risques éventuels liés au commerce des services. Cependant, ce secteur a-t-il la possibilité de générer des services au même titre que n’importe quelle autre prestation, par exemple que les loisirs ou les assurances ? Est-ce que le fait de représenter un service essentiel pour le développement de pays émergents ou d’être exploité dans un pays émergent tel que le Viêt-nam, ne change-t-il pas la donne ?

Si notre hypothèse se confirme, nous montrerons dans quelles conditions une prestation éducative peut s’imposer dans des pays dits en voie en développement (PVD) pour pouvoir former les ressources humaines de la manière la plus pertinente possible. Pour vérifier notre hypothèse, nous limiterons notre recherche au marché des masters en management international 27 qui sont délocalisés au Viêt-nam.

Aussi nous tenterons de répondre à l’interrogation suivante :

Dans le secteur de l'enseignement supérieur des pays en développement, comment définir des modes opératoires à la fois compétitifs sur un marché des services qui s’ouvre à l’offre étrangère et pertinents au regard des valeurs ou des objectifs spécifiques des financeurs publics locaux ou internationaux ? Trois facteurs majeurs nous invitent à nous limiter à ce domaine d’étude28 :

  • au niveau du marché de l’éducation : l’importance que prend ce phénomène au niveau mondial et l’imperfection de tout marché limite grandement les possibilités de globaliser les recherches à ce propos. L’analyse d’une prestation aussi complexe qu’un service éducatif n’a de sens que si elle ne s’applique qu’à un champ d’investigation restreint, dont le traitement pourrait servir à la conceptualisation du problème dans sa globalité. Nous aborderons le problème sous l’angle de la notion de service orientée vers un public ciblé : c’est la demande des bénéficiaires qui forme la base du service29 ;
  • le polymorphisme des acteurs du système en présence contraint à une approche précise des attentes et des besoins 30 : la délimitation du jeu des acteurs dans un contexte sociologique et anthropologique restreint à un marché national, tel que celui du Viêt-nam, est donc capitale ;
  • le transfert du savoir pose la question de sa pertinence et donc de la diversité des attentes des acteurs. Il paraît dès lors prépondérant de cibler un milieu géographique, en l’occurrence le Viêt-nam, pour la pleine mise en valeur des enjeux liés aux objectifs des différents acteurs.

Finalement, le Viêt-nam représente l’archétype du pays émergent, objet de notre recherche. Le marché de l’éducation vient de démarrer grâce à une ouverture politique tout azimut en faveur des investissements étrangers, à cette heure, il est en pleine expansion. Même si les attentes sont fortement variées, ce marché a ainsi l’avantage de concerner un public et un nombre encore restreint de MMI, ce qui facilite le travail d’investigation.

Pour illustrer et justifier notre hypothèse, nous allons montrer l’importance accordée par les acteurs, notamment par l’État, envers cette offre étrangère pour former les élites du pays. Nous allons partir d’une approche macroéconomique vers une approche microéconomique de la problématique. Nous observerons le fonctionnement de ce marché de l’éducation, ses enjeux et ses risques, en partant de son environnement global, mondial, puis en dérivant, decrescendo, vers la situation vietnamienne et enfin, vers le jeu et la stratégie des établissements et des acteurs. Nous allons tenter de démontrer que la seule reconnaissance qualitative de l’offre étrangère ne suffit pas à garantir un transfert pertinent des savoirs tel qu’il est proposé au Viêt-nam actuellement.

L’enjeu de notre travail est de vérifier si nous pouvons affirmer les hypothèses suivantes :

  • hypothèse 1 : la circulation du savoir et la formation du capital humain constituent bien un phénomène mondial de plus en plus régulé par un marché de l’éducation ; ce phénomène relativement nouveau touche particulièrement le Viêt-nam puisque ce dernier a de très forts besoins et attentes, pour soutenir son développement, compenser son manque de ressources humaines et financières. Toutefois, le marché de l’éducation n’est cependant pas un marché comme les autres, particulièrement au Viêt-nam. Cette prestation de service est très complexe, elle touche le domaine public, dépend fortement de l’environnement local et fait participer activement les acteurs. Les délocalisations d’un master mettent en jeu des acteurs à statut et intérêts particuliers, qui compliquent et qui risquent de compromettre une transmission pertinente des savoirs, ce que nous nous proposons de démontrer ;
  • hypothèse 2 : la politique d’autofinancement menée par le Viêt-nam et d’ouverture à l’investissement étranger peut constituer à la fois une source de richesses mais aussi de danger pour le développement du pays. D’un côté, elle améliore les ressources, de l’autre elle complique le contrôle et l’adaptation des formations. Le risque est que les formations ne soient pas suffisamment adaptées aux spécificités locales et quelles ne répondent pas aux besoins socioéconomiques ni aux réalités culturelles du Viêt-nam ;
  • hypothèse 3 : cette situation place en porte à faux une offre publique31 poursuivant traditionnellement une logique culturelle, sociale et humaniste face à une offre privée habituée à défendre une logique commerciale pour pouvoir se développer32. Aussi, pour mener à bien ces activités délocalisées, l’offre étrangère, ainsi que tous les acteurs vietnamiens doivent-ils créer un environnement particulier, des conditions spécifiques et propices adaptées aux spécificités locales.

Dans ces conditions, comment définir des modalités d'ingénierie pédagogique et d'évaluation qui permettent de faire coïncider ces différentes logiques d’acteurs et de rendre les offres performantes ? Tel est le principal enjeu de cette recherche.

Cet enjeu d’inscrit dans un terrain difficile car notre problématique est nouvelle, d’actualité et « sérieuse » car touchant le capital humain. Susceptible d’intéresser de nombreux universitaires et politiques, elle est aussi sujette à polémique. Aussi, ces facteurs rendent-ils son traitement d’autant plus complexe d’un point de vue scientifique.

L’ouverture à l’offre étrangère initiée par le Viêt-nam est notamment motivée par un manque d’expertise. Les raisons qui motivent l’offre étrangère sont-elles quant-à elles uniquement scientifiques, culturelles, ne sont-elles pas aussi économiques ? En plus des conditions de transfert des savoirs, nous aborderons le sujet de l’éthique universitaire, notamment la question de la discrimination économique, car les formations sont pour l’essentiel payantes, ce qui peut compliquer la recherche dans la mesure où l’aspect discriminant est perçu comme contradictoire avec la vision du service public prônée par une partie des universitaires. C’est donc un sujet qui peut rencontrer des résistances. Alors que la fuite des cerveaux anime depuis fort longtemps les gazettes et peut être, comme nous le verrons, le fruit d’une logique d’influence de la part des États et de tous les établissements, on note aussi que la marchandisation pose actuellement de plus en plus de questions déontologiques dans le milieu universitaire à cause des problèmes qualitatifs mais aussi de corruption liés notamment à des trafics de diplômes. Il est à ce titre toujours plus compliqué de traiter d’un sujet d’actualité.

Il n’est pas non plus évident de poser une problématique portant sur le savoir, touchant les pratiques des universitaires eux-mêmes. Même si notre thèse interroge avant tout les méthodes, les structures de l’ingénierie pédagogique, ou en bref les conditions organisationnelles ou opérationnelles pour la transmission du savoir, il n’empêche que le résultat peut être perçu comme un « jugement » qualitatif des savoirs transférés. C’est d’autant plus probable que pour bon nombre de MMI, la délocalisation est portée par un minimum de personnes en mobilité, souvent par une seule. Dans un monde où le processus d’évaluation des pratiques et des politiques publiques est plutôt rare et ne peut de toute façon être effectuée que par des pairs, on comprend bien dès lors toute la complexité de la problématique que nous souhaitons aborder dans le cadre de notre recherche doctorale.

Une approche méthodologique conditionnelle

La recherche sur les modalités de délocalisation est donc originale mais complexe. Elle est sérieuse car il a été décidé par l’État qu’il s’agissait en partie de l’avenir du peuple vietnamien. Elle est nouvelle car, sur le modèle occidental, les délocalisations ont débuté récemment dans le monde du développement et particulièrement, au Viêt-nam. Enfin, elle est d’actualité, car suite à certains événements récents, elle suscite des inquiétudes quant à la crédibilité de certaines prestations fournies33.

C’est aussi et surtout une problématique complexe car elle touche autant les secteurs : de l’enseignement supérieur - de l’économie pour la formation des cadres et l’activité commerciale que suscite les délocalisations - du social et du culturel car ces facteurs conditionnent l’environnement des formations - politique car ces activités sont le fruit de la volonté d’un parti socialiste qui se tourne définitivement vers le marché. Cette situation génère tout au moins trois situations risquant de paraître conflictuelles : l’imperfection du marché – l’ambiguïté liée à la marchandisation du savoir – les conflits d’intérêts des acteurs.

Le premier conflit émane de la notion de marché imparfait 34 puisque une prestation de service du type d’un master délocalisé peut occasionner un déséquilibre d’information et de choix encore plus important pour le public dans un pays comme le Viêt-nam.

Le second conflit peut être provoqué par une marchandisation du savoir légitimée par l’appareil universitaire public. Non seulement l’aspect commercial des formations rebute la majorité des universitaires mais de plus, il est dès lors choisi de mettre une partie de l’appareil de production des savoirs et de la formation des ressources du pays entre les mains d’investisseurs étrangers. Dans un pays socialiste, ce n’est pas chose commune. Ainsi se superposent au Viêt-nam :

  • un système public de formation comprenant une aide extérieure importante, souvent sous la forme de programmes éducatifs spécifiques des pays riches et des agences de développement ;
  • et surtout un secteur marchand, local mais de plus en plus ouvert à des acteurs internationaux, secteur qui peut générer le troisième cas de conflit : le contrôle de qualité.

En effet, les universitaires du secteur public représentant l’offre ne sont pas coutumiers de ce genre de pratique, même s’ils reconnaissent de plus en plus comme inévitable de devoir passer par des gestions de projet tout au moins en partie autofinancés. Mais comme le démontre Annie Vinokur, « le problème des financements de l’éducation peut fortement porter préjudice à la vocation même de service public de l’éducation mais surtout à sa qualité : qui paye décide est à la fois un adage populaire ("qui paie les violons choisit la musique") et l'aphorisme d'une doctrine qui entend substituer aux rapports de pouvoir hiérarchisés des systèmes éducatifs publics des relations contractuelles, quasi-marchandes ou marchandes » 35.

Pour répondre à notre problématique, il nous faut donc trouver une méthode qui permette à la fois de tenir compte des enjeux liés à l’influence de multiples environnements (social, éducatif, politique, économique) et des principaux conflits générés par cette problématique (l’imperfection du marché – le conflits d’intérêts des acteurs - la qualité des prestations).

Une ambition méthodologie inductive

Vu le champ d’application de la recherche et les enjeux relatifs au marché mondial du savoir, il nous est apparu nécessaire de partir d’un contexte macroéconomique, symbolisé par l’environnement global et mondial du marché, pour finalement revenir à une application à l’échelle d’un pays tel que le Viêt-nam. Ceci permettra de mesurer plus précisément les enjeux et les conséquences d’un tel marché à l’échelle d’un pays émergent qui, par ses choix politiques, doit actuellement faire face avec force à la problématique de la marchandisation du savoir. Pour ce faire, nous aurons recours à une approche inductive avec des moyens de mise en œuvre variés allant de la revue de littérature, aux enquêtes quantitatives et qualitatives et les outils d’analyse utilisés pour l’évaluation des politiques publiques.

Notre ambition méthodologique principale sera d’appliquer les concepts des sciences de gestion au secteur éducatif et notamment, d’analyse stratégique dans un environnement concurrentiel où il existe une diversité d’offres. Nous utiliserons notamment les outils de gestion et l’analyse concurrentielle 36, de marketing des activités des services 37et d’analyse stratégique internationale du domaine des services 38, en supposant que l’éducation constitue une activité de service dans laquelle le client/étudiant doit être l’acteur dominant. Les finalités et notamment la pertinence socio-économique de cette activité éducative seront intégrées par le recours aux méthodes d’évaluation des politiques d’actions publiques, tableau 2 :

[Tableau 2 – Traitement méthodologique inductif par les outils de gestion]
[Tableau 2 – Traitement méthodologique inductif par les outils de gestion]

L’objectif final de cette méthodologie est de tenter d’aborder frontalement les débats très complexes tels que ceux consacrés à la marchandisation du savoir, à la discrimination économique, à la fuite des cerveaux39 et surtout à l’adaptation des formations délocalisées aux spécificités locales. En interrogeant les modalités de la délocalisation, nous tentons de nous appuyer sur la forme pour mener une réflexion sur l’évaluation de la pertinence des formations exportées. Nous nous plaçons donc en amont (préparation) ou plus rarement en aval (résultats) de la formation en interrogeant notamment la stratégie et l’ingénierie pédagogique.

Nous menons un travail d’évaluation de formes ex ante ou ex post40. Nous souhaitons évaluer les conséquences des formes choisies pour mener à bien une délocalisation et non pas l’acte de formation lui-même. Il s’agira de s’extraire des débats pouvant être perçus comme partisans, en ayant pour objectif de mettre à jour des modèles à partir des cas existants. Les établissements et les cas ciblés ne deviennent donc plus que des supports nécessaires à la conceptualisation. Ainsi notre travail ne consiste pas à évaluer la qualité intrinsèque et formelle des formations MMI observées, nous nous attacherons à l’étude du processus décisionnel conduisant au choix du modèle.

Le plan de thèse

Notre thèse comprendra une introduction générale, deux grandes parties comprenant respectivement cinq chapitres et d’une conclusion générale.

La première partie sera formée de trois chapitres et abordera la méthodologie, les concepts scientifiques ainsi que tout l’environnement de la demande vietnamienne. Elle permet finalement d’exposer les enjeux internationaux et locaux à travers la demande vietnamienne.Nous abordons la problématique sous un angle macro-économique et notamment les enjeux de la marchandisation du savoir dans son environnement mondial. Elle recentre ensuite notre recherche sur une dimension microéconomique, sur le Viêt-nam et doit permettre de déterminer la demande des acteurs envers l’offre étrangère.

La seconde partie sera composée de deux chapitres. Elle abordera la proposition de l’offre internationale sous la forme des masters de management au Viêt-nam. Nous exploiterons toutes les informations recueillies pour rapprocher la demande vietnamienne de l’offre étrangère et pour en tirer des analyses qui nous aideront à répondre à notre problématique. Nous évaluerons la pertinence de la réponse de l’offre étrangère sous la forme de modèles stratégiques.

Premier chapitre : fondement méthodologiques

Il doit permettre entre autre de montrer que, d’un point de vue méthodologique, notre travail suit une ambition inspirée des méthodes de gestion, notamment de l’approche concernant les marchés concurrentiels au niveau international.

Deuxième Chapitre : les enjeux du marché de l’éducation et du développement.

Il permettra de nous positionner dans un premier temps au niveau macroéconomique, de l’environnement global et en particulier sur celui des pays d’Asie de l’Est en abordant les enjeux et les formes principales prises par le marché de l’éducation au niveau international, les conditions de son émergence, son volume, ses conséquences pour l’éducation mais surtout pour le développement des pays. Nous tenterons de faire l’articulation entre les mécanismes principaux censés régir le développement économique et social des pays à travers différents stades et de comprendre quel est le rôle du capital humain dans cette évolution. Nous analyserons les relations éventuelles existantes entre les moyens que ces pays possèdent pour développer des ressources humaines et le marché de l’éducation. Nous essayerons de mettre en valeur les formes, notamment stratégiques, qu’il prend au niveau de l’enseignement supérieur et de s’interroger sur les motivations de l’offre des établissements universitaires. Nous réfléchirons sur les conditions globales, théoriques qui garantiraient le transfert du savoir et l’enrichissement des ressources humaines des pays récipients.

Troisième chapitre : environnement et offre locale du marché de l’enseignement supérieur du Viêt-nam.

Le chapitre précédent aborde de manière globale les grands enjeux du marché de l’éducation, des formes principales de cette offre de service, les conditions générales de transfert du savoir, le présent chapitre abordera les mêmes thèmes sous l’angle d’un marché restreint, national, à l’échelle microéconomique, pour comprendre les enjeux appliqués à une situation concrète et locale. L’objet final du chapitre est d’évaluer les attentes des acteurs présents dans le pays à l’égard de l’offre internationale. Nous aborderons dans un premier temps les facteurs historiques, sociaux, culturels, politiques et économiques, qui ont favorisé l’émergence du marché de l’éducation et ont sculpté le paysage actuel du système éducatif. Nous découvrirons pourquoi le marché s’est créé, quels en sont les besoins économiques et quels sont les moyens de l’offre de formation locale. Nous comparerons donc les besoins en ressources humaines pour satisfaire le renouveau social et économique, avec la réponse de l’appareil éducatif vietnamien, notamment pour la formation des cadres supérieurs et pour garantir la recherche. Ce chapitre a donc pour objectif de définir les fondations de l’environnement qui a permis l’avènement de ce marché de l’éducation et les motifs qui sont censés légitimer l’intervention de l’offre étrangère au Viêt-nam.

Quatrième chapitre : l’offre étrangère dans le marché des formations à la gestion

Après avoir observé le marché de l’éducation à travers l’environnement global, puis mis en valeur les enjeux dans l’environnement vietnamien, les éléments seront réunis pour répondre à notre problématique. Finalement les modalités de délocalisation des formations étrangères seront analysées en fonction de la demande vietnamienne. Ce sera l’occasion d’exploiter les enquêtes comparatives et les différents entretiens ou expériences à propos des MMI observés entre 2005 et 2008. Nous essaierons, grâce à des études de cas, de rassembler toutes les informations pour décrire plus précisément quels sont les risques et les difficultés pour pouvoir transférer les connaissances en management, des pays occidentaux vers le Viêt-nam. De même, nous observerons la manière avec laquelle l’offre étrangère intègre les spécificités locales pour transférer ses formations. Comment se comportent les différents acteurs, qu’ils aient une influence externe à la formation ou qu’ils aient à intervenir directement dans sa production ? Ainsi, nous verrons à quelles conditions environnementales et intrinsèques l’offre étrangère est soumise pour pouvoir garantir l’atteinte de ses objectifs.

Cinquième chapitre : Analyse des résultats

Dans ce dernier chapitre, il sera temps de croiser les différentes observations et analyses pour mesurer la corrélation entre les attentes locales et l’offre étrangère. Ceci s’effectuera grâce à une mise en perspective de modèles stratégiques. Nous verrons si, malgré toutes les contraintes, les modalités mises en place sont suffisantes pour garantir le transfert qualitatif ou d’excellence, tel qu’il est attendu par tous les acteurs, voire escompté par l’offre elle-même : y a-t-il cohérence entre la formation délivrée au Viêt-nam est celle qui est produite dans le pays d’origine ? Cette cohérence suffit-elle pour garantir un transfert pérenne des savoirs ?

Pour ce faire, nous analyserons les modèles stratégiques sous trois angles : le premier concerne la capacité intrinsèque des établissements à pouvoir maîtriser l’ensemble de l’appareil de production du savoir dont elle est censée être maître d’œuvre - le second angle traitera de l’environnement des forces extérieures, pour mesurer la manière dont elles interagissent sur la délocalisation - le troisième concernera le jeu entre les concurrents directs, nous nous interrogerons sur la force du marché et sur les arguments des concurrents pour pouvoir se différencier.

Notes
2.

Le concept de «marché de l’éducation» est utilisé en raison de son impact ou son intérêt aussi bien par : les économistes ; les organisations internationales telle que l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), grâce à ses revues comme « Enseignement supérieur, internationalisation et commerce » ou encore l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) pour débattre des problèmes de taxation dans le cadre des accords du General Agreement on Tarifs and Trade (GATT). Voire notamment l’article de K. Larsen et S. Vincent-Lancrin, Le commerce international de services d’éducation : Est-il bon ? Est-il méchant ? Observatoire OCDE et statistiques comparatives pays de l’OCDE entre 1981 et 2001, CNRS-INIST, éd. OCDE : 9-50, 2002.

3.

Le fait avéré se traduit dans toute la littérature des organismes internationaux tels que l’OCDE, l’Organisation des Nations Unies pour l’Education (UNESCO).

4.

OCDE, L'investissement dans le capital humain, une comparaison internationale, Paris : éditions de l’OCDE, 1998, rapport 10, disponible sur http://213.253.134.29/oecd/pdfs/browseit/9698022E.PDF (visité 07/05/2008).

5.

C’est ce qui fait dire à Hallak « L’une des responsabilités fondamentales de l’État en matière d’éducation est d’assurer la pertinence de l’enseignement supérieur : pertinence économique, bien sûr, mais également pertinence sociale et culturelle  ». Hallak J., .2002. Formation et enseignement supérieurs au Vietnam - Transition et enjeux - MAE-Ambassade de France en République Socialiste du Viêt-nam - Les cahiers de la coopération, page 69.

6.

Il faut comprendre les termes de « demande » ou « offre » dans le sens économique tels qu’ils peuvent être explicités, par exemple :

- dans les relations commerciales, par M. Porter, L'avantage concurrentiel, Inter édition, Paris, 1986.

- dans les relations stratégiques, par J.P Lemaire, avec la collaboration de G. Petit, Stratégies d’internationalisation, Edition Dunod, Paris, 1997.

- dans l’analyse marketing, par C. Cudennec, G. Tocquer, Service Asia, Editions Prentice Hall, Singapour, 1998.

Ces termes sont cependant utilisés de manière générique dans tous les domaines scientifiques.

7.

Le terme « transnational » à un sens identique à international lorsqu’il est utilisé par des organisations telles que l’OCDE. En référence au secteur des entreprises, il pourrait représenter les établissements qui délocalisent des campus à l’étranger. OCDE, Enseignement supérieur : internationalisation et commerce, Paris : éd. de l’OCDE, 2004, disponible sur http://213.253.134.29/oecd/pdfs/browseit/9604062E.PDF (visité 07/04/2008).

8.

Suivant la typologie explicitée dans la revue OCDE, Ibid.

9.

K. Larsen et S. Vincent-Lancrin, Le commerce international de services d’éducation : Est-il bon ? Est-il méchant ? op. cit.

10.

La part relative des investissements étrangers est en diminution, revue OCDE, 2004.

11.

Le terme de logique traduit le sens donné à la stratégie : la logique stratégique. Nous verrons par la suite que cette dernière n’est pas figée, que la détermination n’est jamais simple et qu’elle se situe en fait entre ces deux logiques « extrêmes », l’une commerciale visant à une certaine efficacité économique, l’autre « culturelle » totalement non lucrative, visant à une efficacité en terme de pertinence du projet relatif au transfert du savoir. OCDE, Enseignement supérieur : internationalisation et commerce, op. cit.

12.

Ceci malgré l’inquiétude de nombreux pays qui ont constaté que la dépendance économique du système éducatif est la cause des plus grandes dérives en matière de qualité. OCDE, « La massification et développement des universités dans les pays Industrialisés », in Revue économique de l'OCDE, n° 34, Paris : 2002/1. (visité 07/05/2008).

13.

A l’exemple de Robert Lucas, prix Nobel d'économie en 1995. Leurs théories reposent sur des fondations micro-économiques rigoureuses, desquelles ils déduisent des modèles macroéconomiques à partir des actions des agents eux-mêmes modélisés par la micro-économie. Ils se fondent notamment sur les hypothèses suivantes : la rationalité des agents (qui cherchent à maximiser leur utilité), l’anticipation rationnelle à chaque instant, l'économie qui possède un équilibre unique (avec plein emploi et pleine utilisation des capacités de production) et un équilibre atteint par un mécanisme d'ajustement des prix et des salaires. Ce courant est mis à mal par la crise économique qui sévit actuellement, démontrant que l’équilibre des marchés et donc leurs hypothèses, sont loin de se vérifier en l’état.

14.

Stiglitz J.E., Principes d’économie moderne, De Boeck Université, coll. Ouvertures Economiques, 2004, p.314.

15.

Cet enjeu majeur notamment développé par l’UNESCO/OCDE, Recueil de données mondial sur l'éducation, Montréal : Institut de statistiques comparées de l'UNESCO en collaboration avec l’OCDE, Portail des Nations Unis, disponible sur http://portal.unesco.org , 2005, (visité le 21/04/2008).

16.

L'acteur, au sens de Crozier-Friedberg, est celui qui dont le comportement, ou l'action, contribue à structurer un champ, c'est-à-dire à construire (des) régulations. On cherche à expliquer la construction des règles, ce qu’ils définissent par le « construit social » à partir du jeu des acteurs empiriques, calculateurs et intéressés. Michel Crozier, Erald Friedberg,L’acteur et le système. Paris : Le Seuil, [1977], 1991.

17.

Pour Crozier et Friedberg, ces mécanismes assumés constituent le système d'action concret. Ibid.

18.

Il faut comprendre la pertinence dans le sens des choix stratégiques et la manière de les assumer, de les conduire. Des travaux ont notamment été conduits plus récemment dans ce sens par Weber M. (1995) et Mintzberg (1999), mais aussi avant eux par Taylor, ou Maslow.

Max Weber, Économie et société, tomes l et 2, Paris : Pion, 1995.

Henri Mintzberg, Le Management, voyage au centre des organisations, Paris : Ed. d'Organisation, traduit par Behar J-M, 1999.

19.

Le terme de logique des acteurs, ou logique d’action provient notamment de la sociologie des organisations. La sociologie des logiques d’action s'oriente dans trois directions : « la nécessité de dépasser le corpus classique de sociologie des organisations - l'impossibilité de penser les organisations en dehors d'une dialectique entre le conflit et la coopération - réarticulassions d'ensembles théoriques pouvant a priori sembler exclusifs. Réf : Henri Amblard, Philippe Bernoux, G. Herreros, Y.F Livian, Les nouvelles approches sociologiques des organisations, Paris, Le Seuil, 1996.

20.

Voir synthèse méthodologique générale en annexe, tableau 3.

21.

Pour exemple, l'œuvre de Pierre Bourdieu est justement construite sur la volonté affichée de dépasser une série d'oppositions qui structurent les sciences sociales (subjectivisme/objectivisme, micro/macro, liberté/déterminisme), notamment par des innovations conceptuelles. Les concepts d'habitus, de capital ou de champ ont été conçus, en effet, avec l'intention d'abolir de telles oppositions. Voir notamment : Pierre Bourdieu,Homo academicus, Paris : Le Sens Commun, réédition, 1992.

22.

Suivant la classification proposée par Yves Bertrand qui distingue 7 grandes options théoriques en éducation, à partir des travaux français et québécois. Yves Bertrand, Théories contemporaines de l'éducation, Ottawa, Agence d'Arc inc., 1991 (2e éd.).

23.

Les théories sociocognitives mettent au jour les facteurs culturels et sociaux dans la construction de la connaissance. Aux Etats-Unis et au Canada, ce courant remet en question la domination du courant cognitiviste de la recherche ou la trop grande influence accordée à la dimension psychologique de l'éducation. Ces théories se préoccupent du changement à apporter à l'éducation en fonction des facteurs sociaux et culturels et s'interrogent sur la construction des savoirs.

24.

Les théories sociales qui éclairent les dimensions proprement sociales, environnementales, institutionnelles de l'éducation. Elles visent à résoudre les inégalités sociales et culturelles que les institutions scolaires tendent à reproduire.

25.

Voir annexe tableau 3.

26.

Pour Gaston Mialaret, les sciences de l'éducation sont constituées par l'ensemble des disciplines qui étudient les conditions d'existence, de fonctionnement et d'évolution des situations et des faits d'éducation. Démêler les facteurs qui entrent en jeu requiert ainsi un grand nombre de disciplines scientifiques : sociologie de l'éducation, l'histoire, la démographie, l'économie de l'éducation, etc. Gaston Mialaret, Pédagogie générale, Paris, PUF, 1991.

27.

Par commodité, nous utiliserons l’acronyme MMI dans la suite du texte.

28.

Voir figure 1.1. 

29.

Selon les principes poursuivis actuellement dans le domaine du marketing des services. C. Cudennec C., G. Tocquer G.,Service Asia, op. cit.

30.

La sociologie des logiques d'action démontre qu’il ainsi possible d’explorer six dimensions de l'acteur : stratégique ( M. Crozier et E. Friedberg) ; social-historique (en référence à la sociologie de Pierre Bourdieu) ; identitaire ( R. Sainsaulieu) ; culturel (P. d'Iribarne) ; groupal (R. Kaes, D. Anzieu) ; l'acteur pulsionnel (cette dernière dimension renvoie aux théories socio-psychanalytiques de Eugène Enriquez ou à d’autres théories telle que celle de la motivation de P.Diel).

31.

Selon l’analyse de d’Alchian et Demsetz, sur les différents systèmes de propriété des organisations qui suggère que les organisations mutualistes et à but non lucratif sont efficaces lorsque leur objectif implique une certaine indépendance vis-à-vis du marché, ou du moins une adaptation lente à ses évolutions. Si les universités sont traditionnellement des organisations à but non lucratif, y compris lorsqu’elles sont privées, c’est précisément pour pouvoir défendre des valeurs et des positions intellectuelles indépendantes de la demande du marché. Incarné en des temps mythiques par des universités historiques comme l’université Humboldt ou la Sorbonne, cet idéal constitue l’un des éléments essentiels de la culture académique. B. Tinel, « Que reste-t-il de la contribution d'Alchian et Demsetz à la théorie de l'entreprise ? », in Cahiers d'économie politique 2004/1, n° 46, p. 67-89.

32.

Logique d'un secteur de plus en plus concurrentiel, soumis à des effets de marque, à des contraintes de rentabilité, etc.

33.

Nous verrons dans le chapitre 3 que le problème n’est pas récent au Viêt-nam et qu’il s’est produit de manière identique avec des universités de Singapour et de Taiwan. Notamment en référence au rapport de Jacques Hallak, Formation et enseignement supérieurs au Vietnam - Transition et enjeux, Hanoi : MAE-Ambassade de France en République Socialiste du Viêt-nam, Les cahiers de la coopération, 2002.

34.

Concept notamment développé par Keynes ou Stiglitz.

35.

Annie Vinokur, Pouvoir et du financement de l’éducation, Publication dans le cadre du réseau FOREDUC, réseau international et pluridisciplinaire, attaché à l’UMR Economie X de l’Université Paris X – Nanterre. 2007.

36.

Michaël Porter, L'avantage concurrentiel, Paris : Inter édition, 1986.

37.

C. Cudennec Tocquer G.,Service Asia, op. cit.

38.

J.P Lemaire, avec la collaboration de G.Petit, Stratégies d’internationalisation, Paris : éd. Dunod, 1997.

39.

Les travaux les plus radicaux à ce propos ont notamment été menés par Pierre Jallée, Le pillage du tiers monde, Payot, 1975.

40.

En fonction du moment où elles interviennent, on peut distinguer trois grands types d'évaluation des politiques publiques : - l'évaluation ex ante, c'est-à-dire l'étude prospective de la faisabilité et de l'impact d'une mesure projetée ou en préparation ; - l'évaluation ex post qui vise à apprécier les résultats des actions après coup au regard des objectifs, permette de tirer les enseignements rétrospectifs sur une politique parvenue à maturité ; - l'évaluation in itineris ou chemin faisant. Référence Conseil Scientifique de l’Evaluation, « Petit guide de l’évaluation des politiques publiques », inrevue La documentation française, N°3, 1996, pp. 531-550.